Les Colonies pendant la révolution : la constituante et la réforme coloniale.

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LA

GUERRE

CIVILE

A

SAINT-DOMINGUE

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Ceux-ci, devant le péril commun, oublient l'animosité que leur avaient témoignée, plus que tous, les colons du Cap. Quand les grands-blancs tremblent de perdre un seul homme de leur garde ; quand les petits-blancs refusent de combattre si on ne leur promet, comme butin, les deux tiers des denrées qui seraient trouvées sur les habitations, les mulâtres viennent offrir leurs services sans conditions ; bien plus, ils donnent en otage leurs femmes et leurs enfants, pour prouver leur bonne foi ! Ce sont eux qui forment le gros des forces mobilisées en septembre et victorieuses en octobre. Tant de dévouement força enfin l'aveugle préjugé. L'arrêté du 20 septembre fut aussi un acte de reconnaissance . 1

Le malheur, c'est qu'il venait trop tard. L'égoïsme des colons, vaincu dans le Nord par la peur et la gratitude, porta ailleurs ses fruits. Les mulâtres de l'Ouest et du Sud, laissés, par intention ou maladresse, dans l'ignorance de ce qui se passait dans le Nord, s'armèrent pour réclamer leurs droits et se servirent de ces mêmes esclaves, que leurs frères combattaient. Un considérable attroupement se fit à la Croix des Bouquets, le 31 août, et menaça Port-au-Prince. Saint-Domingue avait donc tout ensemble la guerre servile et la guerre c i v i l e . Celle-ci, d'ailleurs, dura peu, grâce au bon esprit des mulâtres. Vainqueurs des troupes envoyées contre eux, ils entrent dans Port-au-Prince, et,. 1. Cf. l'acte d'accusation contre Blanchelande et le Mémoire justificatif de ce dernier (Arch. nation., D x x v , 46).


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