Voix indiennes du grand nord

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L'A.I.M. pour Dennis Je suis fier de dire que je suis membre de l'AIM. Je me sentirai toujours concerné par ses activités, quelle que soit 1'importan~e d'un projet. FM :. Existe-t-il encore un pouvoir central à l'AIM ? Lors des dernières rencontres, les chefs étaient peu nombreux. Que pensez-vous de 1'avenir du mouvement ? DB : Ce que j'en pense, c'est que l'avenir ressemblera au passé. Tant que je serai là, je ne me ferai paS de souci à ce sujet. Quant au "leadership", c'est difficile à préciser. Je suis resté 14 mois en prison, sans rien faire pour diriger qui que ce soit. Je sors, et la fonction est là qui m'attend. FM : Quand l'AIM était plus militant, ses dirigeants semblaient plus unis. Le mouvement peut-il se permettre d'être moins militant tout en restant aussi efficace ? DB : Vous savez, c'est une question-clé. Devonsnous toujours nous investir dans des actions militantes ? Devons-nous nous montrer pour que les gens puissent dire que nous sommes actifs ou que nous ne le sommes pas assez ? Je ne le pense pas. Je travaille ici, à Loneman Industries et chacun de mes actes reflète ce que je crois sur les orientations de l'AIM - le développement économique, la création de programmes de développement ou d'emplois - (... ). Notre peuple s'est mis dans l'idée qu'il fallait prendre les armes pour se faire entendre, être efficaces. Ce n'est pas cela. Pour moi, cela signifie plutôt "Comment donner du travail à tous ces gens ?". Pour moi, le "leadership", c'est essayer de faire venir ici des compagnies comme Honeywell, qu'elles nous procurent du travail.( ... ) Il n'y a rien de militant là-dedans. Apprendre à quelqu'un à carder, à filer cette laine de lama que nous avons, ce n'est pas une action militante (... ). FM : En regardant en arrière, pensez-vous que l'AIM ait accompli les tâches qu'il s'était fixées en 1968 ? Vous devez avoir une idée précise de ce que vous vouliez. DB : Non, pas d'idée du tout. Je sais que nous voulions faire cesser les brutalités policières à Minnéapolis. Nous avons réussi pour un temps, mais ils 'en produit encore à l'heure actuelle. Nous voulions aussi provoquer des changements au BIA dont la politique affecte grandement les ressources de notre peuple. FM : Pensez-vous avoir réussi ? DB : Eh bien, je sais une chose, c'est que la vigilance de l'AIM, Wounded Knee, la façon dont la justice nous traite, ont eu un grand

impact sur le public blanc. Les gens ont écrit au Congrès et au BIA pour que l'on accorde l'autodétermination aux natifs américains. Je ne sais comment mesurer 1'influence de l'AIM, mais je sais qu'il y a eu dans ce pays des changements notables de politique vis à vis de notre peuple. Certains ont été positifs. En 1977, le Congrès a voulu faire passer une législation abrogeant les traités et nous avons organisé une grande marche qui a stoppé ces décrets (... ). La vigilance générale est plus grande aujourd'hui et je pense que c'est une excellente chose.

Changements et projets FM : Quel a été le changement le plus important pour les gens de la réserve ? DB : Je pense que c'est un changement d'attitude vis à vis du nationalisme. Nous avons toujours des "Réserves", mais nous parlons désormais d'auto-gouvernement et de souveraineté avec des idées et des objectifs nationalistes. FM : Pensez-vous que les gens unis qu'il y a 15 a11S ?

d~ici

soient plus

DB : Non, mais je ne pense pas que l'unité soit notre réponse à une foule de chose. Ce mot a été galvaudé, y compris par moi. Je ne l'emploie plus, parce qu'il s'applique à une conjoncture particulière, à un moment déterminé. Un exemple : une maison prend feu. Tous les gens de la communauté vont s'emparer de seaux et lutter contre l'incendie. A ce moment, ils sont unis. Le feu éteint, chacun retourne à ses occupations. Pour moi, rechercher l' "Unité", c'est essayer de nous faire tous penser et agir dans le même sens. C'est irréalisable. Ainsi, les gens qui luttent pour l'unité, qui sont nés avec ce concept, mourront très vieux sans avoir atteint leur but. FM : Qu'est-ce que l'AIM apporte à la nouvelle génération? Que lui enseigne-t-il ? DB : Ce que nous apportons est difficile à mesurer. Mais je sais que nous avons offert aux jeunes de nouveaux livres d'histoire. Ceux qu'ils avaient stétéotypaient les "Indiens". C'était dégradant, déshonorant. Les livres d'aujourd'hui reflètent l'image réelle du natif américain. Dans les écoles, le portrait d'un grand chef remplace désormais celui de George Washington ou d'Abraham Lincoln. 59


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