Cherokee : Ani Yun Wiya

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Cinq années de négociations C'était sans compter avec l'entêtement de ces derniers, qui venaient de survivre à un génocide calculé, et allaient maintenant s'acharner à récupérer leurs wampums. Le Musée refusait de les rendre sous prétexte que s'ils rendaient ces précieuses ceintures, ils pourraient tout aussi bien restituer la totalité des collections et vider le Musée ; de plus, ces antiques ceintures devaient être gardées dans un coffre-fort, dans un environnement permettant leur parfaite conservation, étant donné leur fantastique valeur. En face, les Iroquois rétorquaient que les ceintures avaient été parfaitement conservées pendant des siècles chez eux, que leur valeur monétaire n'avait rien à voir avec leur valeur spirituelle, et qu'ils ne demandaient pas collections du Musée en retour, seulement les ceintures et les objets sacrés. Finalement, à un moment où leur bonne conscience par tarauder un certain nombre de conservateurs de musées aux Etats-Unis, un premier pas en avant fut accompli en 1984, lors de la commémoration Traité de Fort Stanwix de 1784 : l'assistante du Gouverneur de New York déclara qu'elle était prête à rendre les wampums. Mais années furent nécessaires pour mener à bien les négociations, négociations certainement

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encouragées par le fait qu'entretemps, de nombreux musées avaient commencé à restituer des objets sacrés aux Indiens. C'est donc à la Longue Maison à Onondaga, siège du gouvernement iroquois, que la restitution a eu lieu, en présence d'environ deux mille personnes très émues de voir enfin, présentées sur des tables, sous verre, douze wampums revenus dans un lieu qu'ils n'auraient jamais dû quitter. Les discours officiels succédèrent aux prières, et puis, dans la bise d'octobre, sous un ciel lourd, un arbre de la paix fut planté à côté de la Longue Maison. Tout le monde prit part ensuite à une danse «ronde» avant d'aller festoyer pour commémorer l'événement. La restitution des wampums est un signe encourageant. A un moment où les Iroquois traversent une crise difficile en raison de la fragilité de économie et de la mise en route des procès pour leurs revendications territoriales, ce geste de la part des Américains est une reconnaissance l'existence des Iroquois en tant que gouvernement, en tant que peuple souverain. Mais seul l'avenir permettra de dire si leurs actions s'accordent avec leur conscience. Nathalie NOVIK Envoyée Spéciale

llSyracuse Herald American

22 octobre 1989


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