Mémoires de Billaud-Varennes

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ceux de Mexico et de Tlatelusco étaient les plus considérables. La place où se tenait, de quatre en quatre jours, celui du chef lieu de l'Empire, avait des portes, et elle était si grande, qu'on y voyait alors jusqu'à cent mille individus. Chaque sorte de marchandises était placée à part et avec beaucoup d'ordre : ici, la pierre, la chaux, la brique, le bois et le charbon; là, des couleurs pour peindre et teindre, composées avec des racines, des écorces, des fleurs, des fruits ; plus loin , des vases ou des vaisseaux de terre peints et vernis; ailleurs des cuirs de boeufs apprêtés sans ou avec poil, propres à faire des chaussures, des rondadles ou boucliers, et àdoubler des corselets de bois; d'un côté, des pelleteries, des plumes de divers oiseaux, des nattes fines ou communes, des mantes de coton pour lits, vêtemens ou tentures; de l'autre plusieurs sortes de cotonades blanches , qui tenaient lieu de linge. L'on y trouvait aussi des mantes , faites avec les feuilles de l'arbuste nommé metli, avec l'écorce du palmier, avec du poil de zepotna espèce de lapin ; mais les plus estimées étaient celles de plumes tirées du coq d'inde sauvage : pour l'empereur et pour les grands, -on y entremêlait le plumage du sensoutlé, nom qui signifie cinq cents voix et celui

du mema ou cardinal. Ce que l'on recherchait avidement, étaient les singuliers et étonnans ouvrages, tissus d'or et de plumes, où se trouvaient représentés des arbustes, des roses, des papillons, et des oiseaux. Les Mexicains, patiens et industrieux, réussissaient surtout dans ces petits chefsd'œuvre par la grande application qu'ils y mettaient : un ouvrier passait souvent tout un jour sans manger, pour placer une plume en son vrai point de v u e , la tournant et la retournant plus de cent


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