Histoire du Dix-huit fructidor : Première partie

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HISTOIRE

sailles ; et en effet, le temps qu'on perdoit en longues et vaines discussions créoit et augmentoit les difficultés. Déjà un nommé Lecointre avoit osé faire arrêter les voitures de la Reine, et chaque instant compromettoit davantage la sûreté du Roi. Enfin tout autre considération alloit céder à ce puissant intérêt, lorsque M. Necker présenta à ce Prince le tableau le plus déchirant: Versailles livré au pillage, une grande partie des membres de l'Assemblée massacrés, Paris en proie à toutes les horreurs de la famine et de la guerre civile. Le ministre savoit bien qu'en intéressant sa sensibilité, on étoit assuré de le vaincre : il se garda bien de parler des moyens de prévenir tant d'horreurs, quoiqu'ils fussent encore nombreux et suffisans. L'idée devoir réaliser cet affreux tableau fit frissonner le R o i : il ne balança plus, et se résigna à tout ce qu'il devoit redouter du délire d'une populace furieuse et sans frein. O n défendit aux troupes de tirer : le régiment de Flandre, qu'on craignit de ne pouvoir pas contenir, fut relégué dans ses casernes, et les gardes-du-corps se replièrent dans les arrière-cours du château. L'Assemblée nationale saisit cet instant pour présenter à la sanction du R o i la déclaration

des droits de l'homme, sur laquelle

le matin même il avoit proposé des observations. C'étoit au moment où une troupe de rebelles menaçoit la vie de cet infortuné P r i n c e , qu'on le forçoit à signer un acte qui brisoit tous les liens propres à les contenir ! U n calme trompeur succéda à cet orage : la horde de femmes s'éloigna du château et se répandit dans la salle de l'Assemblée. Assises pèle - mêle avec ces au-


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