Les colonies et la politique coloniale de la France

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LE SÉNÉGAL.

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Les uns et les autres sont à demi sédentaires. Il en est autrement des Toucouleurs et des Hayors, population flottante, en renouvellement perpétuel. Les Toucouleurs, au nombre de quatre cents, viennent de toutes les parties du Fouta. Plus rusés que les Ouolofs, plus nomades que les Bambaras et les Sarrakholès, ils se placent comme interprètes, courtiers, tisserands, manœuvres. Les Hayors, qui viennent du Cayor, sont tous manœuvres. Il est enfin un dernier groupe, le plus misérable de tous, qui a droit à une mention , malgré son rôle tout passif : ce sont les Pourognes, ou captifs de Maures, affranchis par la fuite ou par la guerre, qui les a fait tomber en nos mains. Les uns sont natifs du pays des Sérères, entre le Cayor et la Gambie, où les Maures faisaient, malgré la distance, de fréquentes incursions avant que les Français n'y missent ordre. Les autres sont nés de l'union des Maures avec leurs négresses esclaves et non musulmanes. Généralement abrutis et amaigris par un long et dur esclavage, ces malheureux parias ont besoin de quelque temps de séjour et d'air libre à Saint-Louis pour reprendre conscience de leur personnalité. Les noirs de la ville, affranchis de la veille qui aiment à se donner des airs de maîtres, emploient volontiers les Pourognes dans l'intérieur de leurs cases. Longtemps les idées et les occupations de cette population, bien hétérogène, comme on voit, se tournèrent presque exclusivement d'un seul côté, la traite des gommes dans les escales, le transport, le triage et l'expédition de ce produit à SaintLouis. Il en résultait toute une classification méthodique et fixe, correspondant à une division régulière du travail. Les négociants européens qui résidaient à Saint-Louis fournissaient les toiles bleues de coton ou guinées de l'Inde, principal article de trafic. Les traitants, qui composaient la classe presque entière des hommes de couleur, portaient et plaçaient ces guinées aux escales en échange des denrées du pays. Sous le nom de lap tots, les esclaves et les noirs pauvres servaient comme matelots


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