Les bagnes : Histoire, Types, Mœurs, Mystères

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A P R È S L E BAGNE.

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déré et traité comme un méchant? Que nos législateurs expliquent cette contradiction étrange; ils ont aboli, comme chose immorale, la marque, qui ne paraissait pas, et ils laissent subsister, comme chose très-morale apparemment, la surveillance, celte marque h i deuse qui ne peut pas se cacher 1! «Veut-on sérieusement ramener le coupable? Qu'on lui rende, après l'expiation, les droits qu'il avait perdus par ses c r i m e s ; qu'on le relève en lui tendant une main amie, qu'on lui apprenne à se respecter et à respecter les autres, en cessant de le mépriser et de le torturer l u i - m ê m e . Alors seulement la peine aura porté son fruit, le but du législateur sera atteint. Mais vouloir faire du libéré un homme utile à la société en les armant l'un contre l'autre, en irritant celui-ci par la répulsion de celle-là, c'est prétendre arriver au ciel par la voie qui mène aux enfers.» On est généralement d'accord que la surveillance, et le manque de ressources à la sortie de prison, sont les agents les plus actifs des récidives, et l'origine des nouveaux crimes commis par les libérés, Grand nombre d'écrivains ont signalé ce que cette position avait de dangereux; mais, à cet égard, le gouvernement est jusqu'à ce j o u r dans l'inaction; quelques hommes de dévouement ont pris l'initiative, et ont tenté des essais pour venir en aide à la position du libéré. Un entre autres, M. Appert, a conçu l'espoir de p r o curer à quelques-uns de ces malheureux une vie tranquille et ignorée ; il a ouvert le premier, aux libérés et aux enfants des prisonniers, dans l'intérieur de la France, un asile moral, une patrie bienfaisante, où l'instruction et le travail durent remplacer toutes les mauvaises habitudes

du vagabondage, de la prison et du

bagne. C'était une noble pensée de prendre en pitié l'enfant du c o n damné, que l'état actuel de nos mœurs et de nos lois rend plus malheureux que l'orphelin abandonné ; car l'hospice ne lui est pas ouvert, et, pour héritage, il n'a que le préjugé qui plane sur sa triste v i e ; la voie publique est son seul refuge; les mauvais lieux même lui ferment leur porte, puisqu'il est sans argent et souvent sans vêtements; alors il a recours aux amis de ses parents, aux complices de leurs crimes, et, livré ainsi au plus horrible ensei-


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