La terreur sous le directoire

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LIVRE CINQUIÈME

III Burnel ne paraît pas s'être ému de ces évasions. Dans la lettre où il fait part au ministre de la première, il en reporte la cause à la dissémination des déportés et à la liberté dont ils jouissent : dans ces conditions, était-il possible d'exercer une surveillance un peu efficace ? D'ailleurs, le gouvernement s'intéressait-il à ces détails ? Il était permis à l'agent d'en douter. Depuis son arrivée dans la colonie, aucune communication officielle ne lui était venue de France (Lettres des 12 août et 24 octobre 1799). C'est par voie indirecte qu'en juin il reçut la nouvelle que l'île d'Oléron avait été substituée à la Guyane ; il prit sur lui de rappeler Barbé-Marbois et Laffon de Ladébat de Sinnamary et leur permit de vivre à Cayenne. Pour lui, il ne songeait qu'à son prochain départ, c'est à-dire à mettre en sûreté les richesses qu'il s'était procurées. Il avait jeté le désordre dans tous les services de la colonie, tantôt frappant les propriétaires de taxes arbitraires, tantôt armant les mulâtres, ou se rejetant du côté des nègres. Quand sa femme et sa fille furent embarquées et que le navire qui devait les emporter avec sa fortune allait mettre à la voile, il jeta le masque ; mais ses manœuvres étaient éventées, les habitants de Cayenne se révoltèrent. Burnel fut arrêté, consigné dans le port et obligé de remettre ses pouvoirs à un colon estimé, M. Franconie, dont la famille habite encore la Guyane. Cette sorte de révolution populaire se produisit à Cayenne le jour même où éclatait en France le coup d'État du 18 brumaire. Par un revirement étrange, bien qu'ils n'eussent pas été les fauteurs du mouvement, Barbé-


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