L'agriculture à la Guadeloupe

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— 194 — Des prohibitions excessives mettaient des barrières, parfois infranchissables, dans les relations industrielles ou commerciales des peuples entre eux ou des provinces entre elles. Ces entraves étaient si gênantes et si intolérables, que le tiers-Etat, ou Etats-généraux de 1614, avait réclamé l'abolition des douanes intérieures, la suppression de tous les monopoles industriels et commerciaux. La fondation des colonies fut un dérivatif. Les métropoles versèrent le trop plein de leur production et trouvèrent dans les denrées de ces contrées lointaines des produits qui ne faisaient concurrence ni à leur agriculture, ni à leur industrie ; d'autre part, lorsque les produits des colonies ne pouvaient être consommés par la métropole, cette dernière se servait de l'excédant comme moyen d'échange avec des États privés de colonies et qui, pour obtenir ces produits, abaissèrent des barrières qui défendaient leur commerce particulier ou leur industrie locale. Les métropoles trouvèrent encore dans les colonies le moyen d'assurer la prospérité de leur commerce maritime, en imposant aux étrangers l'obligation de recevoir les denrées exotiques par leurs seuls navires. En assurant ainsi leur prospérité maritime, elles encouragèrent les progrès de leur agriculture et de leur industrie, qui trouvaient, peu à peu, des débouchés dans les contrées où leurs navires transportaient ces denrées, et monopolisaient ainsi un fret très-encombrant dont le prix laissait d'énormes bénéfices. Le pacte intervenu entre la France et les colonies semblait avoir établi des obligations réciproques, puisque les colonies recevaient les produits nationaux ou étrangers francisés par leur passage dans la métropole, et que cette dernière s'engageait à consommer l'intégralité des produits des colonies, se chargeant de vendre l'excédant à l'étranger. Au fond, le pacte n'enchaînait réellement que les colonies et devait, avant de s'adoucir, leur causer des maux effrayants. Ces obligations, pour être vraiment réciproques, auraient dû forcer la métropole à fournir constamment aux colonies les objets de première nécessité qu'elle ne produisait pas. Elle manquait à ce devoir, tout en ne voulant pas permettre aux colonies d'aller les chercher sur les lieux de provenance ou de les recevoir de l'étranger. La France ne pouvait fournir ni du bois, ni des bestiaux, ni du lard ou du bœuf salé. Les colons, forcés par la nécessité, se jouèrent des entraves qui nuisaient à leur subsistance ou empêchaient la régulière exploitation de leurs habitations. Ils appelèrent les étrangers à leur aide, surtout en temps de guerre, où la métropole ne pouvait rien leur expédier. Le roi fit tous ses efforts pour arrêter ce commerce interlope, qui était cependant fort juste, et assurer aux nationaux le commerce exclusif des colonies. La lutte entre l'intérêt métropolitain et l'intérêt colonial a été vive avant d'arriver à une transaction indispensable, et de nombreux réglements ont été faits à ce sujet, sans que l'on ait nullement atteint le but. Il y avait lutte


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