Histoire du Dix-huit fructidor : Première partie

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DU

DIX-HUIT

FRUCTIDOR.

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nation. Un désir presque général de vengeance se manifesta dans le peuple de Paris. Les chefs du projet, voyant les esprits si bien disposés , en concertèrent habilement l'exécution : plusieurs d'entre eux se revêtirent d'habits de femme, et à la tête d'une foule de prostituées qu'ils avoient soudoyées , ils se portèrent i n o pinément à l'Hôtel-de-Ville, en demandant du pain : ils en enfoncèrent les portes , s'emparèrent des armes qui s'y trouvoient, et feignirent de vouloir réduire le bâtiment en cendres. Bientôt ces forcenés prirent,à l'instigation de ceux qui les dirigeoient, la résolution d'aller à Versailles. Si des femmes honnêtes se rencontroient sur leur passage , elles les saisissoient, les traînoient dans la boue et les forçoient à les accompagner. Q u e l ques misérables de la lie du peuple servoient d'escorte à cette troupe de bacchantes et protégeoient leur marche. Pendant ce premier mouvement,les troupes s'étoient rassemblées:la garde nationalesoldée,où se trouvoient beaucoup de soldats aux gardes et de déserteurs de tous les régimens, exigea que M. de la Fayette la conduisît à Versailles, pour y venger le prétendu outrage fait à la nation : il voulut la détourner d'un dessein aussi criminel ; mais ses représentations ne furent point écoutées. O n ne lui répondit qu'en le menaçant de la lanterne, par allusion à la fin déplorable de M. Foulon. Ainsi ce général, qui avoit eu jusqu'alors un empire si absolu sur ses soldats, se vit forcé de les suivre : il ne partit néanmoins qu'après avoir eu la précaution de se faire autoriser par la municipalité. Il marcha à la tête d'une armée nombreuse, grossie à chaque instant


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