De Paris à Cayenne : Journal d'un transporté

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DE PARIS A CAYENNE

épouses, mères héroïques, qui du sang italien n'ont gardé que la douceur pour la mêler à leur vertu. Salut, encore une fois salut ! Notre arrivée était un événement pour la ville d'Ajaccio, et l'autorité fit ce qu'elle put pour tromper son impatience et sa curiosité. On nous fit quitter le Tanger avant cinq heures du matin, et la nuit régnait encore quand nous montâmes dans les diligences qui devaient nous conduire à notre destination. En dépit- de l'heure, une foule nombreuse avait envahi les rues qui débouchaient sur le port, et il fallut le concours de la garnison tout entière pour refouler et maintenir à distance la population accourue pour assister à notre débarquement. Dans n'importe quel département de France, le transfèrement d'une trentaine de prisonniers se fût opéré sans difficulté avec deux ou trois voitures cellulaires ; mais ces délicieux véhicules, produits merveilleux de la philanthropie officielle, ne fonctionnent pas encore dans l'île de Corse, et il ne fallut pas moins que la mise en réquisition de tous les moyens de transport disponibles pour assurer notre voyage. Et encore fallut-il laisser en arrière cinq à six de nos camarades, qui formèrent un second convoi. Aux gendarmes continentaux et aux gardiens qui nous avaient accompagnés depuis Belle-Ile s'ajouta une nombreuse escorte de gendarmerie corse, qui précédait et suivait à


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