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LIVRE CINQUIÈME
de votre liberté et de votre vie, quelle est celle qui vénère votre
mémoire ou
qui
ait
même gardé votre nom ?
Burnel, successeur de J e a n n e t , arriva enfin et confirma l'arrêté de transfèrement. L'opération n'était ni sans difficultés ni sans embarras. Bien que la mort eût éclairci les rangs, il restait encore près de cent personnes, la plupart gravement atteintes ; celles
qu'on disait bien portantes
pouvaient à peine se traîner. Un premier groupe fut jeté le 25 novembre sur le tillac d'une goëlette, un autre se décida à faire à pied le trajet de cinq
lieues qui sépare
Conanama de Sinnamary. Huit jours après le départ de la première goëlette, une seconde emporta les plus malades. Avant de partir, les déportés incendièrent les karbets novembre-4
(25
décembre).
Sur
les
quatre-vingt-sept
dé-
portés de la Décade et les soixante-quatorze de la Bayonnaise, soit cent-soixante et une personnes, le cimetière de Conanama gardait trente-huit des premiers et trente et un des s e c o n d s : au total, soixante-neuf victimes] « N o u s vîmes arriver, écrit Barbé-Marbois, les débris de cette colonie détruite en naissant: lades exténués,
des
vieillards,
des
ma-
chacun portant son paquet et se traînant
à peine. Quelques-uns, trébuchant à chaque pas, s'avancèrent
devant
nous
vers
des
cases
préparées
à la hâte
pour les recevoir. Un d'eux, sortant de la pirogue faible et languissant, tomba dans l'eau près de ma cabane. J ' a c courus, j e le retirai et le portai quelques pas... J e point vu de spectacle ment . 1
n'ai
plus affligeant que ce débarque-
»
Sinnamary ne pouvait offrir aux arrivants qu'une hospitalité bien insuffisante. On logea les uns sous des hangars, les autres dans une grande case que céda Laffon 1
Op. c i t . II, 3 2 - 3 3 .