Le dernier Caraïbe

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Le

DERNIER

CARAÏBE.

miné l'ouvrage journalier, pourvu à la subsistance des hôtes grognards, des cabris de l'ajoupa et préparait déjà un certain calalou, dont l'odeur eût séduit le plus rebelle estomac. — Peut-être, augurait la cabresse , Tonga invitera t-il Jupiter au repas du soir e t , en ce cas , je veux qu'il se régale. Ainsi donc, l'amour de Zami allait se traduire par la succulence du calalou. Quand ce mets classique des colonies fut en bon train, la cabresse vint s'asseoir à l'ombre de la case et en face du mangotier. De cette place, elle contemplait et l'auteur de ses jours et l'auteur de son martyre. La réunion inespérée des deux êtres qu'elle aimait à ces différents litres, lui causait une douce joie. Aussi , la voyons-nous prendre résolument et avec plaisir un ouvrage de couture qui reposait dans un panier caraïbe. — L'aiguille marchait; c'était bon signe. Le mouchoir imité des Indes, qu'elle ourlait ainsi, devait parer sa tête le dimanche suivant ; — un des côtés recevait le dernier point, quand mouchoir, f i l , aiguille, d é , ciseaux roulèrent sur le sol. La cabresse était froide.... de peur. Devant ses yeux, un homme (véritable apparition dans un pareil moment ) avait un doigt sur la bouche , comme pour lui recommander le silence. Zami ne proféra pas un c r i , pas une parole. On l'eût prise pour une pierre.


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