Les colonies et la politique coloniale de la France

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LES ANTILLES.

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des facultés personnelles et la confiance réciproque qu'enfante l'harmonie entre les citoyens. C'est de ce côté que les colonies ont laissé le plus à désirer, et la faute en est bien moins à l'esprit créole qu'au système général de la politique métropolitaine, peu propre, on l'a vu, à développer les grands caractères et à les unir entre eux et au pays. Les institutions faisaient trop défaut aux hommes, et les gouverneurs, de concert avec les intendants, amoindrissaient trop les administrés. Cependant les concessions les plus libérales appartiennent à l'ancien régime, il n'est pas inopportun de le noter. Le conseil souverain de la Martinique, sans posséder les pouvoirs suprêmes que ce titre ferait supposer, jouissait d'une autorité considérable, et, s'il n'eût constitué une oligarchie, la colonie aurait pu se croire bien représentée dans tous ses intérêts par l'élite de ses habitants. L'ancien régime connut encore les chambres d'agriculture et de commerce, les députés de paroisse votant l'assiette et la répartition de l'impôt, les assemblées coloniales instituées par Louis X V I en même temps que les assemblées provinciales de France. Durant la révolution, l'esprit local triompha plus que jamais, aussi bien à la Martinique, devenue anglaise, qu'à la Guadeloupe, soumise de nom plus que de fait à la république. La centralisation monarchique reprit le dessus avec le consulat et l'empire, et ne l'a plus perdu. Comités consultatifs locaux, conseils coloniaux, conseils municipaux, conseils généraux même, privés de l'appui que donnent l'élection populaire et la publicité, n'ont opposé qu'un bien faible contre-poids au pouvoir absolu des gouverneurs, dont le renouvellement incessant entretenait pourtant l'incompétence. Jalouse au loin de sa suprématie absolue, la métropole ne pouvait y être indifférente de près : aussi faut-il arriver jusqu'à la fin du règne de Louis X V pour trouver des délégués coloniaux admis, d'après l'exemple qu'avait donné l'occupation anglaise, à siéger au bureau du commerce à Paris au même titre que les délégués des ports de mer. La révolution de 1789,


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