Mémoires de Billaud-Varennes

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effrayé, redescendit, et alla nous attendre an pied du mont formidable et fertile, chez un capucin solitaire, q u i , dans son ermitage, nous préparait un excellent dîner. Don Chrisostôme et moi, plus hardis ou plus curieux, parvînmes avec peine à la cîme de la montagne, que la neige recouvre lorsque Vulcain sommeille : nous ne vîmes d'abord qu'une épaisse fumée qui, sortant du vaste entonnoir par des bouffées intermittentes, roulait en vagues, s'élevait et tourbillonnait dans les airs : pendant un de ces intervalles, l'obscurité s'évanouit ; nous eûmes le temps d'admirer à découvert, non sans fayeur, le cratère de ce volcan. Il ressemblait à un immense fourneau de verreries, dont la circonférence serait d'environ mille toises et la profondeur de trois mille ; la lave ardente et rouge, bouillonnait dans le fond de cette chaudière infernale , avec un fracas aussi fort que celui de plusieurs tonnerres, et l'air, s'en échappant avec des sifflemens affreux, avait une action si violente, que toute la montagne en était ébranlée. Bientôt cette brûlante lave, se soulevant par ondulations plus menaçantes, la vapeur sulfureuse s'élance de nouveau comme pour nous atteindre ; nous fuyons, et à peine sommes-nous parvenus , en descendant, à cent toises du bord de cet abîme, qu'il commence à vomir des ponces liquefiées et des pierres ardentes avec tant de furie, q u e , si la providence ne nous eû lait rencontrer une roche où nous trouvâmes un abri, deux jacobins étaient rayés du nombre des vivans. Une heure après, l'explosion cessa ; nous descendîmes, nous dinâmes; mais, vers le soir, quand nous étions en r o u t e , il s'en fit une autre pli.; forte; et nous admirâmes, sans crainte, cette im-

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