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LES
AVENTURES
Ses rayons doraient l'espace autour de moi par échappées scintillantes, et la nature m'apparaissait radieuse. Tous les arbres étaient verts, toutes les b r a n ches avaient des fleurs, et des parfums sans n o m b r e e m b a u m a i e n t l'atmosphère. A u - d e s s u s de m a tête, du haut d'un acacia auquel était a m a r r é mon radeau, de belles grappes de fleurs roses pendaient comme des promesses. P a r intervalles, aux caprices d'une brise ou d'un oiseau, des corolles détachées de leurs calices tombaient dans la rivière et jusque sur moi : on eût dit que la nature voulait m'ensevelir sous des fleurs. Des martins-pêcheurs aux ailes bleues volaient d'une rive à l'autre. Deux beaux cottingas se becquetaient sur une basse b r a n c h e , tandis que dans le h a u t une bande de perruches agitait les feuilles comme une brise de printemps. Des colibris passaient dans l'air à chaque seconde, et u n grand papillon plus diaphane qu'une gaze planait autour des herbes de mon lit, m'effleurant de ses ailes, et par intervalles venant se poser jusque sur moi. Cette lumière de soleil couc h a n t , ces parfums, ces bruits d'oiseaux, toute cette senteur e m b a u m é e de nature virginale, baignaient mon être halluciné, comme la suave effluve d'une affection en pleine fleur. Je regardai d'un œil de tristesse ce monde splen-