Femmes indiennes

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C'EST LE BLANC QUI L'EMPORTE ou comment la loi détermine la couleur en Nitassinan Avant de nous quitter, Bernard Cleary, négociateur en chef du peuple attikamekmontagnais, présent durant une semaine avec nous à la FNAC FORUM puis à la Journée Internationale de Solidarité de la mi-octobre, nous a laissé copie du manuscrit de "L'ENFANT DE 7000 ANs" à paraître en 1989 ; c'est un ouvrage primordial pour qui s'intéresse à l'identité, à l'histoire et à l'avenir -donc aux revendications- des Attikamek-Montagnais. Un roman fort plaisant à lire, tout imprégné de poésie et de philosophie, bâti sur des données fondamentales. En voici,en avant-première,un bon extrait:

Autochtones à quai Francine, avec ses trois enfants en bas âges, le benjamin endormi dans les bras, est sur le pont du "Fort-Mingan", le plus illustre des bateaux de passagers et de marchandises connus des gens de la Moyenne et de la Basse-Côte-Nord, et salue joyeusement de sa main libre ses frères et soeurs montagnais qui l'attendent sur le bout du quai bondé d'Autochtones. Il est deux heures du matin. Une très grande partie des Montagnais de la réserve, comme à chaque semaine, même si le navire accoste à une heure tardive, attend ses frères et soeurs qui reviennent de la ville et regarde descendre les quelques étrangers, habituellement des fonctionnaires fédéraux et provinciaux, qui se rendent les visiter par affaires, et quelques touristes égarés. Le "Fort-Mingan" constitue le seul moyen populaire de communication sur la côte du printemps à l'automne. L'autre, l'avion de ligne, utilisé à certains moments, pour les plus pressés -les plus fortunés-, n'est pas à la portée de la bourse des Autochtones qui voyagent isolément ou des autres habitants des villages côtiers de pêcheurs blancs, pas plus riches qu'eux d'ailleurs.

Beaux tous les jours Quelques vièilles grand-mères retirées par timidité dans un coin sombre et vêtues du costume traditionnel des Montagnaises, composé de magnifiques bonnets d'étoffe rouges et noirs, de

longues jupes à carreaux aux teintes écossaises ou irlandaises qui descendent presque à la cheville, recouvertes de grands tabliers blancs immaculés et de châles qui protègent leurs épaules de la fraîcheur de la nuit, attendent pour vendre les fruits de leur travail d'artisanat. Elles trimballent dans leurs mains de magnifiques mocassins, blancs pour les femmes et de couleur naturelle pour les hommes, fabriqués dans des peaux de caribous et décorés d'un motif distinctif de fleurs à trèfles en perles colorées sur le dessus de chaque pied, de longs bas de laine fournie aux tons flamboyants qui montent aux genoux et des pendentifs de perles multicolores de tous modèles. Quelques-unes sont accompagnées de leur mari quia revêtu la veste traditionnelle de toile blanche brodée de riches fils multicolores, rouges, jaunes or et verts. Cet habillement du dimanche a l'allure d'un complet léger. 59


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