L'agriculture à la Guadeloupe

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— 136 — qu'un dérisoire dédommagement de 126 millions, mangé, en grande partie, par un agiotage scandaleux et par le paiement de la dette. Les habitants de la Guadeloupe étaient ruinés ; mais ils sortirent encore énergiques et debout des décombres du vieux monde colonial écroulé sur eux. Ils recommencèrent à établir une nouvelle colonisation. Les affranchis, qui avaient en réserve les épargnes destinées à leur rachat, les mirent à acquérir des terres, que la misère des colons les avait forcés de vendre. Beaucoup d'entre eux affluèrent dans les villes, où ils se placaient comme domestiques ou journaliers ; d'autres, restés à la campagne, obtenaient des propriétaires la jouissance de la case et du jardin, contre deux ou trois journées de travail par semaine. Le petit nombre se livra à la culture d'une manière plus suivie, quoique ne donnant qu'un travail encore souvent interrompu. L'état des exportations fournissait la preuve de la situation déplorable dans laquelle se trouvaient les colonies. Les colons ne virent plus de salut que dans l'immigration des travailleurs étrangers de toute provenance, car il n'était plus possible de compter sur les affranchis. Le gouvernement voulut venir en aide aux colons en essayant le travail libre, et une loi du 19 juillet 1845 affecta une somme de 120,000 fr. à l'introduction dans les colonies d'ouvriers et cultivateurs européens. Quelquesuns arrivèrent à la Guadeloupe en 1847 et 1 8 4 9 . Les dépenses faites s'élevaient à 6,000 fr. environ. Cette immigration n'eut aucune influence sur l'agriculture coloniale et ne réussit pas. Les colons durent donc se pourvoir ailleurs. L'ordre rétabli en France en 1851 fut aussitôt rétabli aux colonies. Une lueur d'espérance ranima les colons lors de la promulgation du décret sur les immigrations, sur les engagements et la police du travail. La main ferme qui avait pris le pouvoir voulut encourager l'immigration dans les colonies, en établir les conditions et les garanties, régler, dans un intérêt mutuel, les rapports des propriétaires avec les travailleurs, détermin e r d'une manière plus efficace et plus précise leurs rapports réciproques, et prendre, pour la répression du vagabondage, dans l'intérêt de l'ordre et du travail, des mesures conciliables avec la liberté. Les mesures déjà prises avaient été reconnues insuffisantes et n'avaient d'ailleurs pu être appliquées. Les colons avaient, avec raison, tourné leurs vues vers les ressources que leur donnerait l'appel à des travailleurs du dehors, dont l'introduction faite avec mesure et discernement pourrait, sans nuire aux intérêts des cultivateurs émancipés, devenir un stimulant pour eux, établir une certaine concurrence dans la main-d'œuvre agricole et. contribuer à la réhabilitation, aux yeux des populations affranchies, du travail de la terre, resté si longtemps le partage exclusif de la servitude. L'immigration était régie, à la Guadeloupe, par des décrets, arrêtés et


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