Histoire de la découverte et de la conquête de l'Amérique

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DÉCOUVERTE DE L'AMÉRIQUE.

vouement de ses soldats que Gortez donna le signal du départ et mit à la voile pour aller conquérir u n empire beaucoup plus vaste que tous les pays réunis alors sous la domination du roi d'Espagne. Il était déterminé à suivre la route qui avait conduit Grijalva à d'importantes découvertes; aussi le voyonsnous d'abord s'arrêter dans l'île de Cozumel ; son arrivée fut un bonheur pour un Espagnol dont il brisa les fers et qui, jeté sur cette côte par un naufrage, avait été esclave des sauvages. Cet h o m m e , n o m m é Aquilar, avait déjà passé huit ans dans l'esclavage, et ses compatriotes eurent beaucoup de peine à le reconnaître, car il avait pris les mœurs et les habitudes, la langue et jusqu'à la figure des Indiens; le sceau de l'origine européenne était complètement effacé chez ce malheureux, qui semblait avoir presque oublié sa patrie. Il était n u comme les sauvages dont il avait la couleur basanée ; suivant la mode du pays, ses cheveux étaient tressés autour de sa tête ; portant u n e rame sur l'épaule, il tenait à la main un arc ; un bouclier et des flèches étaient attachés sur son dos. Il ne possédait pour tout bien qu'une bourse tricotée dans laquelle il mettait ses vivres, et qu'un vieux livre de prières qu'il lisait avec une pieuse assiduité ; quand il parlait, son langage était presque inintelligible; à peine se rappelait-il l'espagnol, sa langue maternelle, qui dans sa bouche était devenue un jargon barbare formé en grande partie de mots indiens. Il raconta à Gortez que, lorsque lui et ses compagnons avaient fait naufrage sur cette côte, ils étaient d'abord dix-neuf; la faim et les fatigues en firent périr sept; les autres furent pris par un cacique du pays, h o m m e féroce, qui en sacrifia sur-le-champ cinq à ses idoles, puis


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