Chasseurs : cri du Lubicon

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Brésil

Naissance et succès de l'organisation makuxi En 1993, la FUNA " administration fédérale chargée des questions indiennes, héritière du Service de Protection des Indiens créé en 1910, a admis la nécessité de "protéger" les Indiens makuxi par la démarcation de leur territoire, selon les termes de statut de /973. Or, actuellement, 42 % des terres reconnues comme indiennes au Brésil par la FUNA' n'ont pas encore été légalisées. Le décret présidentiel du 8 janvier 1996 permet désormaÎs aux États et municipalités concernée de bloquer les projets de démarcation, voire les décrets présidentiels de démarcation dans un délai de 90 jours. Depuis 1987, les Makuxi mènent une lutte opiniâtre pour la démarcation de leur territoire, dont Jacir José De Souza explique ici la genèse et le déroulement, dans un entretien accordé au comité SAlie (1).

SAlIC - Quand et comment as-tu commencé à lutter pour le peuple makuxi ? Jadr José De Souza - Je suis du village de Maturuca, dans l'État de Roraima. Notre terre avait été envahie, mais le chef du village n'avait pas réagi. Le 27 avril 1987, nous avons fait une réunion, et j'ai été désigné pour défendre notre communauté et pour remplacer le chef du village. Notre première action a été d'en finir avec l'acoolisme, que les chercheurs d'or introduisaient dans notre communauté. Puis, nous avons commencé à organiser d'autres communautés et à travailler avec d'autres chefs de village. Cependant, ceux-ci pensaient que je manquais d'expérience. J'ai répondu qu'à l'avenir, nous ne devrions compter que sur nous-mêmes. Le gouvernement n'avait jamais rien fait pour nous. La FUNAI ne nous aiderait pas. Nous avons poursuivi nos efforts: les communautés ont commencé à s'entraider pour le,défrichage et la construction de maisons. J'ai désigné quatre habitants de mon village, et je suis allé à l'assemblée générale des chefs de village annoncer que nous avions constitué un conseil de village. Leur réaction a été assez négative. Ils m'ont dit: « Si tu ne respectes plus les chefs de village, il n'y aura plus d'autorité légitime ». Mais quand ils ont vu les résultats de notre travail, ils ont accepté de s'unir et de travailler ensemble. En 1987, nous avons décidé d'implanter notre organisation dans la ville (NDLR : Boa Vista) pour promouvoir la démarcation de notre territoire. l'ai proposé d'y installer douze personnes issues de toutes les communautés. Nous avons été dans tous les villages, en expliquant ce que nous voulions faire, qu'à Maturuca, nous avions un conseil de village et que c'était pour

l'avenir de nos enfants. les gens ont accepté. Un mois plus tard, nous sommes allés à la ville. Nous n'avions pas de local. La FUNAI ne voulait pas nous aider. Alors, nous avons été voir un évêque, Mgr Aldo Mongiano, et il nous a dit qu'il pourrait nous prêter une maison. Nous nous sommes partagé le travail. Trois personnes sont restées à la ville, les autres sont rentrées dans les villages. Peu après, le processus était cn marche: nous avions créé un endroit où les gens pouvaient trouver de l'aide. Deux ans plus tard, tout le monde était avec nous. ]' étais au centre de toutes les activités. Nous avons acheté une autre maison pour faire un bureau à Boa Vista. Les villageois y apportaient de la nourriture. En 1988, nous sommes allés à une rencontre du Conseil des

re ; certains restent dans leur zone d'origine, d'autres travaillent à la ville. Nous nous rendons même dans d'autres pays.

SAlIC - Quels sont les principaux problèmes rencontrés par les Makuxi ?

J. J.

D. S. Au début de l'année 1995, le gouvernement de l'État de Roraima voulait construire un barrage sur la rivière Cotingo, sur le territoire indien Raposa Serra do Sol. Il a envoyé la police militaire qui a détruit une maison, maltraité le chef de village, expulsé les villageois ct incendié une autre

organisations et des peuples indigènes du Brésil (COIAB), à Manaus. Il y a eu une élection et 6 personnes, dont moi-même, ont été élues. Je leur ai dit que je n'avais pas assez d'expérience et que c'était une trop grande ville. Mais ils m'ont finalement convaInCu. En 1990, il y a eu une épidémie de malaria dans mon village. Ma femme en est morte. Quand je suis retourné à Boa Vista, on m'a demandé de travailler pour le Conseil, mais j'ai répondu que je devais m'occuper de mes enfants. Pourtant quand je suis rentré au village, les gens m'ont dit que je ne devais pas quitter le Conseil, car un chef reste un chef. Quatre mois plus tard, on m'a choisi pour coordonner la région, où 5 000 personnes se répartissent en 48 villages. J'ai accepté de faire ce travail mais en restant chez moi. Notre organisation, le Conseil Indigène de Roraima (CIR), a maintenant un personne! permanent, dont un juriste et un agronome. Nous avons établi 8 zones sur notre territoi-

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