Mémoires de Billaud-Varennes

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U n peu avant minuit... le coeur me bat ! je vois filer dans le j a r d i n , comme une étoile errante, un petit astre, c'est-à-dire , une lanterne sourde, qui s'approche de ma croisée, et disparaît dessous. — Si ! — B o n ! — Voilà tout l'entretien , et je jète le fil. Trois minutes s'écoulent... rien ! . . . Ah ! un bruit sourd au pied du m u r . . . Qu'entrevois-je ? la grande échelle à cueillir les oranges? Il n'a pu seul la transporter ici au lieu de l'autre . . . Mais l'étoile scintille au faîte de l'échelle, et le porteur du phare qui m'éclaire , me passant une lime : — Coupez deux barreaux , mon cher maître, à la première grille ; je me charge de la seconde.— Bon Azor ! génie tutelaire , q u e ne dois-je pas... — T r a v a i l l e z , nous causerons en r o u t e . — J e puis , du moins, en parlant b a s . . . — Plus haut, si vous voulez : c'était hier la fête du grand SaintD o m i n i q u e , le souper a duré trois heures , ils dorment tous connues des .. porcs-épics. —Auraistu porté seul cette double et pesante échelle? — J'aurais pu l'amener , si elle était roulante , à la place d'une a u t r e , qui est moins sûre : un jeune Indien de la ville m'a aidé et veille là bas.— Comment ! par où est-il entré. — Par une porte du verger dont j'ai fait sauter la serrure : j'aurais pu l'introduire aisément par la grande porte; car le frère portier est ivre ; mais j'ai préféré l'autre, qui donne sur la rue S t . - J a c q u e s , où demeure cei I n d i e n , aubergiste et limonadier, chez lequel vous aurez un gîte, en attendant... — Es-tu sûr de ce garçon-là? — Comme de moi : j'ai épousé sa sœur, et nous sommes amis , quoiqu'elle m'ait quitte... — A h ! tu es ?... — Marié et libre. Deux heures suffisent à peine pour scier les quatre, barreaux , pi nous n'étions pas sur des


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