CHRISTOPHE COLOMB.
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son amour-propre, mais dont il ne fut pas dupe ; ils n o m m è r e n t Nicolas Ovando gouverneur des Indes occidentales. Ce fut en vain que Colomb invoqua des engagements solennels qui lui garantissaient ce gouvernement pendant sa vie et l'assuraient à perpétuité à sa famille; ce fut en vain qu'il réclama contre la nouvelle et criante injustice qui le destituait de son emploi comme un administrateur coupable, après que le gouvernement avait reconnu et proclamé son innocence : ses plaintes ne furent pas écoutées, et Ovando fut maintenu dans le commandement des Indes occidentales. Indigné de cette conduite déloyale du gouvernement espagnol, Colomb ne put maîtriser cette fois son indignation ; il la laissa éclater en légitimes récriminations, en reproches amers contre la cour d'Espagne. Dès lors, il porta toujours avec lui les fers dont il avait été chargé ; il les montrait partout où il allait, comme-le témoignage de l'ingratitude qui avait payé ses services ; il les avait toujours devant les yeux, et il ordonna qu'après sa mort ils fussent enfermés avec lui dans son tombeau. Pendant que l'amiral, sacrifié à une politique ingrate et ombrageuse, exhalait ses plaintes impuissantes, Ovando se disposait à aller occuper le poste auquel il venait d'être élevé par le roi. La flotte dont il avait le c o m m a n d e m e n t était la plus considérable que le gouvernement espagnol eût jusqu'alors envoyée dans les Indes occidentales : composée de trente-deux voiles, elle avait à bord deux mille cinq cents hommes qui, pour la plupart, devaient s'établir à l'île Espagnole. Ovando partit à la tête de cette grande expédition, laissant à Colomb, arrêté tout à coup dans sa noble carrière, la douleur de voir qu'un autre allait lui enle-