Mémoires de Billaud-Varennes

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Azor me fait apercevoir, en souriant, que je l'ai à la main. La distraction jésuitique, mais peu adroite, ne. me permettait pas de rester court longtemps. Votre conclusion, M. Azor, n'a pas le sens comm u n . . . — Pardonnez-moi, je n'avais pas conclu encore. — Deux fois pour une , dans une thèse sophistique , insoutenable , absurde... ( Bien ! de grands mots pour de bonnes raisons, ) — La nature... — Silence !... (Il y a des instans , hélas, où l'on doit être un peu despote ). Ecoutez , mon ami : une tradition vaut mieux que dix raisonnemens; et mille témoins oculaires ont attesté les clameurs de la dame, sa perte et la naissance de la rivière... — Où en est le procès-verbal, dans un pays où l'on en fait pour rien ? — Ne m'interrompez pas, vous dis-je : ils ont attesté le miracle à leurs enfans , d'où cette histoire est venue jusqu'à nous. Me direz-vous aussi que la rivière coulait incognito avant ce fait indubitable ? — Une convulsion de la nature peut bien l'avoir fait naître , et ce volcan... — Paix donc ! —Quand vous m'interrogez... —Encore !.. Résumons : cette histoire, je le répète , n'est que trop authentique; elle doit donc servir d'exemple et d'instruction à chacun , en prouvant qu'il ne faut jamais défier le pouvoir céleste , et qu'il faut toujours l'adorer. Voilà ce que je dis de mieux. — J e me rends , monsieur le curé ; mais un seul mot encore : ce torrent-là valait au moins cent bons missionnaires ; pourquoi donc tant d'Américains restèrent-ils toujours , et sont-ils encore idolâtres ? — Oh ! c'est que le torrent ou la rivière ne va pas jusqu'à eux, non plus que les prédicateurs... —Vous m'avez dit que les jésuites allaient jadis prêcher par tout —Leurs convertis u'avaient pas de mémoire, ou ils étaient... des


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