Le Brésil en 1889. Partie 1

Page 216

ESQUISSE

DE

L'HISTOIRE

DU

BRÉSIL.

185

1

de São V i c e n t e . Ce projet, qui répondait entièrement aux vues de l'Empereur, fut étudié par le conseil d'Etat (1867-68), adopté avec quelques modifications, mais ajourné p e n d a n t la durée de la guerre. C'était pour le Brésil une question difficile, car tout le travail agricole était entre les mains des esclaves, qui formaient alors u n cinquième de la population totale de l'Empire. E n 1870, après le rétablissement de la paix, la Chambre nomma, sur la proposition du député Teixeira j u n i o r , aujourd'hui vicomte de Cruzeiro, une commission dont la majorité, composée d'abolitionnistes, rédigea u n projet (15 août) identique au système proposé par le marquis de São Vicente. Des divergences d'opinion entre les ministres a m e n è r e n t alors le cabinet Itaborahy à résigner le pouvoir. São Vicente, qui était aussi un des chefs du p a r t i conservateur, et à qui appartenait l ' h o n n e u r de l'initiative dans cette réforme, fut chargé par l'Empereur d'organiser le nouveau ministère (29 septembre 1870) ; mais bientôt, avant la rentrée des Chambres, ce savant jurisconsulte et h o m m e d'Etat se retira, découragé devant les attaques des journalistes de l'opposition. Le vicomte de Rio-Branco (Silva-Paranhos) forma u n a u t r e cabinet conservateur (7 m a r s 1871), qui, après une lutte parlementaire de cinq mois, réussit, malgré une nombreuse opposition, à faire triompher la première loi d'émancipation graduelle (28 septembre), sanctionnée le même j o u r par la princesse impériale Dona Izabel, qui était la régente de l'Empire p e n d a n t le premier voyage de Dom Pedro II en E u r o p e . Cette loi déclarait désormais libres tous les enfants nés au Brésil, facilitait les manumissions, et créait un fonds spécial destiné à racheter chaque année u n certain n o m b r e d'esclaves . 2

3

1 . Le député Joaquim Nabuco, que M . E. Levasseur, de l'Institut, a s u r n o m m é avec raison le « Buxton brésilien », a écrit les l i g n e s suivantes dans u n livre publié à Londres en 1 8 8 3 : « Il est certain que l'action p e r s o n nelle de l'Empereur s'est exercée, surtout depuis 1 8 4 5 jusqu'en 1 8 5 0 , dans le sens de la suppression de la traite, et, depuis 1 8 6 6 jusqu'en 1 8 7 1 , e n faveur de l'émancipation des enfants nés de mères esclaves. C'est cette influence qui a produit la loi E u s e b i o de Queirós en 1 8 5 1 et la loi Rio-Branco en 1 8 7 1 . Ce fait là, si le souverain voulait écrire s e s mémoires et raconter l'histoire de ses divers ministères, il pourrait le prouver par un très grand n o m b r e de d o c u m e n t s . La part qui revient à l'empereur, dans tout ce qui a été exécuté pour la cause de la libération est très grande, elle est essentielle. » 2 . 6 5 députés se prononcèrent p o u r l'émancipation, 45 contre (7 députés étaient absents et 2 sièges vacants). Au Sénat la majorité fut grande : 3 3 pour la réforme, 7 contre ( 1 6 sénateurs étaient absents et 2 sièges vacants). 3 . Voir sur cette loi MICHAUX-BELLAIRE, Considérations sur l'abolition de l'esclavage au Brésil, Paris, 1 8 7 6 ; et L. COUTY, L'esclavage au Brésil, Paris 1 8 8 1 . — N o u s a v o n s déjà fait m e n t i o n d'un des précurseurs de cette cause de


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.