Les Antilles Françaises, particulièrement la Guadeloupe. Tome II

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(454) encore. Les jésuites étaient fiers de le posséder et les dominicains leur enviaient cet honneur. Le prince crut devoir dédommager ces derniers en allant loger chez eux, et ils le reçurent encore plus magnifiquement lui et toute sa cour. Jamais Saint-Pierre n'avait offert un pareil spectacle de joie et de désordre; l'action du gouvernement en était suspendue. Le prince courtisait toutes les femmes, mystifiait les hommes , se livrait à tous les excès du vin et de la table, alla même un jour jusqu'à se décorer du cordon bleu ; mais ne démentit jamais son caractère de grandeur et de désintéressement. Depuis long-temps on avait donné avis do cotte apparition au ministère de France; le prince avait écrit lui-môme ostensiblement à sa famille, et au milieu de toutes ces démarches, il conservait une sérénité et une tranquillité extraordinaires. Aucune réponse n'arrivait, l'hivernage approchait et on commençait , après sept mois de profusions, à trouver que son altesse coûtait un peu cher. Enfin le prince s'embarqua pour France, sur le vaisseau marchand le Raphaël, de Bordeaux emmenant toute sa maison, un aumônier, et le médecin du roi Garnier. Il partit salué par le fort et en arborant le pavillon amiral. Quinze jours après son départ arrive Desrivières que la colonie avait envoyé à Paris où l'on s'était beaucoup moqué de lui et de son prince de Modène. Il revenait avec l'ordre d'arrêter son altesse , et de l'envoyer en France, par le premier bâtiment, pour lui faire son procès. Mais on avait été six mois avant de lui donner cet ordre, et les Martiniquais ne manquèrent pas de dire que c'était pour lui donner le temps de s'en aller. D'autant plus que la


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