Les colonies et la politique coloniale de la France

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LA GUYANE.

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l'Etat, à des prix fort élevés, toute la récolte : peine jusqu'à présent perdue ! Cette variété ne prospère que dans les terres basses, et les noirs, répugnant au travail pénible, ne s'y portent pas volontiers; elle périt par les grandes pluies de janvier et de février, que le climat ramène infailliblement tous les ans. Aussi la préférence se porte-t-elle sur les espèces indigènes, qui sont plus rustiques et exigent moins de soins ; il est vrai que les résultats se réduisent à peu de chose. L'exportation, qui atteignait, il y a une vingtaine d'années, près de 300,000 kilogrammes, dépasse à peine 3,000 aujourd'hui! Les arbres à épices, parmi lesquels comptent surtout le giroflier, le muscadier, le cannellier et le poivrier, ont joui d'une faveur inégale. Les trois derniers ont successivement décliné jusqu'à ne plus compter aujourd'hui dans les produits sérieux de la colonie. Pour le cannellier on accuse l'infériorité du produit comparé à la cannelle de Ceylan, pour le muscadier une végétation médiocre, pour le poivrier une fécondité qui s'éteint on ne sait pourquoi. Probablement il y a au fond de toutes ces révolutions de culture des questions de prix et aussi de convenance économique. Les administrateurs français ont le goût de l'acclimatation, et ils tirent vanité du moindre succès; à les entendre, chaque colon devrait adopter tous les végétaux que le pays comporte : vues d'horticulteurs, non d'agriculteurs! La simplification est le secret de la prospérité agricole. Un petit nombre de plantes bien choisies et bien exploitées rapportent plus qu'une multitude de végétaux dont les exigences se combattent. Ces réflexions n'accusent pas le principe même de l'acclimatation, en faveur duquel le giroflier, introduit à la Guyane vers 1777, sur la plantation la Gabrielle, est un heureux témoignage, qui fut justement consacré par un monument élevé dans l'ancien jardin public de Cayenne. On rapporte ordinairement au Lyonnais Poivre, intendant des îles de France et de Bourbon, l'honneur d'avoir dérobé aux Hollandais les arbres à


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