Femmes indiennes

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amour, se rendirent là où vivaient les Quistadores. Et l'une après l'autre, elles choisirent chacune une sentinelle, et vinrent à leur rencontre, souriant fort hardiment, amicales et ouvertes." "Il faut se souvenir que nous n'avions ni de putains ni de traînées, et que ces femmes étaient des initiées de la Société des Femmes, des disciples de la Vieille Femme, comme Ki-Ki, fières de leurs corps, sachant qu'elles allaient devenir des mères de clans, et aucune d'entre elles n'avait approché les Espagnols de cette façon-là auparavant. Et normalement, aucune d'entre elles n'irait même jusqu'à approcher un Espagnol." "Les sentinelles se dirent alors que leur dieu ne les avait pas ~ubliés ! Ils n'avaient jamais connu de femmes élevées comme ça,dont on pouvait être fier, dont on pouvait jouir, leurs corps et puis toutes ces bonnes sensations. Pendant deux nuits, ils se battirent pour être de garde, et ceux qui ne montaient pas la garde ricanaient et sentaient la jalousie monter en eux à chaque bruit venant de l'ombre. Le bruissement de l'herbe, des soupirs, des râles et parfois un cri surpris se terminant par le rire de gorge profond d'une femme lascive."

Prêts à mourir ou tuer "Alors, la marée était basse, vraiment basse, et cela voulait dire qu'il n'y avait qu'une issue pour sortir de la baie, parce que l'autre côté était barré par un banc de sable. Tout de suite après le coucher du soleil, le brouillard descendit et ceux qui étaient sur le rivage allumèrent un grand feu pour éloigner les ombres humides et menaçantes." "Les canoës sortirent du brouillard, glissant silencieusement. Les Combattants venaient de Tahsis, de Kuyquot, de Clayoquot, de Hesquiath, Yuquatl et Hecate, des villages qui n'existent même plus, décimés par les épidémies. Et aussi de Ehatisaht, de Kelsemath, d'Opitsaht et de Kallicum."

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Alors elles prirent leurs couteaux "Les rameurs étaient des hommes et des femmes, qui s'étaient purifiés et qui étaient prêts à mourir ou à tuer, des hommes et des femmes qui avaient affronté leurs propres peurs et les avaient surmontées, et qui étaient prêts maintenant, s'il le fallait, à faire face à l'inconnu de l'autre monde." "Et sur le rivage, les soeurs sacrées sortirent du brouillard en souriant, leurs seins nus luisants d'huile claire de phoque, leur peau parfumée de bruyère et de cigüe, leur chevelure enduite du suc des fleurs." "Le brouillard n'est pas compact comme un mur, il se dissipe, et là où il a disparu, la lune brille ; les sentinelles, voyant les soeurs se diriger vers eux, enlevèrent leurs casques de métal, le métal sur leurs poitrines et leurs dos, dénudant leur peau à l'air de la nuit, aux effleurements des soeurs."

"Les canoës dépassèrent la pointe et s'alignèrent dans le banc de brouillard, fermant le passage. Les femmes glissèrent par-dessus bord, le corps enduit de graisse de baleine pour se protéger du froid. Une femme sur quatre tenait un mortier rempli de braises, recouvert d'un panier de cèdre pour dissimuler le feu. Les trois autres avaient des vessies de phoque remplies d'huile de phoque fondue ou de résine de cèdre, et elles nagèrent en silence le long du grand vaisseau de bois qu'elles enduirent tout le long et au-dessus de la ligne de flottaison." "Les soeurs sacrées se, rapprochèrent en souriant des sentinelles et se laissèrent toucher, caresser et allonger sur le sol. Les sentinelles furent vraiment surprises quand les soeurs croisèrent les jambes autour de leur taille, les chevilles sur leur dos, et collèrent étroitement leurs bouches sur les lèvres des hommes pour étouffer tout son. Car alors elles prirent leurs couteaux pour égorger les Espagnols."


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