A l'ile du Diable : Enquête d'un reporter aux iles du salut et à Cayenne

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L'AFFAIRE

DREYFUS

« Des découragements, je n'en ai jamais eu, je n'ai jamais douté qu'une volonté, forte de son innocence et du devoir à remplir, n'atteigne son but. J'ai eu, j'aurai peutêtre encore des impatiences fébriles, qui sont les révoltes de mon âme ardente depuis si longtemps foulée aux pieds, accrues encore par ce silence sépulcral, ce climat énervant, l'absence souvent de nouvelles, sans rien à faire, parfois sans rien à lire. Mais si ma nervosité a été extrême pendant le dernier trimestre de 1895, la période la plus chaude, la plus mauvaise à la Guyane, mon courage n'a jamais faibli, car c'est lui qui m'a soutenu, m'a permis de doubler ce cap redoutable sans fléchir. Ne prête donc a u cune attention à cette nervosité qui éclate parfois ; dis-toi que je veux être avec toi, à tes côtés, le jour où l'honneur nous rera rendu. « Ta volonté, comme celle de tous, doit être ce qu'elle a toujours été, aussi grande, aussi indomptable que calme et réfléchie. « Ma santé est bonne ; mon corps, indifférent à tout, n'est animé que d'une seule pensée, commune à nous tous, commune, comme dit ta chère mère, à tout un faisceau de cœurs qui vibre de douleur, vit pour son honneur, si injustement arraché. En février 1896, il revient s u r cette action du clim a t à quoi il a fait allusion : « . . . Si parfois l'accablement du temps trop long et du


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