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LES BAGNES.
voit sa b a s s e - c o u r en désordre, il crie au voleur. L'autorité a c court, constate l'effraction et commence ses recherches. Délègue est sans contredit visité le p r e m i e r ; la plume du chapon est à sa porte : le propriétaire la reconnaît. Délègue est l'auteur du vol, il n'en faut pas douter ; le maire l'interroge; bientôt le coupable lui montre le chapon plumé, et convient qu'il l'a volé la nuit avec escalade et effraction. Traduit devant la cour d'assises pour ce nouveau
c r i m e , Délègue s'en reconnut l'auteur;
il en raconta
toutes les circonstances; et, dans un plaidoyer écrit, il exposa les raisons qui l'avaient porté à le commettre. Condamné de nouveau, il retourna au bagne. Un forçat depuis quelque temps en liberté écrivait à un de ses camarades cette lettre
arrêtée
par le commissaire du bagne de
Brest :
L..., le 7 juillet 1840. Mon cher H . . . , je t'écris de celle ville pour te faire connaître ma position depuis mon départ de Brest, c'est-à-dire depuis le 2 1 avril, .le roule d'une ville à l'autre sans pouvoir trouver du travail ; ce qui en est la cause c'est que les papiers qu'on nous délivre en sortant du bagne ôtent la confiance plutôt que de la donner, de sorte que je ne sais plus que devenir. J'ai remis à ton père et à la femme les objets dont-tu m'avais chargé. Ils m'ont offert cinq francs que je n'ai pas voulu recevoir. Je te salue d'amitié, ton a m i , Jacques C h . . . Cet homme s'étant bien conduit pendant sa captivité de 2 0 ans, il est à craindre que la misère ne le ramène au bagne. Cela n'arriverait pas s'il trouvait du travail pour vivre. Sur toute sa route et lors de son arrivée à sa destination, le forcal libéré est tenu de se présenter à l'officier public du l i e u ; mais l'autorité s'est-elle assurée de la discrétion de ces derniers? A voir ce qui se passe, on ne peut douter que la question ne doive être résolue par La négative.