De Paris à Cayenne : Journal d'un transporté

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DE PARIS A CAYENNE

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que je n'en avais rencontré, je me demande dans quelle espèce me rangeait cet honorable commandant. En effet, au mois de juillet, sur la Méditerranée, une nuit passée sur le pont est souvent un plaisir. On y respire au moins et on peut échapper au voisinage dangereux des passagers pris du mal de mer. Si le temps est mauvais, c'est un cas de force majeure qu'on ne peut éviter et qu'on doit subir comme toutes les intempéries des saisons, et, pour ma part, j'eusse mieux aimé recevoir le baptême de la pluie et des vagues que d'acheter un abri au prix dont je l'ai payé. Le soleil s'était levé radieux et quand l'Eclaireur mouilla devant le fort de Notre-Dame-dela-Garde, auprès de Marseille, la Méditerranée, naguère si tourmentée, roulait paisiblement ses vagues azurées sous un ciel sans nuages. Il nous fallait changer de bord, et je regrettai peu de quitter l'Eclaireur, qui allait tourner le cap vers l'Afrique, pour y faire le service comme stationnaire. Mais allais-je gagner au change ? A quelques encablures de l'Eclaireur se balançait une lourde et longue gabare à hélice, dont les feux allumés annonçaient les préparatifs de départ : c'était l'Yonne, commandée par un nommé Chastenay, capitaine de frégate. Un chaland de la gabare vint nous chercher, et, au bout de quelques minutes, nous étions à 11


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