L'été indien au Canada

Page 4

traités

La réserve yankton rayée de la carte? Quand la "Southern Missouri Waste Management Company" (SMWMC) demanda à l'État du Sud Dakota l'autorisation d'installer une décharge sur la réserve yankton, personne n'imaginait que se trouverait ainsi posée l'importante question de la souveraineté d'une tribu dans les limites de sa réserve.

Pendant le premier mandat de Bill Janklow comme gouverneur de l'État du Sud Dakota, la réserve yankton avait été considérée comme éteinte et même supprimée sur les cartes de l'Etat. Le Sud Dakota ne reconnaissait plus comme "terre indienne" que quelques acres de terre tribales (trust lands) autour de Greenwood et de Lake Andes, faisant échapper à la juridiction tribale les ptopriétés des Blancs installés là. La tribu yankton (Ihanktonwan) -l'une des trois composantes de la Grande Nation Sioux - entendait bien faire respecter sa souveraineté sur toute l'étendue de sa réserve reconnue par le traité de 1858. A la suite de ce traité, signé sous l'irrésistible pression des colons avides de terres agricoles, les Yankton ne possédaient plus que 200 000 hectares sur les 4 millions que représentaient leurs terres traditionnelles.

Une décision favorable à la tribu La tribu yankton tenta de s'opposer à l'initiative de la SMWPC, le site proposé pour la décharge se trouvant à l'intérieur des limites de la réserve, et porta plainte contre la compagnie. L'État du Sud Dakota se joignit au procès, demandant au juge de déclarer une fois pour toutes que la réserve yankton avait été supprimée. Mais les espoirs du Sud Dakota devaient être déçus. Le juge Piersol étudia les textes. Un "accord" de 1892 ouvrait la réserve yankton à la colonisation, en application de la loi Dawes de 1887 sur le lotissement général des terres indiennes. Les terres qui n'avaient pas été distribuées aux Indiens en propriétés privées étaient déclarées "en sur-

2

plus" et vendues à des colons. Un second arrangement, conclu en 1894 et précisant les modalités de l'accord de 1892, stipulait toutefois dans son article XVIII: « Rien dans cet arrangement ne sera interprété pour entraîner l'abrogation du traité signé le 19 avril 1858... et après la signature du présent agrément et sa ratification par le Congrès, toutes les dispositions du traité garderont leur plein effet, comme si le présent arrangement n'était pas intervenu. » Le juge Piersol s'appuya donc sur ce texte favorable au maintien des droits de la tribu pour déclarer dans un arrêt rendu le 14 juin 1995 que les limites fixées en 1858 étaient toujours valables, que la réserve yankton n'était pas éteinte et, par conséquent, que la tribu yankton exerçait toujours sa souveraineté sur l'ensemble de sa réserve. A propos de la décharge en question - objet premier du procès - le juge décidait que les directives fédérales en matière de maintenance des décharges devaient être appliquées, et non celles, beaucoup moins contraignantes, du Sud Dakota, puisque le site où devait être construite la décharge échappait à la juridiction de l'État. Bien qu'elle n'ait pas entraîné d'importants chan-

gements dans la vie quotidienne de la réserve, la décision du juge Piersol éveilla un sentiment de fierté et d'espoir parmi les Yankton et les autres tribus confrontées aux conséquences catastrophiques de la loi Dawes ouvrant les réserves indiennes à la colonisation. Rappelons que, depuis 1975, l'État du Sud Dakota- toujours - considère comme éteinte la réserve Sisseton-Wahpeton et l'Utah déclarait, en 1975, la réserve Ute diminuée des trois quarts. La Cour Suprême a donné raison à l'Utah en 1994

La contre-attaque de Bill Janklow Mais l'État du Sud Dakota dont Bill Janklow, connu pour ses sentiments anti-indiens vient d'être réélu gouverneur, ne se tenait pas pour battu. L'État fit aussitôt appel de la décision du juge PiersoJ. C'est une immense déception pour les Indiens qui espéraient enfin voir leurs droits territoriaux et leur souveraineté reconnus par la justice. La tribu yankton organise sa résistance. Vine Deloria Jr, dont l'arrière grand-père était parmi les signataires du traité de 1858, lance un appel à tous les descendants des chefs signataires du traité pour qu'ils se pré-


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.