Compte rendu de mon mandat d'octobre 1893 à mai 1898

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— 28 — dire de la complaisance vraiment admirable que j'avais moi-même mise, un moment, à aider de mon mieux à une combinaison que je savais si bien n'être absolument dirigée que contre moi. Or, de tout ce grand tapage, de tout ce prétendu désir de faire du bien aux communes, de toutes ces manifestations uniquement dirigées contre Franconie, de toute cette guerre folle que le Conseil général, pour continuer à dissimuler, dut déclarer à la fin jusqu'au gouvernement métropolitain même, par sa démission en masse, et les violences de langage qui raccompagnèrent, quel fut le résultat? Citoyens, vous l'avez vu. C'est que, sur la proposition, à l'unanimité, du Conseil privé même de la Guyane, le gouvernement finit par rendre un décret qui, non seulement enlevait définitivement, désormais, au Conseil général tout droit d'élever les subventions communales au delà du vingtième du produit des taxes et contributions, et n'en laissait plus la faculté qu'à l'Administration locale, quand elle le jugerait convenable, mais encore allait avoir pour conséquence d'obliger les malheureuses communes rurales à établir dorénavant chez elles des taxes municipales, que la plupart d'entre elles sont évidemment incapables de supporter. El voilà comment le Conseil général avait réussi à sauvegarder une de ses prérogatives. Et voilà comment il avait réussi à faire du bien aux communes. Dira-t-on qu'il ne pouvait s'attendre à un pareil résultat? A quoi donc, alors, pouvait-il bien s'attendre? A ce que le gouvernement sanctionnât l'illégalité d'un de ses votes? A ce qu'il s'engagât ainsi à faire dorénavent, toujours et quand même, toutes les volontés de votre représentation administrative locale? A ce qu'il respectât même l'abus que celle représentation voudrait faire parfois de ses prérogatives? En vérité, dans quel cerveau humain pareilles pensées, pareilles prétentions, pareilles espérances, ont-elles jamais pu germer, je vous le demande ? En quel temps, dans quel monde a-t-on jamais pu espérer faire consacrer des violations de lois? En quel temps, dans quel monde a-t-on jamais pu espérer se soumettre ceux mêmes dont on tient ses prérogatives? En quel temps, dans quel monde a-t-on jamais pu espérer voir respecter jusqu'à l'abus de ces prérogatives, à moins d'avoir perdu tout bon sens? En pareil cas, n'y a-t-il pas lieu de ne jamais s'attendre, au contraire, qu'à toute résistance, qu'à tout rappel aux limites des lois?


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