L'agriculture à la Guadeloupe

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— 231 — coupe lorsqu'elles ont atteint leur maturité. C'est ce qu'on appelle tabac de rejeton ; ces secondes feuilles ne sont ni si grandes, ni si fortes, ni si c h a r nues que les premières ; leur suc et leur substance n'ont-presque aucune vigueur ; ce sont des feuilles, mais ce n'est plus du tabac ; cependant on les mêle avec les premières. 11 y en a même qui emploient les troisièmes feuilles, s'inquiétant peu que leur marchandise soit bonne, pourvu qu'ils en aient en grande quantité. C'est ainsi que les choses se passent, à notre époque, dans tous les pays du monde. Ces mélanges ont discrédité les tabacs des îles, qui avaient toujours marché de pair avec les meilleurs du Brésil, lorsqu'on les faisait avec soin et fidélité. Pour réussir dans la culture du tabac et lui donner la réputation qu'il avait autrefois, il faut le cultiver dans des terrains neufs, défendre absolument le tabac de rejeton, et ordonner que les plantes soient arrachées, au lieu d'être coupées. Pour lors, le tabac des îles marchera de pair avec celui du Brésil ; il surpassera de beaucoup celui de la Virginie et de la Nouvelle-Angleterre. Le commerce du tabac s'arrêta, et on ne cultiva plus cette plante qu'en petite quantité, pour la consommation de la Guadeloupe. Originaire des Antilles, le tabac (nicotiana tabacum latifolia) s'y complaît et croît spontanément dans toutes les localités et dans tous les terrains, m ê m e les plus stériles. Les terres sablonneuses, peu riches en h u m u s , les voisinages des bords de la mer conviennent plus particulièrement à la culture de cette solanée. Partout, à la Guadeloupe proprement dite, le tabac est cultivé par la p o pulation noire et la population blanche peu heureuse. Cette culture m é r i t e rait cependant de fixer l'attention de tous, car douze pieds de tabac bien venus forment une carotte de 5 livres, dont la valeur est au moins de 5 fr. Le tabac fourni par le terrain de l'anse Saint-Sauveur de la Capesterre peut, à juste titre, être comparé à celui du Macouba ; peut-être même lui est-il supérieur en qualité. 11 est certain que les soins donnés à la plante exercent une grande influence sur sa qualité. Voici un autre procédé : lorsque les plants de tabac sont coupés, on les pend à des cordes pour les faire sécher. Lorsque les feuilles sont fanées entièrement et tout à fait sèches, on attend, pour les mettre en carottes, que le temps soit décidément à l'humidité, brumeux ou pluvieux, afin que Ces feuilles s'imprègnent d'une certaine humidité qui doit remplacer la limonade, c'est-à-dire la solution de mélasse et d'eau dont, très-mal à propos, les nègres et les blancs ne manquent jamais d'arroser les feuilles de tabac, avant de former les carottes. On détache les feuilles des tiges ; on les dépouille de leurs côtes moyennes, et les deux côtés de la feuille, ainsi d é coupés, sont placés à côté les uns des autres dans une pièce de toile jusqu'à formation d'un rouleau de 5 livres au moins. Le reste de l'opération se p r a -


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