De Paris à Cayenne : Journal d'un transporté

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DE PARIS A CAYENNE

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Le directeur de l'intérieur, M. Favard, que j'avais connu dans le monde avant 1830, alors qu'il était délégué de la Guyane à Paris, tout en se gardant bien de reconnaître ces anciennes relations, me fit assurer qu'il n'attendait que la fixation de son budget pour me donner un poste dans ses bureaux. Ma réponse fut un refus, comme on peut le prévoir. Je ne tardai pas cependant à recevoir des offres plus acceptables, puisqu'elles n'engageaient en rien l'indépendance de mon caractère. Le trésorier avait à remplir un vide dans son personnel et me fit des propositions. Certes, rien n'était plus antipathique à mes goûts comme à mes habitudes qu'une occupation de ce genre. Aligner des chiffres, m'abîmer l'esprit dans des additions sans fin, c'était peu séduisant; mais l'oisiveté me pesait, et je voulais ne relever que de mon travail; puis la situation n'avait rien d'officiel; je n'avais affaire qu'au trésorier, j'étais en dehors des cadres de l'administration proprement dite. J'acceptai. J'avais été touché d'ailleurs de la délicatesse qui avait accompagné les offres du trésorier, et je n'eus jamais à me repentir d'y avoir cédé. Je fus accueilli au Trésor avec une convenance parfaite, et je me rappelle toujours avec quelle cordialité M. de la Tranchade — c'était le nom du trésorier — me consolait quand, à, mes débuts dans la comptabilité, je lui exprimais avec un sérieux qui me semble comique


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