De Paris à Cayenne : Journal d'un transporté

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DE PARIS A CAYENNE

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XI

Les nuits du fort Lamalgue. — Les ennemis invisibles — Les condamnés arabes. — Symptômes de départ. — L'habit bleu barbeau et la poudre de riz ne font pas un homme.

Les mois s'écoulaient sans rien changer à une situation qui, en se prolongeant, devenait de moins en moins tolérable. Les casemates, remplies outre mesure, ne pouvaient plus recevoir de nouveaux hôtes, et, bien que l'augmentation du personnel m'eût laissé la jouissance exclusive de mon cachot, je ne laissais pas que d'en souffrir. La foule qui encombrait le préau me permettait à peine d'y prendre l'air, pendant les rares moments où l'action du soleil n'en rendait pas le séjour insupportable; quant à la promenade, il me fallut y renoncer. Des deux cents prisonniers qui se disputaient l'étroit promenoir, les uns s'étendaient sur le sol pour y dormir ou se formaient en cercle pour dérober aux surveillants la vue d'une partie de jeu ; les autres se livraient à des gymnastiques qui auraient pu passer pour des batailles, et qui se terminaient par des poussée générales,


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