Drup danm

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107 L’approfondissement de la réflexion du travail déjà entrepris nous amène à poser le problème suivant : dans l’art du danmyé, le langage corporel est orienté vers le combat, pourtant, dans le dansé ladja, cette danse apparait parfois, non seulement comme une danse de combat, mais comme une danse versant plus sur le côté biguine ladja, sur le côté amour érotisé de la kalenda. Cet aspect de la danse nous a été signalé par plusieurs anciens. (Propos tenus par messieurs Ismain CACHACOU de Rivière Salée et Yvon PASTEL de Sainte – Luce). D’autres nous disaient que par rapport au danmyé, le ladja était plus un dansé. Ce mot est pris ici, dans le sens d’une danse sensuelle, d’une danse de bal. Le ladja, ici, réunit au moins deux aspects : un côté guerrier et un côté érotique. En discutant avec un autre ancien de Sainte – Marie, dont nous tairons le nom, il nous confira que, dans la connaissance de la force divine, présente partout dans l’univers, la force qui s’exerce dans le danmyé et qui nous permet de nous défendre en allant parfois jusqu’à la mort - bien qu’il ne fasse jamais rechercher ce but - est strictement la même, quand elle s’exerce sur le versant positif, dans des objectifs d’amour.( cela ne veut pas dire qu’on ne puisse faire la guerre pour des causes nobles). A ce moment, elle dégage une énergie plus douce, moins brutale, travaillant pour le bien de la communauté. D’autres anciens (qu’on nous permette également de ne pas les nommer car ils ne le veulent pas) nous diront que si quelque chose existe sur la terre ou dans la nature, c’est parce que la divinité l’a voulue et qu’en fait, elle n’est ni bonne, ni mauvaise, mais utile. Ce qui fait qu’elle deviendra positive, dépendra davantage du cœur de l’homme qui l’utilisera. Certains anciens ont eu à nous dire : « Piè, lè nou ka di zot ki ni dansé, zot konprann sé bagay djendjen, ou selman fè pa. Lè ou ka dansé épi tanbou-a épi ou sa fè’y, ni an moman doné, ou ka janbé la kréyasion86 » L’histoire orale de la Martinique fourmille de personnes appelées par exemple Polin la kalenda ou Polin la kalida, qui étaient des voyantes et aidaient toute personne qui avait besoin d’aide, sans demander un centime. (Propos entendus et recueillis à Rivière Salée et à Sainte – Marie avec interdiction d’enregistrement). Ce processus se retrouve chez certaines personnes du bèlè et dans son côté dit « négatif » (mais pas si négatif car pouvant sauver des gens), chez certains adeptes du danmyé (aux Trois – Ilets par exemple).

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Traduction : Pierre, quand on vous dit qu’il y a une danse, vous comprenez que c’est dérisoire, que c’est seulement esquisser des pas. Quand tu danses avec le tambour et que tu sais le faire, il y a un moment donné où tu peux connaître un « état de conscience modifiée ». (Janbé la kréyasion : la conscience sort hors du corps).

Document diffusé par Manioc.org


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