Les chercheurs de quinquinas : des vallées de Caravaya à l'Amazone

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LES C H E R C H E U R S DE Q U I N Q U I N A S

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coin quelques toisons loqueteuses ; les autres eurent pour logis la moitié de la chambre occupée par le gouverneur et son épouse, mais que partout ailleurs on eut jugée indigne d'abriter le bétail. Les péons et les muletiers furent répartis chez les habitants ce soir-là, en attendant qu'on pût, le lendemain, leur trouver un abri pendant les quelques jours qu'ils avaient à séjourner dans le village. Au point du jour, Duret, qui s'était entretenu avec Joaquin sur le compte du gouverneur, alla trouver ce dernier et lui montra une lettre du préfet de Cuzco, par laquelle il était enjoint aux fonctionnaires de tout ordre de se mettre, eux et leurs administrés, à l'entière disposition des membres de l'expédition que le gouvernement envoyait « pour rétablir les lavaderos et frayer une roule commerciale par la Madre de Dios ». La vue de l'immense cachet qui se trouvait au bas suffit pour mettre au point voulu le brave gouverneur, qui s'en rapporta, et pour cause, à la déclaration de son interlocuteur. Toutefois son étonnement fut extrême lorsque Duret, s'informant de la direction à suivre, lui demanda à combien de journées de mule il se trouvait encore des lavaderos. A son grand déplaisir, le chef de la caravane apprit qu'il n'avait pas à compter se servir de ses bêtes de somme, parce que toute trace de route disparaissait à deux petites lieues de Canamari, et que le seul moyen de franchir les forêts qui s'étendaient au delà serait de se frayer un chemin à travers les halliers. Mais, à défaut de mules, l'expédition pourrait se servir de porteurs; et le brave gouverneur s'offrait, avec un empressement des plus marqués, à en procurer à Duret le nombre nécessaire. Cette communication donnant à réfléchir, il voulut s'éclairer sur ce qu'elle avait d'exact, et il fit part au majordome du padre de son entretien avec le gouverneur. Joaquin confirma pleinement les renseignements donnés et mit encore plus d'empressement que le gouverneur à offrir ses services pour procurer les porteurs indispensables. Il fut donc convenu que l'on congédierait les muletiers et que l'on prendrait des hommes pour le transport des vivres , des outils, des bagages de tout genre et des objets d'échange dont on avait secrètement réuni une pacotille.


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