L'été indien au Canada

Page 29

M. Chrétien, dans une démarche perçue comme improvisée avant même la remise du rapport du comité des sages invités à lui soumettre leurs propositions, a déposé à la Chambre des Communes d'Ottawa une résolution reconnaissant que le « peuple québécois » formait une « société distincte ». Approuvée par 148 voix contre 91, cette"motion"n'avait certes qu'une valeur symbolique, mais une fois encore, les droits des populations autochtones du Québec avaient été écartés des débats. La véritable bataille aura vraisemblablement lieu à l'occasion des nouvelles discussions sur les changements à prévoir, selon de nombreux analystes politiques, dans la constitution canadienne. Les Autochtones souhaitent que leurs revendications territoriales et identitaires soient présentées comme enjeu déterminant du débat lors de la prochaine consultation intensive sur l'avenir de la Fédération. En effet, toutes les parties (Fédéralistes canadiens, souverainistes québécois et membres des Premières Nations) devront obligatoirement se retrouver avant le 17 février 1997, date limite fixée pour une révision de la Constitution lors du rapatriement de celleci de Londres en 1982. Espérons que tous les habitants d'un grand pays comme le Canada trouveront des mécanismes audacieux leur permettant de vivre ensemble leurs différences dans un respect mutuel et partagé. Mais il faudra impérativement tenir compte, outre la question d'un Québec différencié, des revendications globales des premiers habitants du Canada: les Amérindiens et les Inuit.

Sylvain Duez-Alesandrini Sources: communiqué de l'Assemblée des Premières Nations (AFN), articles de Martine Jacot du journal Le Monde, et plusieurs dépêches d'agences de presse. 1. En 1980, un premier référendum sur la souveraineté du Québec avait vu la victoire des Fédéralistes. 2. L'Assemblée des Premières Nations est une organisation amérindienne regroupant les chefs élus de l'ensemble du Canada.

Troubles à Kahnawake Depuis la crise de 1990, qui avait opposé les communautés mohawk proches de Montréal aux autorités de la province du Québec et à l'armée fédérale, les relations entre les habitants de la réserve de Kahnawake et la police provinciale, la Sûreté du Québec (SQ), se sont très gravement envenimées. Suite à la crise d'Oka-Kanesatake et à l'occupation du pont Mercier, les Mohawk de Kahnawake avaient érigé des postes de contrôle sur les routes conduisant à leur réserve. Leur utilité était principalement de garantir la souveraineté de la communauté en empêchant les forces de police extérieures d'entrer dans Kahnawake. Ce système était encore en vigueur récemment et le maintien de J'ordre sur la réserve était laissé à la juridiaion de la force de police mohowk, les "Peace-Keepers". Mais le 10 septembre 1995, un événement allait provoquer des troubles au sein de la communauté. En effet, Joe Norton, le chef du conseil tribal de Kahnawake signait une entente avec des représentants du Québec et du pouvoir fédéral canadien, autorisant dans certains cas J'intervention des autorités policières de la province du Québec sur le territoire de la réserve. Le chef Norton, en signant cet accord, passait outre plus de 2000 signatures de citoyens de Kahnawake rejetant cette entente. Les signatures avaient été récoltées, en trois jours, par une organisation du nom de Coalition Souveraine Mohawk (Sovereign Mohawk Coalition). Ces pétitions lui ont été officiellement remises une heure avant la signature de l'entente par une délégation comprenant trois mères de dans, un chef traditionnel, un jeune et un adulte mohawk de la communauté. Ceux-ci ont dédoré au chef Norton « qu'il ne pouvait pas signer au nom du peuple et qu'il n'avait plus aucune autorité ». Joe Norton a malgré tout entériné cet accord avec le représentant du pouvoir fédéral canadien, M. Herb Gray et le ministre de la justice du Québec, M. Serge Menard, le 10 septembre lors d'une rencontre qui s'est tenue au siège du conseil tribal. Des centaines de Mohawk, rassemblés autour du bâtiment du conseil aftn de protester contre la signature de cette entente, ont manifesté leur forte réprobation en s'attaquant aux voitures des représentants canadiens et québécois, en malmenant à sa sortie M. Menard et en jetant des pierres contre le bureau du conseil tribal. Sylvain Duez-Alesandrini Source: Canadian Alliance in SoLidarity with Native Peoples (CASNP) Pour en savoir plus sur la communauté Mohawk de Kahnawake, reportez-vous à l'interview de Kanatakta, responsable du centre culturel Kahnienkehaka Raotitiohkwa, publiée dans Nitassinan n° 36 (pages 3 à 5).

27


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.