Bulletin de la Société de Géographie : deuxième série, tome VII

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( 132 ) puisse même approcher de l'aspect à la fois horrible et majestueux des cataractes du Jarry. J'ai vu depuis des rivières célèbres par leurs chutes, et j'y ai même perdu des embarcations ; mais je n'y éprouvais pas ce saisissement involontaire auquel je fus presque continuellement en proie, jusqu'au jour où je faillis être victime de l'impéritie de mes guides. Déjà nous étions parvenus à franchir les principaux obstacles ; les rapides les plus dangereux étaient passés, m'assuraientils; déjà, moins sur leurs gardes, ils me faisaient presque partager leur sécurité, lorsque, arrivant sur le bord d'un rapide, le pilote se laissa aller au courant, et le canot fut mis en pièces en un clin d'œil. Tout l'équipage périt sauf un nègre, et je ne dûs mon salut qu'à un canot de Tapouyes qui vint à mon secours. Ces Tapouyes retournaient à Garoupa; ils me donnèrent passage d'assez mauvaise grâce. La rivière se resserre, et coule pendant deux jours entre deux remparts de roches élevées et découpées en formes les plus bizarres. Naviguant toujours avec la plus grande rapidité, les Indiens me débarquèrent à Garoupa, le 24 juillet. Les habitants m'accueillirent comme un pauvre naufragé, et me firent les offres les plus obligeantes. J'en partis le 2 7 , et le 1 5 août, j'arrivai à Belem ( P a r a ) . Mon naufrage me fut d'autant plus pénible, qu'outre mes marchandises et mes effets, je perdis de nombreuses collections d'objets

d'histoire naturelle, et

tous mes papiers, contenant des notes de mes premiers voyages, et toutes les observations que j'avais pu faire. Je mis dix-huit jours pour me rendre de Garoupa à Para : je fus accueilli par M. Crouan, vice consul de France dans cette ville ; mais il n'avait


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