Bulletin de la Société de Géographie

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A LA GUYANE (18 FRUCTIDOR).

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infortunée patrie, nous attendrons dans le calme et la solitude le moment fortuné où la justice et l'honneur nous y rappelleront. Les relations avec nos familles ne seront pas impossibles; le commerce peut les multiplier et, en soulageant nos cœurs, accroître nos facult é s ; enfin, la richesse de la nature dans ce pays offrira à notre curiosité une foule de moyens de l'intéresser. Bercés par ces agréables idées, nous entrâmes dans la grande rade de Cayenne, où nous jetâmes l'ancre le 10 novembre après midi. Nous nous trouvions encore à trois lieues de la ville, et malheureusement il était trop tard pour que notre débarquement s'opérât ce même jour. Nous fûmes donc condamnés à passer encore une nuit dans notre fournaise... Qu'elle fut longue ! L e lendemain matin, l'agent(1) du Directoire, instruit de notre arrivée par un officier que lui avait envoyé le capitaine Laporte, dépêcha une goélette chargée de nous transporter à Cayenne. Il enjoignit en même temps au capitaine de rester à son bord, et de ne laisser descendre aucun individu de son équipage jusqu'à nouvel ordre. Cette précaution n'eut d'autres motifs que la crainte qu'il ne se trouvât des agitateurs dans l'équipage et le désir de s'assurer, avant une libre communication, des véritables causes d'un événement aussi extraordinaire que celui qui nous amenait à Cayenne. Cependant le capitaine en fut fort intrigué; mais, dès le soir, ses inquiétudes se dissipèrent; l'agent fut obligé de l'appeler pour recevoir les instructions dont il était porteur, et qu'il ne voulut confier à aucun intermédiaire. L a goélette qui nous avait pris à son bord était commandée par un capitaine marchand nommé Despeyroux. (1) Les agents du Directoire dans les colonies exerçaient mêmes fonctions que les intendants avant la révolution.

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