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LES
AVENTURES
nots, pagayaient, pêchaient, fabriquaient leurs produits de vente. Chacun travaillait avec une force de n è g r e , des adresses d ' I n d i e n , une intelligence de b l a n c , tout un ensemble de qualités qu'on chercherait vainement réunies chez des hommes d'un autre continent. P u i s , quand la besogne était achevée, tout le monde se reposait; mais alors, grand Dieu! comme on se reposait longuement ! A part ces grandes j o u r n é e s , l'oisiveté était pour tous les h o m m e s , sans exception, l'état n o r m a l et presque p e r m a n e n t . Aucun ne pêchait, et surtout ne travaillait a u t r e m e n t que par accident, comme font des poëtes capricieux, sous l'inspiration fugitive d'une muse de chasse ou de pêche. P o u r q u e l q u e s - u n s , et m ê m e la généralité, ce repos durait parfois pendant des semaines entières, sans qu'aucune velléité de travail se manifestât par aucun signe extérieur. Certes , en tous p a y s , m ê m e chez n o u s , l'homme aime et cultive plus ou moins la paresse; mais nulle p a r t , je crois, l'indolente déesse n ' a plus fervents adorateurs que dans cette partie des Guyanes. Or comme là, ni la loi, ni la faim, ni aucune des mille nécessités de nos pauvres contrées ne forcent l'homme au travail, on peut dire que la vie générale n'y est, à proprement parler, qu'une longue oisiveté.