L'agriculture à la Guadeloupe

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— 225 — l'ombre, sous des arbres ; un arrosement se faisait tous les j o u r s . Le germe paraissait au bout de sept à huit j o u r s . Lorsque les tiges avaient une h a u teur de sept à huit pouces, on transplantait par un temps pluvieux dans une terre bien préparée. A quinze ou dix-huit mois, le tronc avait un diamètre de plus de deux pouces, et la tige une hauteur de huit pieds; il n'y avait plus qu'à labourer ou bêcher la terre une ou deux fois par an. A cet âge, l'arbre commençait à donner des fruits que l'on faisait tomber, afin de le laisser se fortifier. Après avoir cueilli les fruits, dits cerises, on les mettait en tas, et on les couvrait d'une natte sur laquelle on plaçait des planches, avec des pierres dessus, afin de leur faire perdre lentement une partie de leur huile qui est âcre, avec une désagréable odeur de vert, quand il y en a trop. Sept à huit jours après, ces cerises étaient exposées à l'air, puis dépouillées de la m a tière pulpeuse ; enfin on opérait un vannage. Les arbres se fortifient en vieillissant et portent de plus beaux fruits. Les fèves sont mieux nourries et plus remplies de cette huile, de ce baume qui en fait toute la bonté ; on le voit, d'ailleurs, nager sur les tasses, ce qu'on ne remarque point dans le café de Moka apporté en Europe, parce qu'il est trop vieux et qu'il s'est desséché. Cet inconvénient n'existe pas dans le café de la Martinique. On peut l'avoir tout frais plusieurs fois l'année, et on en fait deux récoltes. Dès que la bonté consiste dans l'huile, plus cette huile sera abondante, meilleur sera le café ; sans aucun doute, il y a plus d'huile dans un café nouveau que dans celui qui est vieux et s e c ; donc le café de la Martinique est le meilleur, puisqu'on peut l'avoir deux à trois mois après la récolte. 11 est plus a m e r , à la vérité ; c'est une preuve que ses principes sont moins altérés ; cette amertume est d'ailleurs facile à corriger : il suffit de le faire cuire un peu plus ou d'y ajouter plus de sucre. Le café Moka n'est pas si amer que celui de la Martinique, car il a toujours au moins deux ans quand il arrive dans les ports de France. Souvent il en a trois et davantage quand on l'achète; ses principes sont alors desséchés, perdus, évaporés. Il ne reste qu'une matière sèche et aride que le feu achève de mettre en charbon, qui n'a plus d'amertume et qui demande moins de sucre. Les Turcs, très-connaisseurs en cafés, quoique accoutumés au Moka qui leur vient par l'Egypte, et ensuite par mer, jusqu'à Constantinople, donnent la préférence à celui de la Martinique. Voilà, sans contredit, la preuve i n contestable de la bonté de ce café dont la qualité est très-supérieure au Moka. Le cafier réussit très-bien aux Antilles ; on y trouve des arbres étêtés qui, à l'âge de cinq ans, ont dix-huit pieds de hauteur ; en devenant plus vieux, leur tige grandit encore de deux pieds. Ces arbres donnent jusqu'à sept livres de fruit par récolte ; mais, pour ne pas épuiser l'arbre, on fait tomber une 15


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