Mémoires de Billaud-Varennes

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( 31 ) toujours les bien-venus dans leur pays, qu'ils nous rendaient mille actions de grâces de ce que nous avions quille notre patrie, nos païens, nos amis, pour venir d'aussi loin travailler au salut des âmes indiennes, et qu'enfin ils nous honoraient comme des apôtres, des saints, des anges tutélaires. » Ce compliment fut appuyé d'une bourse assez ronde, que notre apôtre en chef mil dans sa large poche. Ensuite , le cher homme, qui rapportait volontiers tout à l u i , répondit à notre orateur avec une tendre onction, mais d'une voix tant soit peu nazillarde : « Qu'il était satisfait de leur reconnaissance, ravi de leur honnêteté; que rien au monde ne lui était plus cher (après l'argent) que leur salut, et q u e , pour le leur procurer, il s'était exposé à toutes sortes de périls, tant sur la terre que sur l'onde, bravant jusqu'à la barbarie des autres indiens, qui ne connaissaient point encore la vraie religion , pour le service de laquelle il était résolu de ne point épargner sa vie. » Le bon apôtre! Sur cela, en prenant congé de ces honnêtes citoyens, qui nous accompagnèrent pendant trois lieues , il fit, aux principaux, pour ne pas être en reste, certains présens.... de médailles en plomb, de croix d'airain, de chapelets, d'agnus dei; et chacun de nous, comme lui, donna à chacun d'eux ; trente années d'indulgences, en vertu du pouvoir que nous avions reçu du pape de les distribuer partout et à tous ceux que nous en croirions dignes. Les respects de ces bonnes gens et leur soumission, la vanité d'être reçus avec autant d'honneurs publics, enflèrent tellement le coeur de nos jeunes religieux , qu'ils se crurent bien au-dessus des évêques d'Espagne, lesquels, malgré tout leur orgueil , ne recueillent jamais


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