De Paris à Cayenne : Journal d'un transporté

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PARIS

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permet difficilement aux capitaines marchands de trouver sur place un chargement de retour. Le moment était arrivé de me séparer du navire qui m'avait été si hospitalier, et j'éprouvais, à l'heure de l'adieu, des émotions bien différentes de celles que m'avait laissées l'Yonne. Sur la Seine, j'avais trouvé cent fois plus que je ne pouvais l'espérer, et le voyage n'avait eu pour moi d'autres ennuis que ceux qu'entraîne une longue traversée pour tous les passagers, quelle que soit leur position. Non-seulement le commandant m'avait complétement exempté des mille désagréments qui pesaient sur les transportés, mais il m'avait témoigné des attentions soutenues, donnant aux recommandations de l'amiral Laplace l'interprétation la plus large et la plus honorable. Son second, le lieutenant de vaisseau Goujart, à part quelques velléités promptement étouffées, ne manqua envers moi ni d'égards ni même de complaisance, et je le constate avec d'autant plus d'empressement, qu'il avait à faire violence aux entraînements habituels de son caractère. En même temps, tout l'équipage, employés d'administration, maîtres et matelots, s'efforçaient à l'envi de me faire oublier, par leur cordiale affabilité, la triste perspective qui m'attendait au terme du voyage. J'ai reçu de ce côté maint et maint petit service, maint et maint témoignage de sympathie, dont le précieux souvenir ne me quittera jamais. Parmi ces matelots au cœur


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