Les aventures de Robin Jouet. Guyane française. Partie 1

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LES A V E N T U R E S

Quand il y a sur un navire quatre à cinq cents passagers, surtout des passagers soldats, un simple soldat comme j'étais est si peu de chose pour tout le monde, excepté pour lui-même! Comme on peut facilement le présumer, mon atelier était descendu à l'eau avec son point d'appui. Les cordes attachées à la paroi du navire, qui composaient mon balcon et comme le mur extérieur de ma cabine, s'étaient naturellement brisées sous le poids de l'ancre. Toutes fortes que je les avais choisies, afin de me retenir pendant les coups de roulis, elles n'étaient que des fils d'araignée pour une masse de fer de plusieurs milliers de kilogrammes, et subitement détachée de ses écrous, pesant de tout son poids sur ce débile soutien de chanvre. Mon domicile entier était tombé à l'eau, entraîné par son point d'appui, et j'étais tombé avec lui sans m'en douter, sans même m'être réveillé. Puis, toujours couché sur la tige de mon ancre, j'avais été jusqu'au fond de l'eau comme elle. Mais, par une permission de la Providence, qui sans doute guida mes efforts, j'avais, sans m'en rendre compte, dégagé à la fois de cette ancre mortelle, et ma cabine et moi-même en même temps. Nous étions remontés ensemble à la surface de la mer, de par nos essences : comme remonte un


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