Le Brésil en 1889. Partie 2

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L ' A R T .

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Dans le r é s u m é que nous avons voulu faire de toutes les m a n i festations artistiques produites au Brésil, nous avons vu que les Brésiliens se sont déjà essayés à tous les arts et qu'aujourd'hui les vocations artistiques vraies ou fausses sont fort communes au Brésil. Le nombre des mauvais artistes y est très g r a n d . Haïssables en elles-mêmes, ces fausses vocations ont une grande valeur parce qu'elles d é m o n t r e n t que la préoccupation artistique devient plus générale. A m e s u r e que la moyenne de la capacité intellectuelle croit, le nombre des talents semble diminuer sur le théâtre social, car ils sont considérés, de moins en moins, comme des exceptions. On les admirait jadis beaucoup au Brésil, où la célébrité était facile. Cette situation semble se maintenir encore pour l'artiste dans un pays, où n'ayant pas de concurrents dans les classes dirigeantes, il est très encouragé. Il n'y a pas de petit journal de province., pas de municipalité qui ne veuille, confiant surtout dans l'inépuisable générosité de l'Empereur, pousser vers Rio-de-Janeiro, ou envoyer en Europe, son peintre, son sculpteur ou son musicien, destiné la p l u p a r t du temps à faire, p e n d a n t la durée de sa carrière, des études moins brillantes que ses promesses. On compterait par centaines le nombre de j e u n e s Brésiliens venus faire des études en Europe aux frais de Dom Pedro II. On est parvenu à créer avec ce système, un mouvement artificiel et stérile, car ce n'est pas en envoyant en Europe des enfants plus ou moins prodiges ou des génies plus ou moins incompris, qu'on arrivera à encourager l'art brésilien. Supposons un instant, qu'un j e u n e peintre, envoyé dans ces conditions, soit un Meissonier ou un Cabanel ; q u ' u n musicien devienne u n Gounod ou un Massenet; l'art brésilien ne sera pas plus avancé pour cela. Il y aura seulement à Paris un grand artiste de p l u s . Ces erreurs datent de loin et elles ont commencé par u n insuccès marqué dont Aug. de Saint-Hilaire nous r e n d compte comme il s u i t : « Louis XIV et le czar Pierre avaient fait venir de l'étranger des savants capables d'éclairer leurs peuples, et l'on sait combien furent h e u r e u x les succès qu'ils obtinrent. Le gouvernement brésilien eut aussi un instant l'idée de m e t t r e à profit les lumières des nations les plus civilisées ; mais, au lieu d'appeler à Rio-de-Janeiro des professeurs instruits, qui, d o n n a n t leurs leçons à de nombreux auditeurs, eussent rendu vulgaires des connaissances utiles, on envoya en France de jeunes Brésiliens:


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