Les aventures de Robin Jouet. Guyane française.Partie 2

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DE

ROBIN

JOUET.

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Je rêvais paresse, rien qu'à les voir à la tombée de la n u i t , avec le ciel pour toit, d e m i - n u s dans u n h a m a c en filet q u ' u n de nos chiffonniers n ' a u r a i t pas ramassé; à les voir, d i s - j e , fumer à demi endormis ou caressant leur guitare. Ceux d'entre eux qui étaient trop pauvres pour avoir une g u i t a r e , ou qui avaient cassé la leur, pinçaient d'une fibre de palmier de p i a ç a b a , tendue sur une baguette en forme d'arc courbé. Après chaque coup de doigt, le musicien penchait n o n c h a l a m m e n t son oreille sur la corde, l'écoutait vibrer j u s q u ' a u b o u t , puis recommençait. C'était u n souffle musical plutôt q u ' u n son et j a m a i s harpe éolienne n ' a vibré d'aussi faibles accords ; mais ce souffle était pour lui toute une poésie, et pendant des heures entières suffisait à son indolent bonheur. Pas plus que leur façon de cultiver la m u s i q u e , leur manière de fumer ne ressemblait à la nôtre. Il -y avait sous le carbet deux ou trois carottes de tabac t r è s - b o n quand il provenait du Brésil,

détestable

quand il venait de Cayenne. C h a c u n , au fur et à mesure de ses besoins, coupait à l'une de ces carottes le tabac qu'il lui fallait. P u i s , quand il voulait fumer, sur ce bout comme sur un saucisson, il taillait trois ou quatre rondelles très-fines, les défaisait en tabac


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