DE
ROBIN
JOUET.
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content que je sautai au cou du capitaine et l'embrassai sur les deux j o u e s , comme on embrasse un frère retrouvé. Au bout de dix j o u r s , nous entrions à Bordeaux. Je partis pour Paris dès le lendemain, après avoir annoncé mon retour à ma m è r e , afin de ne pas la troubler par trop d'émotions à la fois. Le surlendemain je l'embrassai, ainsi que toute m a famille venue au-devant de moi à la diligence. Vous dire comment on me r e ç u t , vous le savez tous, pour peu que vous ayez quitté la France pendant trois mois seulement. Chacun de ses enfants qui lui revient est pour sa famille et ses amis comme u n enfant prodigue qui rentre au bercail. Je fus d u r a n t un mois le lion de mon petit cercle ; le ministre de la guerre voulut me voir; on me
regardait
partout comme une
curieuse, et peu s'en fallut que je ne me
bête crusse
quelque chose. Mais j'avais trop longtemps mâché les leçons de la solitude, pour me griser désormais à l'inanité des choses humaines. Bien m'en prit, car le lion de la veille est souvent l'âne du lendemain. Les jaloux à divers degrés de m a fraîche gloire firent tant et tant, qu'au bout de quelques semaines je passais pour encore plus bête q u ' e u x , par cela seul que j'avais