The Red Bulletin CF 06/23

Page 1

SUISSE, 3,80 CHF 06/2023 ABONNEZ-VOUS DÈS MAINTENANT getredbulletin.ch

HORS DU COMMUN

A Y I PR U RAG

r fai re a p é c ’elle. om men Elle a c n attendait d ce qu’o e se libérer d Avant la musique. à grâc e


New Škoda Enyaq RS

100% électrique. 100% de plaisir au volant. Peu importe où vous mènent vos aventures, le nouveau Škoda Enyaq RS vous enthousiasme à chaque trajet. Laissez-vous électriser par une sportivité puissante et une expérience de conduite riche en émotions et faites l’expérience d’un confort maximal, d’un espace généreux et de technologies les plus modernes lors d’un essai routier dès maintenant. Bien entendu, au rapport qualité-prix Škoda attrayant habituel. Škoda. Made for Switzerland.

A B C D E F G

A

Enyaq RS, 250 kW, 16.7 kWh/100 km, 0 g CO2/km, cat.: A


É D ITO R I A L

Contributions

ELLIOTT WILCOX Le photographe primé souhaite toujours faire preuve d’énergie et d’authenticité dans son ­travail. Après avoir rencontré l’artiste Priya Ragu dans le nord de Londres pour notre ­couverture, il a déclaré : « Nous avons profité de l’attitude ­positive de Priya pour créer de magnifiques images pleines de joie de vivre. » Page 36

PATRICIA OUDIT

ELLIOTT WILCOX (COUVERTURE), STUDIO GENEIVE

est journaliste indépendante, entre autres pour Geo et Le Monde, pour lesquels elle écrit principalement des articles sur les sports de plein air, la n ­ ature et l’environnement. Elle a rencontré le skieur JL Ratchel, qui l’a emmené sur LE spot de freeski en halfpipe, à La Clusaz. Page 52

ET LA LUMIÈRE FUT C’est l’hiver, il fait nuit tôt, le temps est maussade. Et pourtant, cette saison à la luminosité particulière invite Patrick von Känel à flirter avec le sublime « lac Bleu » (page 6) et la photographe Leslie ­Hittmeier à sonder la poudreuse dans les meilleures ­conditions (page 22). De son côté, le freeskieur JL Ratchel nous emmène à Balme, à La Clusaz, avec l’équipe Swiss-Ski du half­pipe (page 52). Question lumière, c’est Priya Ragu que l’on retrouve dans son halo depuis qu’elle a décidé de changer de carrière pour se lancer à fond dans la musique (page 36). Et enfin, le snowboardeur freestyle Eero Ettala nous explique comment survivre en hiver en Laponie, avec la promesse de surprendre une aurore boréale (page 81)… Fini la routine, par ici l’aventure !

DEMARCO WILLIAMS Le journaliste américain est un collaborateur régulier de SLAM, fameux mag de basket US, et de Forbes, ainsi que critique gastronomique à plein temps pour The Infatuation. Il ne pense pas que ballon, à l’instar de ­Pascal Siakam, des Raptors. « Pour ­parler famille, voyages ou photo, Pascal s’enflamme, et c’est très cool. » Page 72

THE RED BULLETIN

La star de notre sujet de couverture, Priya Ragu, pose pour le photographe Elliott Wilcox sur une toile de fond aussi éclatante qu’elle. Page 36

3


CONTENUS

62 G A L E R I E 6 L’ A D D I T I O N S V P ! 12 O B J E T T R O U V É 14 HÉROS & HÉROÏNES

16

Alpiniste, mannequin et infirmière. Comment créer le bon état d’esprit pour repousser ses limites ?

MICK JAGGER

18

À 80 ans, il déploie la même énergie qu’à 30 : le rockeur des pierres qui roulent n’a pas amassé mousse…

LILLY PALMER

R A L LY E D A K A R

20

22

72

D’UN MONDE À L’AUTRE

52

C ’ E S T PA R TI ! V O Y A G E R 81 É C O U T E R 84 O P T I M I S E R 86 A C Q U É R I R 88 S O R T I R 94

62

MENTIONS LÉGALES

LILOU RUEL

P R I YA R A G U

4

SANS RELÂCHE Venu du Cameroun pour s’imposer en NBA, Pascal Siakam, des ­Raptors, veut inspirer la jeunesse africaine.

Il a troqué les vagues des Caraïbes pour les montagnes enneigées. ­Jusqu’à devenir entraîneur SwissSki de freeski halfpipe.

Entre poudreuse fraîche et bonheur des sommets : la photographe outdoor Leslie Hittmeier immortalise l’émotion d’une saison.

R&B dans la voix, pop dans le son, rock dans l’âme : elle ne veut pas juste se libérer des attentes familiales, mais aussi conquérir le monde.

44

J L R AT C H E L

PORTFOLIO

LIBÉRÉE, DÉLIVRÉE

PASCA L SIA K A M

LA RELÈVE Le désert tremble, et les pilotes stars sont de plus en plus âgés. Quels sont les visages de la nouvelle génération ?

La célèbre DJ techno allemande crée des ponts entre son public et la galaxie…

HIVER ENCHANTÉ

52

36

LES GRANDS SAUTS Elle s’entraîne dans son jardin, et ­décroche des médailles sur la scène internationale… Et elle a même réussi à dompter le Manpower.

96

L E T R A I T D E L A F I N 98

THE RED BULLETIN

LITTLE SHAO, DOM DAHER

SANDRA CHRISTEN


New Kia EV9 4×4. 7 places. 800 volts.

En savoir plus.


6

THE RED BULLETIN

SIDARIO BALZARINI

ANNA MAYUMI KERBER


Kandergrund, Suisse

DU BOUT DES AILES

Patrick von Känel effleure avec son ­parapente les eaux cristallines du Blausee, situé dans l’Oberland bernois. Ce petit lac privé aux incroyables eaux turquoise est connu comme un hautlieu touristique. Mais ce jour-là, il ­appartient entièrement au champion de parapente : « C’était impressionnant de voir Patrick recommencer la même ­figure huit fois de suite ! », se souvient le photographe Sidario Balzarini. Instagram : @patrick_vonkaenel


Riga, Lettonie

GHOST RIDER La sculpture « The Ghost » de l’artiste Leva Rubeze, au cœur de la capitale lettone, aurait pu servir d’inspiration à ce cliché, sélectionné pour les demi-finales du Red Bull Illume, catégorie Energy : ­Volodya Voronin y surprend son compatriote Arturs Bogdanovics en plein vol, émergeant des vapeurs de l’ombre tel un fantôme. L’éclairage intense de la photo aurait pu aveugler le skateur une seconde, mais « Arturs maîtrise si bien ce trick qu’il peut le faire les yeux fermés. » actiongrapher.com ; redbullillume.com


DAVYDD CHONG VOLODYA VORONIN/RED BULL ILLUME, DANIEL GAJDA/RED BULL ILLUME

Salt Lake City, Utah, USA

GLOW UP

« Ross allait démarrer sa deuxième ­ascension lorsque le soleil a percé les nuages : la forêt aux couleurs de l’automne s’est alors retrouvée baignée dans une lumière splendide », raconte Daniel Gajda, lauréat d’une place en demi-finale du Red Bull Illume (catégorie Emerging with Canon) grâce à ce cliché. Mère N ­ ature a sorti ses plus beaux pinceaux, et Daniel a su immortaliser son œuvre : « J’avais l’impression de vivre l’instant parfait ! » gajdaphotography.com ; redbullillume.com

THE RED BULLETIN

9


Barcelone, Espagne

DANS LE VENT Les 69F ont pu montrer de quoi leurs foils étaient capables lors des qualifications finales en octobre dernier dans les eaux de la cité catalane : vingt voileuses et voileux se sont affrontés dans l’espoir d’intégrer les équipes ­Jeunesse et Femmes d’Alinghi Red Bull Racing, et de représenter la Suisse lors des courses Youth et Puig Women de l­’America’s Cup. Au final, douze ­athlètes ont été retenu·e·s ! Instagram: @alinghiredbullracing

10

THE RED BULLETIN


MIHAI STETCU/ALINGHI RED BULL RACING

ANNA MAYUMI KERBER


L’A D D I T I O N S ’ I L VO U S PL A Î T !

À EN PERDRE LA BOULE !

Conjuguant d’impressionnants records de technologie (et de coûts), The Sphere, à Las Vegas, est la salle de spectacle la plus époustouflante au monde.

57,6

La technologie 4D est ­utilisée sur les sièges pour ­générer des courants d’air et des odeurs.

4

18

à 6 stars sont invitées à se produire dans The Sphere en 2024, dont Harry Styles, ex-chanteur des ­ One Direction.

2,3

milliards de dollars : The Sphere est aussi le ­bâtiment le plus cher de Las Vegas, alors que le budget initial était d’1,2 milliard.

sièges sur les 17 385 de la salle sont équipés de la technologie haptique, qui les fait vibrer selon ­l’expérience souhaitée.

167 000

120

haut-parleurs dont une partie équipée d’un système audio spatial (pour une pureté de son inégalée) et une partie située sous le plancher – pour une expérience auditive totale.

THE RED BULLETIN

CLAUDIA MEITERT

mois ont été nécessaires au groupe U2 pour préparer une ­série de concerts proprement hallucinants, pour le plus grand ­plaisir de leurs fans.

10 000

12

réplique de The Sphere doit être construite dans l’East End londonien, mais les habitant·e·s du quartier de Stratford s’y opposent.

4

millions de LED enluminent les 54 000 mètres carrés de l’exosphère – ce qui en fait le plus grand écran LED au monde !

semi-remorques ont été utilisés pour acheminer une grue (la quatrième plus grande au monde, avec ses 180 mètres) à Las Vegas.

1

HANNES KROPIK

shows du groupe U2 ont déjà eu lieu depuis l’inauguration. Il en reste 11.

157

mètres de large pour 112 mètres de haut : ­située non loin du célèbre Strip de Las ­Vegas, The Sphere est le plus grand bâtiment ­sphérique construit sur Terre.

GETTY IMAGES

25



H Y PE C H EC K

SHOPPING À L’AVEUGLE

Sur TikTok, un engouement chasse l’autre. Kirafin examine une tendance devenue virale : des skateboards dans des blind bags.

L’OBJET

« On achète le deck du skate dans un blind bag, exactement comme les cartes à collectionner. Dans ce style, le label Santa Cruz a lancé des decks avec quinze designs de Pokémon à 110 $ chacun. Très convoités : les cinq decks en or. »

LE HYPE

« D’innombrables vidéos TikTok montrent des acheteur·euse·s déballant leurs planches. La plus populaire (plus de 20 millions de vues) est celle de larrycostigan. Bien entendu, les decks épuisés depuis longtemps valent au moins 500 $ à la revente. »

L’ANAYLSE

Kirafin, 29 ans, s’appelle Jonas Willbold. Il divertit ses followers TikTok avec des formats humoristiques. En parallèle, il voue une fascination pour la tech, les produits et tendances.

« Les Pokémon et le skate forment un combo parfait : les deux ont suscité l’engouement autour du millénaire et nourrissent aujourd’hui la nostalgie. Dommage que la plupart des decks soient plus collectionnés que roulés. Il n’en reste pas moins que c’est une cool collab qui a tapé dans le mille. »

14

THE RED BULLETIN


10 ANS DE GARANTIE ET D’ASSISTANCE

NOUVEAU LEXUS RZ Ne donne pas des ailes. Mais électrise ta mobilité.

RZ 450e Excellence, traction intégrale Direct4, 313 ch (230 kW), Ø consommation 18,3 kWh / 100 km (équivalent essence 2,01 l / 100 km), 0g de CO 2/km, émissions de CO 2 liées à la fourniture du carburant et/ou de l’électricité: 17g / km, eff. énerg. A. Garantie et assistance pendant 10 ans ou 185 000 km (selon première éventualité) à compter de la 1 re immatriculation, activée lors du service et valable sur tous les véhicules Lexus. Vous trouverez des informations détaillées dans les dispositions applicables en matière de garantie sur lexus.ch.

A B C D E F G

A


H É RO S & H É RO Ï N ES

SANDRA CHRISTEN

est infirmière, mannequin et alpiniste. En montagne, elle a appris jusqu’où son corps peut la porter quand la volonté ne suffit plus. Elle veut encourager d’autres femmes à repousser leurs limites. TEXTE SAMUEL WALDIS

Les deux hommes donnent une image qui ferait bonne figure dans n’importe quel magazine de tourisme. Leurs barbes grises cachent des lèvres qu’ils pressent contre l’embouchure de leurs cors des Alpes. Devant l’hôpital cantonal d’Obwald à Sarnen, ils soufflent un air traditionnel du pays devant les fenêtres des patient·e·s. Autour d’eux, il y a des voitures qui, pour la plupart, arborent des plaques d’immatriculation étrangères. Ici, le monde semble encore petit. C’est de ce monde que vient Sandra Christen. Cette jeune femme de 33 ans travaille comme infirmière. Elle est également mannequin et alpiniste. À propos des trois piliers sur lesquels elle bâtit sa vie, elle dit : « C’est la combinaison des trois professions qui m’épanouit. » Sandra a quitté depuis longtemps son petit coin de Suisse centrale. Elle a fait des séjours de plusieurs mois en Afrique du Sud qui est devenue sa deuxième patrie, et elle a suivi une formation de professeur de yoga au Costa Rica. Un an jour pour jour avant notre rencontre à l’hôpital de Sarnen, Sandra se préparait au camp de base pour gravir les 6 814 mètres de l’Ama Dablam au Népal. Pour cela, elle s’est associée au guide de montagne népalais Nirmal Purja, l’homme qui, dans le documentaire Netflix 14 Peaks, tente d’escalader 14 sommets de plus de 8 000 mètres en moins de sept mois. Sandra ne s’intéresse pas aux records. Elle dit plutôt : « Je veux motiver d’autres femmes. Pour qu’elles réalisent leurs rêves. Pour qu’elles repoussent leurs limites ». Pour les 400 derniers mètres de dénivelé de l’Ama Dablam, Sandra a mis six heures. Mettre un pied devant l’autre, respirer plusieurs fois, puis faire le pas

16

PHOTO KAI GROSSMANN

suivant. C’est ainsi qu’elle a lutté pour grimper. Jamais elle n’avait atteint ses limites de cette manière. « Au Népal, il y a eu plusieurs moments où j’ai voulu arrêter l’ascension. Mais le corps trouve l’énergie, même quand la tête a abandonné depuis longtemps. » De la discipline naît la passion Sandra a grandi avec ses parents et ses trois frères cadets à Ennetmoos, dans le canton de Nidwald. « À la campagne, au milieu de la nature, une belle enfance », c’est ainsi qu’elle décrit cette époque. Très tôt, ses parents l’emmènent faire des randonnées, ce qui était plus une obligation qu’un plaisir. Ce n’est que plus tard qu’elle découvre la montagne pour elle-même – pour de bon, lorsqu’un ami alpiniste l’emmène en 2018 au Breithorn. « Il m’a montré les montagnes dans toute leur splendeur. Je suis rentrée chez moi totalement éblouie après cette journée. » Le piolet et la corde de 30 mètres qu’il lui a offerts accompagnent encore Sandra. Après avoir escaladé le Cervin, elle a gravi onze sommets de plus de 4 000 mètres en cinq jours durant l’été 2023. Cette ascension dans le massif du Mont Rose, à la frontière entre la Suisse et l’Italie, s’appelle le Spaghetti-Tour, une nuit dans le plus haut refuge d’Europe comprise. Sandra a prévu d’autres excursions en montagne. Elle ne veut pas en dire plus. Comment le pourrait-elle, puisque l’hôpital se prépare à des mois difficiles, l’hiver étant très chargé avec les accidents de ski notamment. C’est pourquoi ses activités dans le monde du mannequinat sont en pause pour le moment. Cette porte s’est ouverte en 2012 et depuis, elle a été sollicitée par des marques de vêtements, des banques, des constructeurs automobiles ou des fabricants d’équipements de plein air.

« Le mannequinat m’absorbe parfois, dit Sandra. Les nombreux événements où j’entretiens mon réseau, toutes les petites conversations, tout cela me pompe de l’énergie. Mais plus je vieillis, plus j’ai le droit de réaliser des campagnes de qualité et passionnantes. Je pense que c’est lié au fait que je suis plus authentique qu’il y a dix ans. » En 2023, elle est devenue le visage de #iisiBahnverbindet, une campagne pour les transports publics dans son canton d’origine, avec lequel elle se sent toujours profondément liée. Des activités pleines de sens Même si elle vit dans le canton de Zurich, elle a toujours un pied-à-terre à Nidwald. C’est de là qu’elle part pour ses courses d’entraînement sur le Pilate, le « Huisbärg », comme elle l’appelle dans son dialecte, ou qu’elle se rend à la via ferrata Fürenwand, à Engelberg. « Il m’arrive de la faire à toute vitesse après le travail », dit-elle. Après deux heures de conversation, Sandra prend congé. Un service de nuit l’attend dans le service de chirurgie. Que lui réservera-t-il ? Avant de partir, elle ajoute : « Cette activité à l’hôpital me donne beaucoup en retour. Je suis très reconnaissante de pouvoir exercer ce métier et j’aime me rendre à l’hôpital tous les jours. Car en travaillant avec des gens, tout prend un sens. » C’est ainsi que résonne l’attachement au sol que Sandra a conservé. Même si elle a quitté depuis longtemps son petit coin de Suisse centrale. Instagram : @christensandra

THE RED BULLETIN


« Réaliser ses rêves est plus beau que de battre des records. » Sandra Christen sur les valeurs intrinsèques du dépassement de soi.

THE RED BULLETIN

17


H É RO S & H É RO Ï N ES

MICK JAGGER

se fait appeler « Sir » lorsqu’il est invité à dîner par la famille royale. Sur scène, l’octogénaire le plus swag du monde musical continue de ravir son public avec la même fougue qu’il y a soixante ans. Quel est le secret de son énergie ? TEXTE MARCEL ANDERS

Pour faire du bon rock, il faut de la concentration et de l’énergie, c’est ce qu’explique le chanteur des Rolling Stones – le groupe de rock qui aura connu la plus longue carrière de l’histoire. Deux ressources qui semblent, chez lui, inépuisables : à l’âge canonique de 80 printemps, Sir Michael Philipp « Mick » Jagger ne semble pas près de raccrocher : Hackey Diamonds, dernier album du groupe en date, surprend par ses textes incisifs et sa verve juvénile. C’est un secret de Polichinelle : la naissance de ce 24e opus du groupe britannique fut particulièrement longue et difficile, quand bien même son enregistrement proprement dit a été relativement court. Il faut dire que Mick Jagger reste toujours aussi insaisissable : obtenir une interview avec cet homme – régulièrement invité à la télévision et aux dîners mondains, à Versailles comme à Buckingham – relève du parcours du combattant. the red bulletin : Vous avez gardé, au fil des décennies, la même énergie qu’à vos débuts : quel est votre secret ? mick jagger : Disons que je me fixe comme unique objectif de faire du bon boulot – c’est tout ce qui m’intéresse. Et pour faire du bon rock, on a besoin d’énergie, c’est certain, sinon, ça ne fonctionne pas. On aurait pu faire un album plus calme, plus serein, voire carrément nostalgique, doux, tout en retenue. Mais moi, ce qui me plaît, c’est d’écrire des morceaux qui donnent la pêche, avec un minimum de 150 beats par minute. C’est ça mon truc. On dirait que vous êtes en train de vivre une phase particulièrement créative – à moins que ce ne soit l’énergie de la dernière chance ?

18

PHOTO MARK SELIGER

Non, c’est effectivement une phase de création très intense pour nous. Il faut dire que la plupart des morceaux ont été créés assez récemment et que l’enregistrement de l’album s’est fait en un temps record. Bref, l’humeur du groupe est au beau fixe, et ça fait du bien. Dix-huit années sont passées depuis votre précédent album, A Bigger Bang. Avez-vous fait exprès d’attendre assez longtemps pour qu’il n’y ait plus aucune pression, que plus personne n’espère la sortie d’un nouvel album des Stones ? Je suppose qu’on nous avait oubliés, même si nous avions produit un album de blues et que nous n’avions jamais cessé d’enregistrer en studio… Mais le résultat n’était pas à la hauteur de nos attentes. En 2022, nous avons donc décidé de nous donner une dernière chance, mais en étant plus concentrés et plus exigeants qu’auparavant. C’est pour ça que nous nous sommes cette fois-ci consacrés pleinement à ce projet, en se fixant un délai – et en observant ce que ça pouvait donner. Paul McCartney, Bill Wyman, Stevie Wonder, Elton John et Lady Gaga sont sur la guest list de l’album : est-ce une opération marketing ou un pur hasard ? Nous avons enregistré notre album à Los Angeles dans les studios Henson, qui sont composés de quatre unités distinctes. Alors forcément, il y avait toujours quelqu’un que nous connaissions dans les parages ! Lady Gaga par exemple ! Un heureux hasard, rien de plus. Elle est entrée dans le studio, a écouté ce que nous faisions et s’est mise à chanter. C’était incroyable. Pour ce qui est de Paul : il est passé aux studios pour y travailler avec Andrew Watt pendant une semaine, et nous l’avons « emprunté » pendant une p ­ etite journée.

Concernant Bill, on avait déjà ces deux morceaux que nous aimions particulièrement et sur lesquels Charlie Watts est à la batterie. Nous pensions que ce serait une bonne idée de faire jouer Bill et Charlie ­ensemble afin de recréer, le temps d’un morceau, les rythmes des débuts du groupe. Quant à Elton – nous étions à la recherche d’un pianiste capable d’assurer un fond de boogie-woogie en arrière-plan, sans faire un grand numéro de pianiste. Et Elton est parfait pour ce style boogie un peu vintage, qui sait rester discret. Parlons du premier morceau, Angry : peut-on y voir une sorte de critique ­sociale ? Il y a toujours eu de la colère dans le monde, qu’elle soit justifiée ou injustifiée. Mais elle est aujourd’hui particulièrement étendue, très intense et surtout elle s’exprime beaucoup plus violemment. Il faudrait qu’on apprenne à être moins impulsifs et moins radicaux dans nos opinions. Mais soyons honnêtes : les relations humaines seraient impossibles sans une certaine dose de colère. Quand on est en couple, on peut se voler dans les plumes de temps en temps, c’est normal. Ce nouvel album annonce-t-il une ­prochaine tournée des Stones ? On y pense très sérieusement. On aimerait bien s’y mettre l’année prochaine, avec un nouvel album dans les bagages. Mais pour l’instant, rien n’est fait. C’est un énorme projet qui a besoin d’être soigneusement préparé. Instagram : @mickjagger

THE RED BULLETIN


« Des morceaux pleins d’énergie avec 150 beats par minute – c’est ça mon truc. » La pile Duracell du rock : Mick Jagger sort un album survolté.

THE RED BULLETIN

19


H É RO S & H É RO Ï N ES

LILLY PALMER

est l’une des DJ de techno les plus connues de la galaxie (elle a déjà intégré des sons de l’espace dans ses morceaux). Lors de ses concerts, une connexion presque surnaturelle se crée avec son public. TEXTE ANNE WAAK

La musique lui permet d’exprimer ses émotions en toute liberté et de se sentir en osmose avec son public. Des émotions authentiques et une connexion réellement palpable qui ont fait de Lilly Palmer l’une des DJ de techno les plus populaires : elle se produit sur les plus grandes scènes des festivals comme le Tomorrowland en Belgique et compte 1,3 million de followers sur Instagram. Originaire de Franconie, elle habite aujourd’hui à Noordwijk, petite ville néerlandaise au bord de la mer du Nord, a fondé son propre label, Spannung Records, et vient tout juste de sortir son dernier morceau, The Violator. Décalage horaire oblige, nous la cueillons au saut du lit à Miami, où elle vient de mixer pour un festival la nuit précédente. the red bulletin : Ta spécialité, c’est le Peaktime Techno, cette musique qu’on balance quand l’ambiance est au top. En plus, tu inclus souvent tes propres chants sur les morceaux. Comment as-tu développé ce son très perso ? lilly palmer : C’est d’abord un genre qui correspond parfaitement à ce que je suis et à ce que je fais : en général, je joue sur un créneau de deux heures, donc je n’ai pas vraiment le temps d’expérimenter sur place. Mes morceaux doivent être prêts à l’avance. Ensuite, j’ai ce besoin d’insérer mes propres chants sur les titres pour ­donner une touche plus personnelle. Mes goûts en matière de techno m’ont amenée là où je suis et dans les clubs, le public suit. Au début, je faisais plutôt dans la deep house mélodique, mais ensuite, je suis revenue vers des gros sons technos bien bruts et j’ai eu des super retours. C’est comme ça que j’ai décidé de produire ma propre musique.

20

PHOTO COOPER SEYKENS

Tu mixes depuis 2015, tu es l’une des plus grandes DJ du moment et tu joues quinze fois par mois. Comment gères-tu ? Le plus dur pour une artiste c’est quand tout retombe, du coup je ne bois presque jamais d’alcool en concert. J’ai besoin de partager tout ce que je vis avec mon compagnon, ma famille ou mes amis. C’est indispensable à mon bien-être. C’est un vrai défi d’enchaîner plusieurs concerts à la suite, autant physiquement que mentalement. Quand tu dois mixer deux ou trois fois dans la même journée, parfois dans plusieurs villes différentes, le seul moyen d’y arriver niveau logistique est de voyager en jet privé. Au moindre pépin, c’est tout le planning qui est foutu. C’est quelque chose que je ne fais plus qu’à titre exceptionnel et quand je sais que j’aurai du temps pour récupérer après. Quel est ton remède anti-jet lag ? J’ai toute une panoplie d’exercices, plusieurs techniques de méditation et puis la musique, évidemment. Avant, je travaillais avec les ondes thêta pour améliorer mon sommeil : ce sont les fréquences que notre cerveau produit en phase de sommeil paradoxal. Aujourd’hui, j’écoute de la musique de méditation pour m’endormir. En dehors de la musique, qu’est-ce qui fait de toi une artiste à part ? L’authenticité. Pour moi, c’est essentiel. Dans le milieu de la deep house, tout le monde est cool mais ça reste assez sérieux. Quand je me colle aux platines, je me fais plaisir, et ça se voit. Je me marre beaucoup et je chauffe le public qui danse devant moi. Tu ne vas pas à une rave que pour la musique mais aussi pour les sensations. Mon rôle de DJ me permet de communiquer avec le public grâce à mes mimiques faciales et mon langage corporel. C’est ce qui rend mes performances si vivantes.

Apparemment, tu es également très ouverte aux nouvelles influences : récemment, tu as intégré des sons de l’espace dans tes morceaux dans le cadre d’une collaboration avec l’Agence spatiale européenne (ESA). C’est arrivé comment ? J’ai rencontré un type à l’aéroport de Milan qui vivait lui aussi à Noordwijk et bossait pour l’ESA. De fil en aiguille, j’ai eu l’occasion de mixer et de diffuser en direct depuis leur « chambre sourde », une salle recouverte de pointes en mousse polymère qui absorbent les sons pour simuler les conditions de l’espace. Normalement, c’est l’endroit où l’on teste la capacité de transmission des satellites dans l’espace. Et pour couronner le tout, j’ai eu accès à la bibliothèque sonore de l’ESA. C’est comme ça que le morceau You Are My Guide est né. Comment expliquerais-tu la « fascination techno » à quelqu’un qui n’a jamais été en rave ? Prenons l’exemple de ma mère : elle n’y connaissait rien en musique techno mais elle est quand même venue me voir mixer aux platines et elle m’a confirmé que c’était un son hypnotique et fédérateur : il suffit de se laisser aller pour entrer dans une transe quasi méditative. Quand un groupe de personnes dansent ensemble, il se passe quelque chose de très instinctif, voire de primitif. Une sorte de sentiment d’appartenance mais aussi de libération, on oublie ses problèmes, ses angoisses, et on se sent bien, tout simplement. Instagram : @lilly_palmerdj

THE RED BULLETIN


« La techno renforce le sentiment d’appartenance et permet de lâcher prise. » Lilly Palmer à propos de sa fascination pour les raves.

THE RED BULLETIN

21


PHOTOS LESLIE HITTMEIER

LESLIE HITTMEIER/TETON GRAVITY RESEARCH

OBJECTIF POUDRE TEXTE MARC BAUMANN

Premières descentes dans la poudreuse, extase de l’envol, joie partagée au sommet : la photographe Leslie Hittmeier capture ce plaisir nommé hiver sur pellicule. 22

THE RED BULLETIN


VOL DE JOUR Lake Tahoe, Californie, 2018 Moment de liberté : la snowboardeuse Elena Hight s’est r­ écemment éloignée de la compétition pour se consacrer au freeride. « J’adore la manière dont Elena étend ses bras sur la ­photo, on dirait qu’elle vole », confie Leslie. ­Liberté retrouvée.


24

THE RED BULLETIN


Collé à la roche, Benja se fend d’un sourire sans quitter le sommet des yeux. Mieux que de regarder vers le bas !

CLIFFHANGER Grand Teton National Park, Wyoming, 2019 « Petite journée tranquille entre potes », commente Leslie. Tranquille ? Son ami Benja n’a pas l’air très convaincu. Il s’accroche fermement mais reste stoïque ­malgré tout.

THE RED BULLETIN

25


JOIE SIMPLE Turner Mountain, Montana, 2023 Pas toujours besoin d’hélicos et de tricks vertigineux. Ce cliché souligne la grâce d’un « simple » saut dans un spot équipé d’un seul téléski. La beauté du quotidien.

SOURIRE FIGÉ Beartooth Mountains, Wyoming, 2021 Seul un pro peut ­sourire ainsi avant de se jeter dans un couloir rocheux. Un second photographe attend Nick Russell (à g.) et Danny Davis en bas. Mais avant, place aux lignes de poudreuse à tombeau ouvert.

26

THE RED BULLETIN


DISCO TIME Wyoming, Backcountry, 2023 « Ben Hoiness s’offre un petit moment disco après une grosse journée sur les pistes », dit Leslie à propos de celui qui partage sa vie. Guide de montagne dans le civil, il lui ­servait souvent de ­modèle à ses débuts.


MAGIC CIRCUS

Douche improvisée : l’espace ne manque pas, l’eau non plus, mais pas sous forme liquide ! 28

LESLIE HITTMEIER/TETON GRAVITY RESEARCH

Glacier Bay National Park, Alaska, 2022 Leslie et la snowboardeuse Elena Hight (photo) ont passé trois semaines de tournage entre acensions ­exténuantes et nuits glaciales. Pas de baignoire, certes, mais une nomination aux Emmy Awards à la clé.

THE RED BULLETIN


THE RED BULLETIN

29


TOUT SCHUSS Grand Teton National Park, Wyoming, 2021 On n’est jamais trop prudent dans le choix de son métier : plutôt bons petits plats de la cantine ou sortie express dans la poudreuse fraîche avant le déjeuner ? Elena Hight s’offre une descente plein pot en guise d’apéro.


FÊTE DES ­LUMIÈRES Lake Tahoe, Californie, 2018 Accroupie dans la neige, tremblotante, Leslie cherche le meilleur éclairage pour ­saisir Danny Davis, Sammy Luebke et ­Elena High (de g. à dr.).

LESLIE HITTMEIER/TETON GRAVITY RESEARCH

HUMOUR GLACÉ Tetons, Wyoming, 2023 Souriez ! Une simple chute sur les pistes vous récompensera d’un merveilleux masque hydratant… Même après s’être vautré dans la poudreuse, Ben Hoiness le baroudeur garde le sens de l’humour.

THE RED BULLETIN

31


32

THE RED BULLETIN


LESLIE HITTMEIER/TETON GRAVITY RESEARCH

IVRESSE DES ­SOMMETS Mount Bertha in Glacier Bay, Alaska, 2022 Le snowboardeur Jeremy Jones, le skieur Griffin Post et la snowboardeuse Elena Hight (de g. à dr.) ont atteint le sommet après de longues heures d’ascension et laissent éclater leur joie. Bonheur éternel.


LA PHOTOGRAPHE

La qualifier de photographe de sports de montagne serait bien trop réducteur. Leslie a d’autres cordes à son arc : c’est une réalisatrice talentueuse et passionnée. L’Américaine de 31 ans, installée à Red Lodge (Montana), a produit et réalisé un documentaire sur les reines de l’escalade. Quand il s’agit de capturer les athlètes de l’extrême dans la neige, aucun chemin ni aucun hiver ne sont trop longs pour elle. Les expéditions au milieu de nulle part avec tout le matériel photo sur le dos et les nuits glaciales sous les tentes ne lui font pas peur. Et elle est suffisamment douée sur une paire de ski ou un snowboard pour pouvoir suivre et filmer de spectaculaires descentes inédites en Alaska. Ses séries de photos montrent combien la culture snowboard est ancrée dans sa vie. Leslie n’a pas son pareil pour capturer d’impeccables descentes en poudreuse. Son œil de lynx saisit tous les petits détails de la vie quotidienne. Des photos comme autant de témoignages de la franche camaraderie et des grandes amitiés qui animent ces séjours dans la poudreuse. Elles donnent envie de descentes sous le soleil autant que de partager les moments de repos forcés, quand neige et lumière font grève et que l’on attend la prochaine embellie pour rider et faire des photos en partageant anecdotes et café ­fumant dans un véhicule enneigé. Instagram : @lesliehittmeier Découvrez The Land of Giants sur Red Bull TV

34

LESLIE HITTMEIER/TETON GRAVITY RESEARCH, ROBIN O’NEILL

LESLIE HITTMEIER

THE RED BULLETIN


TÊTE BAISSÉE Hakuba, Japon, 2020 S’il est d’usage de ­s’incliner au Japon, c’est en signe de politesse, par pour passer sous les cordons de sécurité. ­Elena Hight et Hana Beaman préfèrent quant à elles faire l’éloge de la contre-culture… et ignorer les frontières.

THE RED BULLETIN

35


E D S E U L B LE MPTABLE O C LA

uf que a S » ! ie de la v alement s i a m se ? Ja agu s’est ­fin dix ans u e t n a e ch iya R ales, après angée. n r u P , e B l l & fi R i li ur « Notre ontante du attentes fam ée de ­burea m y s la star du poids de mme emplo fans ! s o e ­libéré travailler c nheur de se à o ­passés plus grand b e Pour l

TEXTE LOU BOYD PHOTOS ELLIOTT WILCOX


Une direction claire Priya Ragu lors d’une séance ­photo pour The Red Bulletin en septembre 2023, à Londres.

THE RED BULLETIN

37


« Je me suis dit : “Garde ton boulot et ton salaire et oublie la musique.” Mais c’est elle qui a été la plus forte ! »


D Mélange de succès Le style de Priya Ragu est un crossover entre tradition et streetwear urbain. Le foulard, en particulier, rappelle ses origines : ses parents ont grandi au Sri Lanka.

THE RED BULLETIN

le titre Santhosam (« bonheur » en tamoul), elle se raconte, tout simplement. L’intro intitulée Ammama’s Note résume déjà les tensions intérieures : il s’agit d’un message vocal de 18 secondes de la grand-mère de Ragu, enregistré et envoyé après un mariage dans la famille. « Eh, tu m’as oubliée ? Pourquoi n’as-tu pas appelé ? », demande la grand-mère en tamoul. C’est un mélange d’inquiétude sincère et de reproche latent. « Tu te souviens de ce que j’ai dit à propos de la demande en mariage ? » « Je trouvais ça un peu amusant de commencer l’album avec ce message vocal, parce qu’il est tellement authentique », explique Ragu, aujourd’hui âgée de 37 ans. Ce sujet la poursuit depuis des années, c’est pourquoi elle est allergique au mot « mariage ». Et c’est aussi pour cela qu’il convient si bien au début de son album. « Car ici, tout tourne autour de ma quête du bonheur et de ma libération des attentes de la société. »

ans le clip vidéo de son single Adalam Va!, Priya Ragupathylingam – plus connue sous le nom de Priya Ragu – danse avec des acteurs dans et autour d’un imposant manoir. Ici, le style Tarantino fusionne avec l’esthétique cinématographique tamoule, également appelée Kollywood. Vêtue d’un tee-shirt surdimensionné et de lunettes de soleil, Ragu passe sans peine d’un monde à l’autre. Des mondes qu’elle incarne tous les deux. Comme beaucoup de jeunes femmes d’origine asiatique, Ragu, fille de parents tamouls, a subi une énorme pression pour répondre aux attentes de sa famille : décrocher un bon boulot, mener une vie stable, trouver un mari bien comme il faut. Une carrière musicale en tant qu’artiste R&B et pop ne faisait pas partie du programme. Mais lorsque sa chanson Good Love 2.0 est sortie en 2020, l’artiste indépendante suisse largement inconnue est devenue une star montante du jour au lendemain. Les labels se sont mis à faire la queue, la station de radio BBC Radio 1 a diffusé la chanson en boucle. Ragu a été inscrite sur la liste Sound of 2022 de la BBC, a participé à l’émission culte Later with Jools Holland et son premier album est enfin récemment sorti. C’est un disque à la fois jubilatoire à l’énergie positive et contagieuse ainsi que le récit du voyage personnel de Ragu. Sous

La double vie d’une adolescente Fille d’une pharmacienne et d’un comptable, Ragu a grandi à Bazenheid, près de Saint-Gall. Sa famille a fui le Sri Lanka en 1982 pour échapper à la guerre civile sanglante et a débarqué dans cette localité de quelque 3 500 âmes après bien des péripéties. « Enfant, j’ai eu du mal à concilier les deux cultures, raconte Ragu. J’avais souvent l’impression de devoir cacher mes véritables origines. » En tant qu’enfant d’un foyer tamoul traditionnel, la musique pop ou MTV étaient tabous pour elle et son frère. Mais la musique faisait tout de même partie intégrante de la vie familiale. Le père de Ragu organisait de petites jam-sessions et invitait des ami·e·s le week-end pour jouer la musique de son ancienne patrie. À l’âge de dix ans, Ragu a rejoint le groupe familial en tant que chanteuse. « Ce n’était pas une grosse affaire. Nous ne jouions que lors d’événements culturels locaux et de mariages. » Mais en secret, le frère et la sœur ont poursuivi leur formation musicale en écoutant en boucle des chansons du hip-hopper Mos Def et des Fugees, développant ainsi leur propre style et leurs propres goûts. « Car la musique afro-américaine a été une part importante de notre enfance », explique Ragu. Lorsque Ragu a découvert Lauryn Hill, la chanteuse principale des Fugees, rien n’a plus été comme avant. « J’ai vu Sister Act 2, cette

39


« Papa a trouvé mon journal, a lu mes projets, et m’a interdit de jouer mon premier concert. » ­ istoire où Lauryn Hill n’a pas le droit de chanh ter ni de faire partie de la chorale, et j’ai complètement flashé. Je me suis dit : “Mon Dieu, c’est mon histoire.” Sa voix a fait bouger quelque chose en moi. Jusqu’alors, je n’avais pas imaginé que la musique pouvait avoir un tel pouvoir. Mais c’est devenu clair pour moi à partir de ce moment-là. » Ragu a appris d’elle-même – alors qu’elle ne se produisait officiellement qu’au sein du groupe familial bien sage – les chansons d’artistes comme Lauryn Hill et Alicia Keys. À 16 ans, elle a osé chanter pour la première fois pour quelqu’un d’autre. Elle a choisi son frère aîné, Roshaan. « J’ai soudain cru en mon talent et j’ai eu le sentiment de devoir le partager avec quelqu’un, dit-elle aujourd’hui. À l’époque, ­Roshaan avait un crew de rap et je leur ai donné quelques échantillons. Ils ont tous aimé et m’ont invitée à me produire avec eux le weekend suivant. » « Cher journal, vendredi, je serai une pop star ! » Priya Ragu avait laissé ces mots au vu de tous dans sa chambre. Son père a découvert la mention du spectacle à venir et s’y est clairement opposé. « J’ai menti en disant que j’allais à l’anniversaire d’une amie, se souvient l’intéressée, mais il m’a dit : “J’ai vu ce que tu as écrit dans ton journal. Hors de question.” Je me suis enfermée dans ma chambre et j’ai détesté le monde. C’était horrible. Aujourd’hui, je peux en rire, mais ce jour-là, c’était une catastrophe. Je me suis jurée que je ne parlerais plus de ma musique à mes parents tant que je n’aurais pas atteint un niveau acceptable. »

d’au moins essayer de faire de la musique. Que je ne pouvais pas continuer comme ça pendant trente ans et me retrouver à soixante ans sans avoir jamais rien tenté. » En tant que pop star de la deuxième chance, Priya Ragu a commencé dans la trentaine à écrire ses propres chansons et à approcher activement des producteurs et des partenaires musicaux potentiels. Lorsque l’opportunité de collaborer avec le rappeur américain Oddisee s’est présentée, elle a pris un congé sans solde et s’est installée à New York pour quelques mois. Mais le courant ne passait pas vraiment – aucun des projets ne répondait à ses attentes en ­matière

La marque de fabrique « Raguwave » se lit sur la boucle de sa ceinture. Ce mot désigne bien sa ­façon de faire de la musique.

Une fin et une renaissance Cette nuit-là, la jeune Priya Ragu a enterré ses ambitions artistiques. Elle a terminé ses études, a fait carrière comme comptable dans une compagnie aérienne et a quitté son village pour Z ­ urich dans sa vingtaine. Sur le plan social, sa vie avait désormais atteint son altitude de croisière – comme ses parents l’avaient rêvé pour elle. La musique, elle, s’était installée de manière indélébile dans sa tête, même si Ragu la chassait de ses pensées. « J’ai ignoré tous les signes. Je me disais : “Non, garde ton boulot et ton revenu stables. Ne deviens pas une artiste sans le sou.” » Ce n’est qu’à son trentième anniversaire que tout a changé : « J’ai réalisé le talent que j’avais et que je négligeais. J’ai réalisé que je me devais

40

THE RED BULLETIN



« Mon frère a l­ ancé les beats, nous nous sommes ­disputés. Et soudain, j’ai ­retrouvé le rythme de mon enfance. »


car sa vision était si différente de la mienne, raconte Priya Ragu. Car j’ai compris qu’au final, je voulais chanter du jazz, de la soul ou du R&B purs. » Mais Gold l’a convaincue de donner une chance à son idée, a trouvé un beat et y a ajouté quelques paroles en tamoul. « Et soudain, ça m’a semblé si juste, si évident. J’ai senti que nous avions tapé dans le mille. C’est exactement le son que nous recherchions », explique Ragu. Et c’est ainsi qu’est né le « Raguwave », ce style très particulier de pop et d’anciennes traditions asiatiques. Tout-à-coup, les chansons se sont écrites d’elles-mêmes.

Entre chic et protestation C’est aussi grâce à son look que Priya Ragu s’émancipe du rôle que la génération de ses ­parents lui a imposé. Stylisme : Zak Khan, @zakyrhe Maquillage : Daniela Alves Coiffure : Shamara Roper Éclairage : Jared Price

En 2024, Priya Ragu sera en tournée aux État-Unis et en Europe. En live à Zurich le 13 avril, au Plaza Klub.

THE RED BULLETIN

d’inspiration et de son. Ce n’est qu’au creux de la vague à New York qu’elle s’est souvenue de son premier partenaire musical : son frère aîné Roshaan alias Japhna Gold. Ils ont alors commencé à passer des heures sur Skype lors de nuits solitaires – Ragu dans sa chambre louée aux États-Unis et Gold à la maison, en Suisse. Le tandem familial a alors expérimenté de plus en plus souvent avec des beats et des hooks. « La musique nous a permis de revenir à nos racines et de nous connecter davantage à ce que nous sommes vraiment, explique Ragu. Cela a aussi un rapport avec la spiritualité. Le fait que nous ayons vécu la même chose a rendu l’écriture des chansons tellement plus facile. Nous avons une connexion comme il n’en existe pas d’autre. » La leçon qu’elle en a tirée : elle est ­revenue en Suisse et a fait de Japhna Gold son producteur officiel. Elle se souvient particulièrement d’une journée en studio. Gold avait proposé de retourner le beat d’une chanson et de l’assaisonner avec les instruments et les rythmes des jam sessions de son enfance. « Au début, j’étais sceptique. Nous nous sommes même pas mal disputés,

Nuits blanches pour les rêves des autres Et le premier album est finalement sorti. Dès la première chanson, School Me Like That, Priya Ragu joue avec cet éternel fossé entre les ­attentes familiales et les désirs profondément enfouis : “How can I stay awake for somebody else’s dreaming ?” [trad. « Comment puis-je rester éveillée pour le rêve d’un autre ? »] Et “There’s so much life in me that I should believe in (...). We are done being chained, I was born to break them for good.” [trad. « Il y a en moi une telle vie en laquelle je devrais croire. Nous ne voulons plus porter de chaînes, je suis née pour les briser pour toujours. »] « J’ai trouvé mon bonheur », s’exclame la chanteuse avec une emphase mesurée. Un ­album, une tournée européenne et américaine en tête d’affiche prévue pour l’année prochaine – quel est le prochain objectif ? « Il y a deux ans, je me suis fait un tableau d’inspiration (en anglais, vision board) et j’y ai écrit toutes les choses que je voulais accomplir, dit Priya Ragu. Ces projets se sont réalisés petit à petit. » Elle y a écrit « Tourner une vidéo pour Colors ! » (une chaîne YouTube basée à Londres), et elle l’a fait. « Apparaître dans Vogue ! », et les éditions anglaise et indienne ont parlé d’elle. « Participer au Festival de jazz de Montreux ! », et ça a été l’un de ses premiers grands concerts. Priya Ragupathylingam réfléchit. Oui, il y a encore quelques petites idées sur cette liste d’épicerie des choses qui lui tiennent à cœur. Mais le plus important – ce que Ragu n’osait même pas écrire – est arrivé comme par magie : son père, qui lui avait autrefois interdit de faire sa toute première apparition en tant que pop star, a collaboré au son de son album ! Instagram : @priyaraguofficial

43


VENT NOUVEAU SUR LES DUNES TEXTE TIM STURTRIDGE

RED BULL CONTENT POOL

Depuis plus de trente ans, les lauréats du Rallye Dakar sont presque toujours âgé de 40 ans et plus. Mais le futur vainqueur de l’édition 2024 pourrait bien n’avoir que 21 ans. Roulez, jeunesse !


Le challenger Entraînement à Dubaï : Seth Quintero dans son Hilux V6 3,5 litres­ bi-turbo de Toyota Gazoo Racing.

THE RED BULLETIN

45


L

es épais pneus tout-terrain BF Goodrich soulèvent des volutes de sable dans leur sillage tandis que le véhicule franchit les dunes du Sahara. Au volant du CanAm Maverick X3 (quad léger sobrement composé de quatre roues, deux sièges, un arceau de sécurité et un moteur de 200 chevaux) : Seth Quintero, pilote américain âgé de 21 ans. « Bon Dieu, que ça fait du bien », souffle-t-il à Dennis Zenz, son copilote allemand. Mi-octobre, rallye du Maroc. Ultime course du Championnat du Monde de Rallye-Raid 2023 (W2RC), une épreuve de longue distance tout-terrain épuisante. Bien qu’ils ne soient que troisième du classement général, Quintero et Zenz ont pris la tête en catégorie T3, les « prototypes légers ». À présent, lors de la dernière étape de cette éprouvante traversée cumulant 2 240 kilomètres à travers le désert, il ne leur reste « plus qu’à » franchir la ligne d’arrivée. « On mène le bal avant la dernière journée, a annoncé Quintero sur son compte Insta la veille au soir. On est prêts pour les 158 derniers km de l’année. » Le rallye du Maroc, c’est la répétition générale du premier rallye de la saison, le mythique Dakar, la course auto la plus impitoyable au monde. Pendant deux semaines, en Arabie saoudite, les pilotes avaleront des kilomètres jusqu’à l’écœurement. Départ de la vieille ville ­d’Al-’Ula, arrivée à Yanbu, sur la mer Rouge, avec des étapes quotidiennes allant jusqu’à 500 km. Il faudra traverser les contrées inhospitalières du désert Rub’ al Khali, surnommé le « Quart Vide ». Une pression énorme pour la machine, le corps et le mental. Plus qu’un sport, c’est une épreuve de survie. L’édition 2023 a vu le pilote qatari Nasser Al-Attiyah s’imposer devant le Français Sébastien Loeb. C’est la deuxième fois qu'ils prennent la tête du podium, et encore plus remarquable, ils cumulent un siècle d’existence à eux deux. Al-Attiyah est alors âgé de 52 ans et Loeb de 48 ans. Quant à Peterhansel et Carlos Sainz, leurs plus féroces concurrents, ils avaient respectivement 58 et 60 ans.

46

Dreamteam Seth Quintero, la machine de course au charme de garçon, et son ­copilote Dennis Zenz (à gauche).

THE RED BULLETIN


« On me traite comme un enfant mais bientôt, je pourrai être champion. » SETH QUINTERO, STAR EN HERBE DU RALLYE

THE RED BULLETIN

47


Tous les quatre seront bien de retour pour l’édition 2024 qui partira d’Al-’Ula le 5 janvier. Il faut dire que les statistiques jouent en leur faveur. Au cours des trois dernières décennies, il n’y a eu que quatre éditions où le ou la vainqueur·e de la catégorie voitures avait moins de 40 ans et Monsieur Dakar en personne s’est attribué deux de ces victoires. « Ces types-là sont encore et toujours les concurrents à battre. C’est dingue. Mon propre père a couru contre Stéphane et Carlos », constate le pilote belge Guillaume de Mevius, 29 ans. Au cours de ses deux premières participations au Dakar en 2022 et 2023, il concourrait en catégorie T3, dans des véhicules plus petits que les T1, catégorie élite de Peterhansel, Sainz, Al-Attiyah et Loeb. On considère la T3 comme le parfait tremplin de la formation à la compétition. « Les T3 sont limités à 135 km/h alors que les T1 peuvent atteindre 170 km/h, explique de Mevius. La carrosserie des T1 est plus solide, on peut prendre plus de risques au niveau des obstacles. Les T3 sont moins polyvalents que les T1 qui permettent de passer n’importe où. » Grâce à sa troisième place en T3 cette année, de Mevius s’est vu offrir le volant d’une Toyota H ­ ilux catégorie T1 pour le Rallye du Maroc. Une version sous stéroïdes de ce pick-up japonais a permis à Al-Attiyah de remporter les deux derniers Dakar. De Mevius a ­enchaîné une série de résultats impressionnants au Maroc, terminant parmi les cinq premiers par étapes sur un groupe composé de l'ensemble des vainqueur·e·s des seize Dakar précédents. De quoi donner envie de lui offrir une place permanente en T1. « Je pensais que je devais attendre d’avoir 40 ans. Maintenant, je peux enfin poursuivre mon rêve d’enfance. » La jeune relève Si la question de savoir à quel moment on est trop vieux ou vieille pour participer au Dakar n’est pas tranchée, le débat a été vite réglé dans l’autre sens. En 2020, Seth Quintero, jeunot de 17 ans, s’envole de San Marcos (Californie) pour débarquer en Arabie saoudite, impatient de se frotter à la course la plus impitoyable au monde. Mais les organisateurs lui font comprendre que l’âge minimum pour participer est de 18 ans sans aucune exception. « Ça m’a vraiment boosté », s’enflamme Quintero. Son air d’ado, ses cheveux noirs en bataille et son corps frêle évoquent plus un

coureur du Tour de France qu’un pilote de rallye. « Ça faisait déjà un bail que j’étais dans le circuit, préciset-il, c’était pas agréable de se faire traiter de gamin. » « Ça faisait un bail que j’étais dans le circuit », un euphémisme tout à son honneur : Quintero enfourche son premier quad à 4 ans, court en UTV (véhicules utilitaires tout-terrain biplaces avec arceau de sécurité) à 10 ans, est sacré champion du monde junior un an plus tard en 2014, puis en 2018, à 15 ans, termine 2e de la Mint 400, rallye épique dans le désert du Nevada, célébré dans le roman Las Vegas Parano de Hunter S. Thompson. Un an plus tard, il remporte la Mint, le V ­ egas to Reno, le championnat du monde UTV, le Parker 250 et le Silver State 300, cinq des six épreuves du championnat américain Best in the Desert, chaque fois en tant que plus jeune pilote de sa catégorie. « Les courses que j’ai faites en Amérique m’ont donné cette vitesse brute. Si j’ai dû apprendre un truc, c’est à ralentir, dit-il. Même si je n’ai pas pu participer au premier Dakar, j’ai au moins compris un tas de choses qui m’ont aidé l’année suivante. » En pilotant un T3 au Dakar 2021, Quintero remporte six étapes, devenant ainsi le plus jeune vainqueur d’étape de la compétition. Triomphe et déception Le nom de Quintero entre vraiment dans la légende du désert en 2022. Tout commence par un drame. En tête de la course au 3e jour après deux victoires d’étape, il se retrouve coincé en plein désert à cause du différentiel de son buggy tout-terrain OT3 by Overdrive. Quand il est enfin remorqué jusqu’au bivouac, il est 4 heures du matin. Quintero a perdu près de 17 heures, tout espoir pour la victoire finale s’est évanoui. « Je voulais abandonner, expliquera-t-il à NBC Sports, mais j’ai compris que ça ne faisait pas partie de mon ADN. » Aux côtés de Zenz, le jeune pilote américain continue la course et remporte 12 des 13 étapes totales. Malgré leur 16e place, Quintero entre dans le livre des records en tant que pilote ayant remporté le plus grand nombre d’étapes lors d’un seul Dakar, détrônant le ­record du Français Pierre Lartigue qui en avait remporté 10 sur 17 en 1994. « C’était une vraie douche écossaise, une seule étape ratée nous a écartés de la victoire finale », rumine Quintero. S’il avait réussi cet exploit, il serait devenu le plus jeune vainqueur en catégorie T3. Un an plus

« C’est un peu fou : mon père a déjà couru contre Sainz et Peterhansel. Maintenant, c’est à mon tour ! » GUILLAUME DE MEVIUS, LE FAVORI 48

THE RED BULLETIN


Vieux sage Nasser Al-Attiyah, le champion en titre du Dakar, 53 ans , n’envisage pas de prendre sa retraite.

tard, il obtient son premier podium sur le Dakar en se hissant à la 2e place. « Mentalement, ces courses m’ont rendu plus fort que je ne l’aurais jamais imaginé. » « On n’a rien contre les jeunes pilotes comme Seth qui débarquent sur le circuit, au contraire : c’est super motivant de livrer des duels épiques entre jeunes et moins jeunes », confirme Al-Attiyah, 53 ans en décembre. Le champion en titre a le physique et le palmarès d’un champion olympique, médaillé de bronze au tir au pigeon d’argile masculin aux JO de Londres 2012. « Je n’ai pas l’intention de tirer ma révérence de sitôt, je compte bien rester et me battre. » Au Dakar, les rivalités sont comme les étapes : toujours compliquées. Les concurrent·e·s repoussent leurs limites tout en renforçant ce lien tissé par les circonstances exceptionnelles de la course. Entre Quintero et Al-Attiyah, ce lien est étroit, voire paternel aux dires de certains. « Nasser est le premier pilote avec qui j’ai parlé quand je suis arrivé sur le Dakar, et il était super sympa, se souvient Quintero. Après une dure journée sur la route, rien n’est plus beau que d’être félicité par un multiple vainqueur du Dakar. Il ne faut jamais oublier que dans cette course, ton plus grand rival est ton meilleur ami, finalement. »

En haut de l’affiche Guillaume de Mevius au volant de son nouveau Toyota Hilux au ­Rallye du Maroc.

THE RED BULLETIN

Une légende solitaire et un vent de fraîcheur Depuis la première édition du Paris-Dakar en 1979, trente pays ont accueilli la compétition, de l’Égypte et l’Afrique du Sud en passant par l’Argentine et le Chili. Mais si les continents traversés par les véhicules ont changé, les vainqueurs de cette course restaient immuablement européens. Al-Attiyah est devenu le premier et unique pilote du Moyen-Orient victorieux. Aucun Américain n'a jamais remporté le titre en catégorie élite, c'est-à-dire en voiture. Et au niveau des femmes, le palmarès est encore plus mince. Une seule a réussi à s’imposer, l’Allemande Jutta Kleinschmidt, qui remporte le trophée T1 en 2001 et entre ainsi dans la légende, en plus de signer la première victoire d’étape féminine sur la course. Mais il y a trois ans, tout a changé. Le vent du changement a pour nom Cristina ­Gutiérrez : pour ses débuts au départ du Dakar 2017 à Asunción, au Paraguay, l’unique ambition de l’Espagnole, âgée de 25 ans à l’époque, était d’atteindre la ligne d’arrivée à 9 000 km de là, à Buenos Aires. Non contente de remplir son objectif, elle enchaînera les arrivées consécutives au cours des trois Dakar suivants. On ne pouvait pas ignorer le talent de l’Ibérique derrière le volant et pourtant, elle n’a jamais été certaine à 100 % d’obtenir une place dans le convoi du désert. « En octobre 2020, j’ai écrit sur les réseaux sociaux qu’il me manquait les fonds nécessaires pour participer

49


« J’ai rencontré ­Cristina Gutiérrez au camp de jeunes… Maintenant, elle remporte des étapes ! » JUTTA KLEINSCHMIDT, LÉGENDE DU RALLYE

Un poids plume comme game changer Donner leur chance aux nouveaux talents grâce à des prototypes légers T3 (catégorie à part entière depuis 2021) explique sans doute l’émergence de cette nouvelle génération. « On a vécu des journées complètement dingues sur le Dakar où notre T3 a terminé au milieu des cinq premiers T1, explique Quintero. Je me souviens avoir commencé une étape du rallye Abu Dhabi Desert Challenge devant Nasser et d’être resté en tête jusqu’au premier ravitaillement. Faire un temps de T1 en T3, ça m’a donné confiance pour la suite. » Quintero, Gutiérrez et de Mevius sont tous trois diplômés du Red Bull Off-Road Junior Team. Lancé avant le Dakar 2020, ce programme offre des places de pilotes et de co-pilotes en catégorie T3, parfait tremplin professionnel pour participer aux courses emblématiques du monde entier. « Pour moi, c’était un truc énorme de pouvoir rejoindre l’équipe et courir en T3 au Dakar. Depuis, je me sens beaucoup plus compétitive », explique Gutiérrez, qui vise désormais un objectif largement plus ambitieux : inscrire son nom parmi les meilleures aux côtés de Kleinschmidt. « L’équipe Dacia m’a offert cette chance incroyable de piloter leur nouvelle voiture T1 au Dakar 2025, r­ évèle-t-elle.

50

J’ai tellement hâte. À mes débuts, le simple fait de ­terminer le Dakar était déjà une victoire en soi. » Retour au Rallye du Maroc : le caractère bien trempé de Quintero a une fois de plus fait des feux d’artifices. Terminant le rallye à la deuxième place, il est couronné champion T3 du W2RC 2023. « Toute cette année n’a été qu’on long combat, s’exclame-t-il. Même quand je croyais avoir absolument tout donné, j’ai continué de me battre pour chaque kilomètre. » Et le jeune Américain a été promu en catégorie T1 lors du prochain Dakar, raison de plus de se réjouir. Cela fait de lui le plus jeune concurrent T1 à entrer dans la compétition. Il rejoindra Toyota Gazoo Racing pour piloter une Hilux à moteur V6 biturbo de 3,5 litres, se substituant à son mentor Al-Attiyah au sein l’équipe, choix ô combien symbolique pour les deux pilotes. « Ça me rappelle mon premier jour sur le Dakar, j’étais parfaitement anonyme, se souvient Al-Attiyah à propos de ses débuts en 2004. Je connaissais les cadors, ceux qui avaient déjà gagné la course. Mon premier objectif était de montrer à ces pilotes que j’étais prêt à en découdre. » Al-Attiyah peut également se vanter d’être devenu champion du monde en remportant le titre T1 lors de la deuxième étape du rallye marocain. L’année prochaine, il tentera l’impossible en devenant le premier pilote à remporter le Dakar dans quatre voitures différentes sous les couleurs de Nasser Racing, au volant d’une Prodrive Hunter de 600 chevaux. Et il ne quittera pas des yeux son nouveau rival en T1. Un duel au somment entre expérience et flamboyance. « Ce sont toujours les mêmes noms qui dominent éternellement le Dakar parce qu’ils allient expérience et immense talent naturel, admet Quintero. Peu importe la voiture qu’ils conduisent, ils sont toujours prêts au combat. C’est très impressionnant quand on pense qu’ils ont 50 ou 60 ans. Ils sont sur le circuit depuis plus longtemps que je ne suis sur cette terre. » Janvier 2024 sera l’avènement d’une bataille intergénérationnelle homérique sur les dunes de 150 mètres de haut du Quart-Vide. Quintero pense-til avoir ses chances de devenir non seulement le plus jeune vainqueur du Dakar, mais aussi le premier pilote américain à remporter la T1 ? La réponse fuse aussitôt. « Je pense que je peux gagner la T1 du premier coup », sourit le jeune homme, un brin espiègle.

First Lady Christina Gutiérrez, ici sur une dune ­marocaine : elle est actuellement la meilleure femme dans la catégorie T3.

GETTY IMAGES

au prochain Dakar, se souvient-elle. Quatre Dakar et onze années de carrière qui risquaient de passer à la trappe. J’ai fini par m’inscrire à un cours universitaire. Et tout a changé. On m’a invitée à participer au rallye d’Andalousie et le manager de Lewis Hamilton m’a écrit pour m’inviter à rejoindre son équipe Extreme E. Je pensais que c’était un canular ! Et puis on m’a proposé une place en T3 au Dakar 2021. Le premier jour, j’ai réalisé le meilleur temps de ma catégorie et je suis devenue la deuxième femme du Dakar à remporter une étape. » Un exploit d’autant plus spécial que Kleinschmidt l’attendait sur la ligne d’arrivée pour la féliciter. « C’est fabuleux de voir Cristina remporter des étapes, exulte Kleinschmidt. Elle avait participé à un camp d’entraînement organisé par mes soins il y a quelques années pour les pilotes de rallye féminines et s’en était très bien sortie. C’est une excellente idée d’avoir ajouté les véhicules légers au Dakar pour que les jeunes pousses puissent sortir leur épingle du jeu. Cristina en est la preuve vivante.»

THE RED BULLETIN


Haut l’espoir Christina Gutiérrez et Seth Quintero représentent une nouvelle génération de l’élite du Dakar.

THE RED BULLETIN

VIVEZ LA COURSE DANS LE DÉSERT À partir du 5 janvier, Red Bull TV retransmettra toutes les étapes du Dakar en ­direct sur redbull.com

51


C’est l’histoire d’un jeune Antillais qui a appris à skier à 12 ans, et qui, à 37, est devenu coach de l’équipe Swiss-Ski de halfpipe. Des vagues des Caraïbes au sommet de la glisse helvète, récit du parcours hors norme de Jean-Laurent Ratchel qui n’a pas toujours été un long fleuve tranquille.

BAS LE MASQUE TEXTE PATRICIA OUDIT

52

PHOTOS DOM DAHER

THE RED BULLETIN


Tout lui sourit JL dans un butter nose roll sur le massif de Balme, à La Clusaz, France.



C La classe Que ce soit pour faire des figures à ski ou juste pour le plaisir : JL accorde une grande importance au style.

THE RED BULLETIN

e dimanche 12 juillet 1998, on s’en souvient. Mais Jean-Laurent Ratchel, alors âgé de 12 ans, plus que tout autre. Car c’est le jour de la finale de la Coupe du monde de foot remportée par la France que le jeune Antillais à la bouille ronde, originaire de Saint-Martin, débarque à La ­Clusaz. Il n’a jamais vu la neige. Lui, sa vie, jusqu’alors, ce n’est pas le blanc, mais le bleu, celui de l’océan sur lequel il surfe avec ses potes. Il ne le sait pas encore, mais c’est dans le ski qu’il va plonger tête en bas et la première. « Quand je suis arrivé, c’était les débuts du freestyle et La Clusaz était la station moteur de cette discipline, une vraie usine à champions », se souvient celui que tout le monde surnomme JL. Ses ami·e·s laissé·e·s sur l’île de Saint-­ Martin lui manquent, les cabanes, les parties de pêche et de bodyboard. Pourtant, très vite, le gamin habillé en bleu marine et chaussé de skis Rossignol blanc, rose et vert fluo, se fait remarquer par les autres jeunes du club de ski, et qui deviendront ses nouveaux potes. « Je ne pensais qu’à rider et je m’amusais à shaper des petits kicks. Un jour, Loïc ­Collomb-Patton, rider en vue, et

son coach Fabien Cattaneo m’ont chopé sur une piste et ils m’ont dit : viens rider avec nous ! On est allés direct à Balme, LE spot ! » C’est ainsi qu’il apprend le ski en quelques mois et intègre le club des sports, section freestyle, l’année suivante. JL y est bien accueilli, fait des bosses juste avant que le freestyle ne bifurque vers le pipe. « Ça les faisait marrer d’avoir un Black qui se débrouillait pas trop mal ! » À l’époque, ses camarades de jeu, outre Loïc Collomb-Patton, s’appellent Mathieu Bijasson ou Laurent Thévenet. Ils forment le crew des jeunes avec, au-dessus d’eux, leur idole, la figure tutélaire, le messie du ski : Candide Thovex. Surmotivé, JL, fort de ses années de bodyboard, de BMX et de skate, impressionne par sa bonne humeur permanente et surtout sa gestuelle très personnelle où le style prime sur la technique. En 1999-2000 débute le Siemens Freestyle Tour qui propulse le jeune skieur sur le devant de la scène freestyle. Il finit deuxième. « Incroyable, j’ai gagné 5 000 francs, mon premier prize money ! » C’est le seul gamin noir, sa présence étonne, détonne, dérange parfois. « Juste après ce podium, j’ai eu quelques attaques sur Skipass, la référence du web de l’époque, des posts disant que si j’avais des sponsors c’est parce que j’étais noir, que je n’envoyais pas des grosses rotations… Cela m’a fait prendre conscience de ma différence, une différence que je n’avais jamais perçue. Mon beau-père est blanc, mon petit frère aussi… Dans le milieu du freestyle, il y a une grande ouverture ­d’esprit, je n’avais jamais été confronté au racisme. Et puis Candide m’a pas mal épaulé à mes débuts : le meilleur skieur du monde, c’est un bon gage de crédibilité. Alors les critiques… » Parce qu’il sait sauter gros, il prend vite de l’assurance et atteint le niveau pour tourner en Coupe du monde. Le potentiel est là, les portes des grands contests comme les X Games se rapprochent. La concurrence est rude y compris au sein du club, mais l’émulation est vertueuse. JL excelle, grabe, entre autres, une médaille de bronze aux championnats de France en 2004, une quatrième place en Coupe du monde en 2009. « J’étais arrivé en France au moment où le film Rasta Rockett est sorti, et ça a été une révélation ! Je me suis identifié à cette équipe de bobbeurs jamaïcains et pris à ­rêver aux JO… »

55


« Je sais comment trouver appui et équilibre dans les airs. » Hélas en 2009, alors qu’il tente une double rotation en s’entraînant aux États-Unis pour le Dew Tour, le skieur se brise deux vertèbres. « J’aurais pu finir sur une chaise roulante. Ça m’a calmé ! » Un an de convalescence plus tard, à 24 ans, JL fait ses adieux à la compétition. Il perd ses sponsors, se cherche. Sans aucun diplôme, il pointe en intérim, enchaîne les petits boulots, de manutentionnaire à agent de réparation dans diverses sociétés. En parallèle, il s’engage dans une formation de moniteur, et obtient son diplôme quatre ans plus tard, la trentaine venue. Il enfile le pull rouge, mais reste en baggy. Entre temps, la vidéo, qui explose à cette époque, lui donne une seconde chance. « Se mettre la pression, mais gentiment, et partager des moments avec les potes, ça me convenait mieux. J’ai toujours aimé les histoires collectives, tenter des tricks et faire la fête. Je ne regrette rien. » Le ski continuera à être toute sa vie. 4 mai 2023, Crans-Montana. « Robin, tu manques d’appui, profite que la neige ne soit pas encore trop molle pour tes dub flats ! » Sur le glacier de La Plaine Morte (2 998 m) encore très enneigé pour un printemps, JL fait inlassablement répéter leurs gammes à Rafael Kreienbühl, 24 ans, et ­Robin Briguet, 23 ans, paire de jeunes champions prometteurs qu’il a suivi entre octobre 2022 et mars 2023, saison pendant laquelle il a endossé les fonctions de coach de l’équipe Swiss-Ski de halfpipe. Juché sur le pipe de 6,50 m de haut, son bonnet Def Ligz Project/DLZ (marque qu’il a créée en 2007) enfoncé sur la tête, JL débriefe au fur et à mesure sur son smartphone, depuis tôt le matin, les vidéos des runs de ses protégés. « Le but de ce camp airbag de freestyle de dix jours, réalisé par JL à la demande de Swiss-Ski, est de fabriquer des automatismes, que les figures soient bien exécutées et que demain, ils puissent les poser en vrai sur le halfpipe. L’airbag permet de travailler des figures plus dures, des doubles ou des triples rotations avec moins de risques que sur de la vraie neige. » Pas le temps d’admirer la vue sur le Cervin. Il s’agit d’exploiter le créneau des trois heures au maximum. Contrairement aux trois autres rookies dont JL a également la charge, Robin, n ­ atif de Crans-Montana qui évolue sur le c­ ircuit

56

Coupe du monde de half-pipe depuis 2017, a déjà un beau palmarès : dixième aux derniers championnats du monde de la discipline et douzième aux JO de Pékin. JL, il n’en connaissait que les initiales. « Ça met toujours un peu de temps à établir la confiance mutuelle surtout qu’il a une façon de coacher bien à lui, mais il nous motive tout en douceur ! » Rafael Kreienbühl, dit Raffi, est originaire de Davos. Ce champion du monde junior en 2017 et sixième aux championnats du monde 2021 travaille quant à lui un right side double cork. « C’est rare d’avoir un coach ancien pro rider qui nous pousse à toujours essayer une rotation de plus, à rentrer un maximum de runs. Il nous dit d’y aller à fond, d’autant que sur l’airbag, on n’a pas de risque de se faire mal. » JL acquiesce. « Je pense avoir une bonne force de persuasion. Au début, Raffi avait tendance à se disperser. Et moi, j’imposais : si on est trop cool, impossible de se montrer plus dur ensuite. Mais avec le temps, j’apprends à m’adapter à chaque personnalité. À laisser faire à certains moments, intervenir à d’autres. Il y a tellement de paramètres à gérer, parfois même la déception en compétition. Pour moi, ça se transforme en frustration : je suis là, je sais, mais je suis impuissant. Bref, j’apprends en même temps qu’eux. » Et aujourd’hui, il semblerait que Raffi le dispersé écoute davantage JL le sage… Enseigner et apprendre, double pari compliqué. D’ailleurs, comment devient-on coach de ski en Suisse, l’une des plus grosses fédérations sportives au monde, le saint des saints ? Réponse de l’intéressé : « À l’époque, j’en étais à ma neuvième année en tant que moniteur de ski à La Clusaz et en intersaison, je bossais dans la sécurité à Genève. Mon ami Greg Tüscher, le coach du slopestyle suisse m’apprend alors que la Fédération recherche un coach en pipe et me demande si je suis partant. Je suis resté scotché par cette proposition totalement

Acte de justesse JL réalise un tail tap dans la bonne humeur au massif de Balme, à La Clusaz.

THE RED BULLETIN



« Le freestyle peut être un ­moteur pour plus de diversité. »

En plein vol JL filmant la double rotation de Robin ­Briguet à l’entraînement à CransMontana.

Le mot du coach JL débriefe avec Rafael Kreienbühl sur le glacier de la Plaine Morte, à Crans-Montana.

58

inattendue… J’étais en voiture et le temps de finir ma route, j’avais pris ma décision. C’était une bonne chose de revenir dans l’univers du haut-niveau. Après, c’est un gros travail de fond, un sacré challenge. » Même si les temps changent et la gestuelle avec, l’expérience des compétitions en freestyle de JL et les recettes de ses anciens coaches l’aident considérablement à relever le défi. « Aujourd’hui, les jeunes sont de plus en plus en précoces, et leur souplesse permet de se rapprocher des figures de gymnastique. Quand j’ai arrêté la compétition en 2010, c’était les débuts des premiers doubles : alors les tricks qu’ils font, je ne les ai jamais réalisés, mais je connais le ressenti en l’air, les appuis, l’équilibre à trouver. » Le pari est d’autant plus osé que

l’objectif de la Fédération suisse est, en plus de ramener des médailles sur les prochaines grosses échéances (les Mondiaux 2025 en Suisse et les JO de 2026 en Italie), de rendre cette discipline dangereuse qu’est le halfpipe la plus sûre possible pour attirer de nouveaux talents. « Ce que je ne veux jamais voir, c’est un jeune se faire mal sur une neige dure comme du carrelage », insiste JL. Si une énorme responsabilité pèse sur ses épaules, il dit avoir moins peur de l’enjeu que d’une blessure. « Ces jeunes ont de très bons acquis, mais je serai plus serein à la fin de ce camp. D’ici là, je suis leurs yeux derrière leurs têtes ! » Seul visage foncé dans la blancheur du glacier, JL tranche, comme toujours. « Avoir un coach black, je trouve ça très bien. Ça apporte un peu de diversité », insiste ­Raffi. Cette diversité qui met tant de temps à arriver dans les montagnes pour des raisons autant sociales que culturelles. « Quand j’ai débuté fin des années 90, j’ai vite été conscient que le freestyle serait un moteur d’intégration. J’ai vécu ma meilleure vie grâce au ski. Mais je constate que ça ne prend pas vite. Si ma discipline est ouverte, le milieu de la montagne l’est p ­ arfois

THE RED BULLETIN


Naturellement ensemble.

CH-BIO-004

Naturellement rafraîchissant.


À l’aise JL dans son ­élément : il porte les ­vêtements de sa propre marque, et est à domicile.

un peu moins. Il faut faire ses preuves ! Ne pas être seulement l’exception qui attire les médias, mais être légitime parce qu’on est le meilleur. » Bientôt 11 heures sur le glacier. On passe aux tricks sérieux. Des 1660 sont tentés. Soit quatre tours et demi en l’air avec deux fois la tête en bas. « Tu ­arrives fort, Robin, mais tu perds de la vitesse en bas de la courbe, commente JL. Le 1660, confirme Raffi qui les enchaîne, c’est la clé pour faire partie de l’élite. Le trick qui fait gagner une médaille lors des grands rendez-vous. » Et pour ça, détaille JL « il ne suffit pas d’avoir

« Il est important de savoir d’où l’on vient. » 60

de l’amplitude, de sauter haut, il faut être stylé dans sa technique. Mais j’ai confiance, Raffi et Robin peuvent prétendre rentrer dans le top 5 mondial ». Pour garder le secret des figures travaillées, JL demande à ses athlètes de ne rien poster sur leurs réseaux sociaux. « J’applique la méthode Shaun White : mettre la pression sur les autres compétiteurs qui en sont restés aux figures vues lors des derniers contests. » Alors que le soleil de midi tape comme en été, JL sort sa cagoule et on ne peut s’empêcher de lui remémorer cette anecdote avec Kaditane Gomis, métis franco-sénégalais de 21 ans. Un autre petit black freestyleur prometteur made in La Clusaz. Le seul autre. « JL, que j’ai croisé lors de ma première année au club, m’a tout le temps répété : “Enlève ta cagoule !”, raconte “Kadi”. J’ai un peu honte de le dire, mais plus jeune, quand j’arrivais sur une compétition, j’en portais une. On ne voyait pas mon visage, personne ne voyait que j’étais différent. Je ne voulais pas qu’on dise : “Ah le skieur noir, il est fort.” Juste : “Ah, le skieur, il est fort !” » JL n’a fait que répéter ce que son propre père lui disait. « Je n’aimais pas trop me montrer alors je gardais souvent mon masque. Il me disait de l’enlever, parce que c’était important que l’on voie mon visage, que l’on me connaisse, me reconnaisse ! » Comme ses jeunes Suisses, JL a pris Kadi sous son aile. Lui a donné confiance, « fait réaliser que cette différence était une force, pas un poids ». Ni JL ni Kadi ne se sentent investis d’une mission ni porte-parole d’une cause. Être une source d’inspiration leur suffit. Normaliser le fait qu’un Noir peut, au même titre qu’un Blanc, percer dans le ski freestyle. « On devrait pouvoir arriver à faire skier des gens qui n’en ont pas les moyens. Il faut ouvrir le chemin en termes de résultats, d’image, démontrer par les actes. C’est ça qui importe. Mais ça prendra du temps », assurent JL et Kadi. JL promène son regard sur le panorama alpin. Pour atteindre des sommets, il faut ­aller loin. « Passer de la coolitude des îles à La ­Clusaz n’a pas été tous les jours facile. Avec le recul, je me dis que c’est un beau parcours. J’ai suivi ma passion, et on est venu me chercher… » Mais il faut savoir lâcher et ne pas se reposer sur ses acquis. C’est ainsi que l’été dernier, la Fédération suisse de ski et JL Ratchel se sont séparés. Il a donné le meilleur de lui-même, il veut maintenant aller encore plus loin. Car, comme a dit ­Socrate, « la chute n’est pas un échec. L’échec, c’est de rester là où l’on est tombé ». Instagram : @jlratchel ; à voir, le film retraçant le parcours de JL Ratchel : Black & White, pvscompany.com

THE RED BULLETIN


FIS FREESKI & SNOWBOARD WORLD CUP

LAAX.COM/OPEN LAAX.COM/OPEN


LA VOIE DE LILOU

Animée par le besoin de se surpasser, Lilou Ruel est devenue, à 20 ans, une athlète d’exception dans le monde du parkour et du freerunning. Des premiers sauts esquissés dans son jardin à son insatiable faim de victoires, la success-­story de Lilou est empreinte de cette même légèreté qui transparaît dans sa façon de se mouvoir ou de surmonter les difficultés. TEXTE PH CAMY

62

PHOTOS LITTLE SHAO

THE RED BULLETIN


Sur les toits de Paris Lilou Ruel photographiée par Little Shao en juillet dernier, en pleine session de freerunning.



« Le freerunning est un des rares sports qui ne nécessite aucun équipement, tout comme le break. Il peut se pratiquer partout : dans la neige, sur le sable, sous la pluie, sur l’herbe, sur du béton, à l’intérieur, à l’extérieur. »

’ C Vu du ciel Depuis ses tout débuts dans le jardin familial, Lilou a toujours visé haut. Aujourd’hui, elle tutoie les sommets de son sport.

THE RED BULLETIN

est un de ces lieux sans âme de la banlieue parisienne. Mais pour Lilou Ruel, 20 ans, c’est l’endroit où confluent tous ses rêves. Entre la grisaille crasseuse d’immeubles préfabriqués se concentrent tant d’énergie, tant d’espoir et tant de risque. Le rebord du muret en béton d’un escalier extérieur de 16 mètres de haut fait office de zone de lancement. La zone de réception est située quelques mètres plus bas, sur un toit-terrasse recouvert de gravier. La distance du saut entre les deux immeubles : 4,5 mètres. « Tu tombes, tu meurs », tranche lapidairement Lilou, qui fait aujourd’hui partie de l’élite mondiale du parkour (discipline qui consiste à évoluer aussi vite que possible dans un environnement semé d’obstacles) et du freerunning (enchaînement de mouvements créatifs qui met l’accent sur le flow, non sur la vitesse).

Ce spot iconique a été baptisé « Manpower ». Les hommes l’ont déjà dominé à maintes reprises, en saut classique, en salto avant ou en salto arrière. Mais jamais aucune femme ne l’avait encore dompté. « J’ai commencé à me renseigner sur tous les aspects du saut, le niveau de risque, les propriétés du terrain à l’atterrissage, les distances », confie Lilou. Elle s’est d’abord demandé : « Est-ce que ça vaut la peine de risquer ma vie pour un saut ? » Jusqu’à ce jour du 3 mai 2022. « J’ai grimpé sur l’étroit muret qui te sert à prendre ton élan, il ne fait pas plus de dix centimètres de large. » Et après ? Faire marche arrière ? Oser le grand saut ? « Après, tu sens si tu es vraiment prête à le tenter ou pas… » Lilou Ruel est née en Normandie, le 9 mai 2003. Son père est ingénieur, sa mère dirige un espace de coworking. Tom, son frère de 22 ans, court des marathons et participe à des courses de vélo. Sa famille est basée à Plaisance-duTouch, une petite ville des environs de Toulouse. 20 000 âmes, une maison, un jardin, un trampoline. Le playground idéal pour un début. « J’ai commencé le trampoline à sept ans, d’abord avec des saltos avant, puis sur le côté. » Son voisin Nicolas lui a ensuite enseigné le salto arrière. C’est un jeudi qu’elle passe ce saut pour la première fois. Deux jours plus tard, elle se rend pour la première fois dans une salle de parkour avec Nicolas. Pour y rester. « J’avais neuf ans et demi, j’étais la seule fille au milieu de tous ces garçons plus âgés, mais je me suis sentie comme chez moi. » Lilou s’entraîne alors une fois par semaine à la salle, puis deux. À l’âge de onze ans, son niveau vaut déjà largement le détour, Nicolas lui propose alors de ­tourner

65


Sens dessus dessous Le monde à l’envers, c’est le quotidien de Lilou Ruel, jeune athlète de 20 ans.

66

THE RED BULLETIN


Stupéfiant Pour Lilou Ruel, Paris est un terrain de jeu créatif et sans limites pour s’exprimer.


Avouez-le ! Il vous a fallu quelques secondes pour comprendre cette photo.

une vidéo. « J’ai fait des lines, c’est-à-dire des ­enchaînements de mouvements. Nicolas a chargé la vidéo sur YouTube – elle a tout de suite fait le buzz ! ». Parmi les internautes qui ont commenté la vidéo et félicité Lilou figuraient aussi ses idoles, des freerunners qui l’inspiraient au quotidien. Pourtant, elle était encore loin de se rêver un destin de nouvelle star du freerun. « Je voulais devenir vétérinaire, parce qu’à cette époque, quasiment personne ne pouvait espérer gagner sa vie grâce au parkour, encore moins une fille. » C’était sans compter sa passion dévorante. Lilou ajoute : « J’ai décidé de m’entraîner davantage et Yassine, le coach de mon club, m’a soutenue dans cette démarche. Il m’a prêté une structure d’échafaudages composée de plateformes et de barres que j’ai montée dans mon jardin. Je me suis entraînée dessus pendant deux ans. » Elle s’exerce parfois une poignée de minutes par semaine, parfois des heures durant. Lilou finit par atteindre un très bon niveau et participe à des compétitions locales. En 2017, le photographe Julien Blanc filme une vidéo avec Lilou et l’envoie en Suède dans l’espoir de recevoir une invitation au Air Wipp

« Je suis montée et descendue du mur six fois, et ensuite seulement j’ai lâché prise… » 68

Challenge, la deuxième compétition de parkour la plus prestigieuse au monde. Et le plan fonctionne : Lilou aura le privilège d’y concourir alors qu’elle est âgée de seulement 15 ans. « Je suis partie avec mon père, c’était incroyable. J’ai rencontré les plus grandes stars en vrai alors que je ne savais même pas parler anglais. Mais ils m’ont reconnue, ils connaissaient même mon prénom et sont venus à ma rencontre. Mon père était super fier, seules quelques filles étaient alignées au départ. J’ai fini troisième. » En 2018, Lilou est de nouveau invitée en Suède. Mais elle se blesse à l’entraînement. « Après ça, j’ai dû m’arrêter cinq mois, mais tout se passait bien au lycée et avec mes potes. » Puis, elle se blesse à nouveau. « Ça ne m’a pas empêchée d’aller bien, même si j’en avais un peu marre du parkour à ce moment-là. » Tout donner quand tout va bien, mais ne rien forcer en cas de pépin : telle est la philosophie de vie de Lilou Ruel. C’est ainsi qu’en avril 2019, elle retrouve enfin ses barres et ses trampolines. Lilou est alors âgée de 16 ans et a un objectif en tête: le Red Bull Art of Motion. C’est LA compétition de l’année dont tout le monde parle. Habituellement, elle a lieu sur l’île grecque de Santorin, mais cette année-là, elle se déroule à Matera, dans le sud de l’Italie. « J’ai rêvé que je gagnais cette compétition, se souvient-elle. Et j’ai terminé avant-dernière… Ça m’a mis une claque, mais rien de grave. » La magie de l’appareil photo En 2020, Lilou tourne un spot publicitaire à Lille pour la Mini Cooper. « J’ai peu à peu réalisé que j’accordais une grande importance aux styles et à l’aspect artistique. Et devant la caméra, c’est juste magique – j’aime être au centre de l’attention. On te confie une mission et on attend beaucoup de toi. Dans ces moments-là, je me dis que je suis exactement là où je dois être. » Et son voisin Nicolas y est pour beaucoup. « Il a été ma première source d’inspiration, explique Lilou. Il est très talentueux et a son propre style pour combiner les lines. Ça m’a énormément inspirée pour élaborer un style unique, qui me soit propre. Et c’est grâce à ça que je suis connue aujourd’hui : pour mon style. Il est unique chez les filles. Je combine le freerunning et le tricking, c’est-à-dire des éléments qui viennent de la gymnastique au sol. » Puis vinrent les confinements. Tout a fermé, mais cela n’a pas empêché Lilou de s’ouvrir à de nouveaux horizons. « Il faisait beau, j’avais ma structure dans mon jardin, mon trampoline, la piscine, mon voisin. Je m’entraînais en musculation, tous les matins je faisais de la méditation, de la visualisation. C’était paradisiaque, relatet-elle. Ce fut un gros tournant pour moi, je me suis ouverte aux signes de l’univers. » Cette formule un brin perchée masque en réalité un véritable bond en avant. « Je m’imagine en train de tracer, de faire de la muscu, de soulever la coupe et de l’embrasser. Tu visualises tes

THE RED BULLETIN


Tête en l’air Le moment de la verticalité au milieu d’un salto – en arrièreplan, la Seine dans un flow décontracté.



Choisir son cadre Lilou retourne Paris : c’est le concept à perdre la tête des photos qui i­llustrent notre article.

Contraste Chic urbain et tenue d’affaires comme un costume pour le mouvement sans limites.

«Au début, je me sentais satisfaite et fière – mais soudain, j’étais la reine du monde. » objectifs et, après un certain temps, ton cerveau ne fait plus la différence. Le visualiser, c’est le vivre. » Chaque saut est d’abord un saut mental. L’approche mentale de Lilou a débuté en février 2021 quand elle est contactée par un coach et préparateur mental, Alexandre Lacaze. « Il cherchait des athlètes à aider, pour se faire connaître. On s’est calé une visio toutes les deux ou trois semaines, et puis on est resté en contact entre chaque séance. Il t’apporte des outils selon

tes avancées, des conseils de nutrition aussi. Il m’a suivie pendant un an et demi, tant sur la visualisation que la méditation. Cela te permet de te concentrer sur le positif, et de retourner le négatif. Cela t’enseigne que si tu veux des choses dans la vie, tu peux les attirer. » Et pas qu’un peu ! En avril 2021, Lilou participe au Red Bull Al-Andalus en Espagne, une compétition qui combine freerunning et parkour. « J’ai gagné. C’était le rêve absolu. » Peu après, Lilou décroche son bac avec mention. Elle enchaîne avec le Red Bull Art of Motion en juillet 2021, qui se déroule sur deux bateaux dans le port du Pirée, près d’Athènes. « J’ai gagné le prix du meilleur trick et ai pris la deuxième place au général. J’étais super contente et fière. » En septembre, Lilou s’aligne sur la coupe du monde de freerunning et de parkour à Sofia. « J’ai fini première en freerunning et deuxième en parkour. Tout d’un coup, j’étais championne du monde, je me sentais comme la reine du monde – c’était magique. » Mais restait encore à affronter ces deux immeubles dans la banlieue parisienne, plantés là comme des milliers d’autres, massifs, banals, et pourtant si uniques. Séparés de 4,5 mètres, ils sont le théâtre du saut connu sous le nom de « Manpower », véritable Mecque du freerunning et du parkour. Lilou s’entraîne avec son coach mental et préparateur physique, Thomas Lacarriere. Elle travaille sa détente, l’impact, développe la résistance de ses genoux, de ses chevilles. « Je sautais depuis le toit de notre maison à l’entraînement, ma mère se demandait ce qu’il se passait », s’amuse Lilou. Le 3 mai 2022 arrive le grand jour. « Le matin, j’ai visualisé le saut dans mon lit pendant une heure. Puis, soudainement, j’étais là, sur ce fameux muret. Je suis montée dessus six fois, j’en suis redescendue six fois. La septième fois, j’ai lâché prise et j’ai sauté. » Elle est la toute première femme à s’y aventurer. Lilou Ruel fixe le toit-terrasse de l’autre côté du gouffre. Elle prend son envol, atterrit. Saine et sauve. Heureuse. Elle vient d’écrire une page de l’histoire du sport. Instagram : @lillouruel

THE RED BULLETIN

71


En toute humilité « Évoluer en NBA est une bénédiction », ­dit Siakam. Inconnu il y a quelques années, l’ailier fort des Toronto Raptors a été nommé deux fois NBA All-Star.

JAMAIS DE TEMPS MORT Les Toronto Raptors et leurs fans savent que Pascal Siakam, ailier d’une rare polyvalence, est une superstar. Il est grand temps de faire connaître son talent et son incroyable parcours au reste du monde. TEXTE DEMARCO WILLIAMS PHOTOS DAVID CLERIHEW

72

THE RED BULLETIN




P CHARLIE LINDSAY/RED BULL CONTENT POOL

ascal Siakam symbolise parfaitement l’incroyable essor du basket africain. Après dix ans de périple du Cameroun au Texas en passant par le Nouveau-Mexique, l’ailier fort des Toronto Raptors est devenu une star de la NBA, et un bel exemple du potentiel de son continent. Une révolution est en cours dans le monde du basket et elle n’est pas discrète, comme le prouve la Coupe du monde FIBA 2023. Cinq nations du continent africain y ont participé : l’Angola, le Cap-Vert, l’Égypte, la Côte d’Ivoire et le Soudan du Sud. Le Nigeria, habituel challenger, n’a pas réussi à se qualifier. Place aux jeunes, en quelque sorte. Et des joueurs comme Childe Dundao d’Angola ont su ­tirer leur épingle du jeu contre certains des meilleurs dribbleurs au monde. Siakam est l’une des principales raisons de ce regain d’attention portée sur le continent africain. En un peu plus de dix ans, le natif de Douala est passé de l’anonymat complet au panthéon des meilleurs joueurs de NBA. « Beaucoup de gens réalisent que notre conti-

Coriace 24 points, 6 passes décisives et 8 rebonds en moyenne par match au cours de la saison, voici Pascal Siakam, aka « Spicy P ».

THE RED BULLETIN

nent regorge de talents, explique Siakam, deux fois NBA All-Star avec les Toronto Raptors. Il y a beaucoup de gosses comme moi, et si on leur en donne l’occasion, ils pourront réaliser le même parcours. » Contrats faramineux et jets privés de luxe font certes partie du côté glamour de la vie de basketteur professionnel, mais il y a un autre côté plus obscur, celui des bleus, des bosses et des échanges très p ­ hysiques sur le parquet avec Giannis ­Antetokounmpo ou Joel Embiid. Chaque année, il faut faire preuve de force et d’intelligence pour ne pas baisser dans la hiérarchie de l’équipe. Et Siakam tient à son statut de star au sein des Raptors. C’est donc avant tout pour rester au top de sa forme qu’il s’est rendu en ­Autriche cet été, profitant du séjour pour visiter les quartiers généraux de Red Bull et le centre de performance des athlètes de la marque. « Salzbourg est une ville incroyable, raconte Siakam, féru de voyages et de photos quand il n’est pas en train de dribbler. J’y suis resté environ une semaine, à m’entraîner. C’était génial ! » Le rêve américain Rien de tel que l’air pur des Alpes pour le cardio. « J’aime bien ce genre de moments où je peux sortir de ma zone de confort, renchérit l’ailier des Raptors du haut de ses 2,08 mètres pour 103 kilos. C’est une chose que j’essaie de plus en plus d’intégrer à mes sessions : découvrir de nouvelles cultures tout en continuant à m’entraîner quel que soit l’environnement. » De retour à Los Angeles quelques ­semaines plus tard, il a pu retrouver ses marques. Mais il avait encore du pain sur la planche, pour preuve ces vidéos qui inondent la toile et où l’on voit Siakam, 29 ans, disputer des échanges endiablés avec ses collègues de NBA comme Jalen Green et Harrison Barnes. Sur le papier, le calendrier professionnel peut s’étirer d’octobre à juin, mais quand on atteint un tel niveau d’excellence, les

« Les Raptors sont bourrés de potentiel. »   75


Sa défense étouffante et son agressivité n’échappent pas à la vigilance des spécialistes. interminables séances d’entraînement et les innombrables tirs au panier durent bien douze mois par an. Vous ne pensiez tout de même pas que ces instants de pure magie étaient le simple fruit du hasard ? Avec cette fluidité qui le caractérise, ­Siakam a enregistré une moyenne de 24,2 points, 5,8 passes décisives et presque 7,8 rebonds par match au cours de la saison NBA 2022-2023, au sein d’une équipe tiraillée entre les performances passables et les passes d’armes ­sublimes. Les Raptors ont fini la saison à .500, confirmation d’une période compliquée. « On ne peut pas vraiment se réjouir d’un bilan de 41 à 41 (matches gagnés et perdus, ndlr), constate Siakam. Il faut qu’on se penche sur ce qui n’a pas marché. On est une jeune équipe bourrée de potentiel, il faut continuer de progresser, point barre. » Chemin de découverte Sur les dix saisons précédentes, les R ­ aptors ont atteint les playoffs à huit reprises et ont réussi à se hisser jusqu’aux demi-­finales de la Conférence de l’Est à cinq r­ eprises. Autant la ville que la franchise misent tout sur Siakam, leur meilleur joueur, pour revenir au top. Une pression énorme pour quelqu’un qui ne connaissait rien au basket jusqu’à l’âge de 16 ans. Lui et ses trois frères aînés grandissent au Cameroun, pays qui ne ­jurait (et ne jure toujours) que par le foot et n’offrait alors aucune alternative. ­Pascal se voyait plus comme le prochain Samuel Eto’o (son compatriote qui a fait les beaux jours du FC Barcelone, de l’Inter de Milan et de Chelsea) que comme le futur Chris Bosh. C’est par hasard, en participant à un camp de basket, qu’il est repéré par Luc Mbah a Moute, joueur de NBA lui aussi originaire du Cameroun. Pascal a des dispositions naturelles : un bon jeu de jambes, une certaine aisance et cette détermination dans les yeux qui ordonne à la fatigue de se taire. Mais c’est encore un diamant brut. Après quelques camps d’entraînements supplémentaires, il commence sérieusement à s’imaginer en roi du dunk. « Le simple fait de voir tous ces joueurs de la NBA, de les toucher, de leur parler, c’était réel, se souvient Pascal. Là d’où je viens, on n’est pas ha-

76

bitué à accomplir ce genre d’exploits, on atteint rarement ces niveaux de succès. Donc, jusqu’à ce que je m’y mette vraiment à fond, tout cela semblait vraiment irréel. » Il décroche une bourse d’études et part à Lewisville (Texas), à l’autre bout de la planète. Un sacré changement qu’il affronte en s’inspirant de certains modèles comme ses frères Boris, Christian et James, déjà inscrits dans des équipes de basket universitaire aux États-Unis, mais aussi de célébrités comme Mbah a Moute ou encore Embiid, eux aussi sortis du continent africain pour poursuivre le rêve américain et connaître de mémorables carrières NBA. Boudé par les recruteurs, Pascal décide en 2013 d’intégrer l’équipe de l’université d’État du Nouveau-Mexique. Nouvelle destination, nouveaux visages, un changement forcément chargé d’émotions e­ ncore accentuées par le décès de son père, Tchamo, qui meurt dans un accident de la route en 2014. Pour éviter de perdre son visa en cours de procédure, Pascal devra renoncer à se rendre aux funérailles. Point barre Mais les larmes ne l’empêcheront pas de trouver sa voie. « Le décès de mon père a été un moment crucial. J’ai vraiment ouvert les yeux pour m’investir complètement dans le basket : voilà quelqu’un qui avait tout sacrifié pour moi, qui m’avait guidé pour que je puisse aller à l’université et jouer au basket. Mentalement, après cela, j’ai pris une nouvelle trajectoire. Mes objectifs de carrière ont changé, j’ai travaillé avec encore plus d’acharnement. » Pour sa première année avec les A ­ ggies, il saute les compétitions pour mieux s’entraîner avant de connaître une saison 2014-2015 phénoménale qui aboutira sur un titre de Freshman de l’année de la Western Athletic Conference. La saison suivante, il est nommé joueur de l­ ’année de la WAC à l’unanimité. « Il avait une mission en tête, explique Marvin Menzies, ex-coach de l’université d’état du Nouveau-Mexique. Il voulait poursuivre sa carrière et faire tout ce qui était en son pouvoir pour y arriver. » À quelque 5 000 km de là, en Ontario, plusieurs recruteurs découvrent la poly­valence

Airtime in Austria Cet été, Siakam a passé une semaine en Autriche, entre tourisme et entraînements. « J’aime ces situations où je peux sortir de ma zone de confort. »

THE RED BULLETIN


THE RED BULLETIN

77



« Mon père a tout sacrifié pour moi, il m’a guidé pour aller à l’université. »

CHARLIE LINDSAY/RED BULL CONTENT POOL

Sans relâche Au cours des deux dernières saisons, aucun joueur de NBA n’a joué plus de minutes par match que Siakam, pièce maîtresse des Toronto Raptors.

Envie d’en savoir plus sur la NBA ? Red Bull TV diffuse The Rise of Lethal Shooter sur l’entraîneur Chris Matthews.

THE RED BULLETIN

de son jeu en visionnant un match qu’il dispute à Las Cruces. Siakam est sélectionné par les Toronto Raptors à la 27e position de la draft 2016 de la NBA. Une sélection qui s’inscrit parfaitement dans la logique multiculturelle de Toronto et sa population composée de plus de 200 groupes ethniques pour plus de 140 langues parlées. L’endroit rêvé pour quelqu’un comme Pascal Siakam et sa ­vision globale du monde. Mais le début de cette aventure va être ­délicat. Affronter les Cal State Bakersfield Roadrunners et dribbler contre les Boston Celtics sont deux mondes différents. Comme la plupart des nouvelles recrues, Siakam met du temps à s’adapter au nouveau rythme, passant sa première année entre le banc de touche et de rares performances sur le terrain, ce qui lui vaut d’être réorienté vers l’équipe de développement de la NBA, les Raptors 905. Mais en éternel bosseur acharné, Siakam profitera de cette période pour remporter le championnat de ligue D et le titre de MVP lors des finales. Le tangible et le concret Puis vient le déclic. Début de la saison 20182019, il semble mieux maîtriser le ballon et ses attaques se font plus t­ ranchantes. Et il arbore un visage plus ­serein lors de ses duels en un contre un. Le kid de Douala commence à faire des miracles. Si l’équipe de Toronto a pu remporter le trophée de champion de NBA en 2018-2019, elle le doit pour beaucoup à Siakam. Sur les 24 matches de série éliminatoire des Raptors, Siakam a marqué au moins 18 points dans 15 d’entre eux. Sa défense étouffante et son agressivité de chien fou sur les rebonds ont peut-être échappé aux stats, mais pas à la vigilance des spécialistes qui l’éliront « joueur de la ligue à la meilleure progression ». « Je pense qu’il a fait de gros progrès autant au niveau de sa gestion du ballon que de sa prise de décision, ajoute M ­ enzies. Il s’est amélioré en un contre un, drible et se débrouille mieux depuis le ­périmètre. Il comprend mieux le jeu. » Depuis leur victoire quatre ans plus tôt, les Raptors connaissent des résultats en dents de scie. Contre toute attente, leur dernière fin de saison s’est terminée prématurément, surtout

avec des joueurs du niveau de Siakam et de jeunes recrues prometteuses comme O.G. Anunoby et Scottie Barnes. Résultat décevant qui a abouti au licenciement de Nick Nurse, coach principal de l’équipe. Et vinrent des rumeurs sur un départ de Pascal. « Je n’y accorde aucune importance », riposte Siakam avec flegme. Élu joueur de Third Team par le panel de la All-NBA en 2022, il pourrait recevoir des offres mirobolantes au terme de sa saison 2024, quand son contrat actuel aura expiré. « Pour moi, jouer en NBA est une bénédiction. Tout ce que je veux, c’est continuer sur ma lancée, travailler dur et rester concentré. Je vais continuer d’améliorer mon jeu et rester focalisé sur les choses tangibles et concrètes. » Siakam se fait plus volubile quand la conversation dévie sur les jeunes athlètes africains. Basketball Without Borders, le camp d’entraînement qui l’a révélé il y a quelques années, sponsorise plusieurs événements sur le continent, ce qui fait évoluer les mentalités. Initiée au Sénégal en 2017, l’Académie NBA Africa permet de révéler les meilleurs talents de la ­région dans le cadre d’une structure d ­ ’entraînement officielle. Et la Basketball Africa League, qui a conclu sa troisième saison en 2023, fait figure de tremplin pour jeunes talents, avec 17 joueurs sélectionnés pour les équipes de la Coupe du Monde FIBA. Au cours de son entraînement à Los Angeles, Siakam croise un jeune joueur de l’académie NBA. Magique. Pour la super­star, la boucle est bouclée : quelques années plus tôt, il avait lui-même cherché conseil auprès de Mbah a Moute, et c’est désormais à lui de partager ses expériences avec les nouvelles générations ­internationales. « Je veux faire tout mon possible pour que ce développement continue, dit-il. Avoir des enfants qui me regardent moi, Joel Embiid et tous les autres joueurs africains et pensent, hey, Embiid vient d’être élu MVP de la ligue, je peux le faire aussi. Oui, j’espère vraiment qu’on va continuer sur cette lancée. » Il est sans doute le mieux placé pour guider les jeunes dans cette aventure. Instagram : @pskills43

79


DES AIIILES POUR L‘HIVER. AU GOÛT DE POIRE-CANNELLE.

U A E V U O N

STIMULE LE CORPS ET L’ESPRIT.


Votre guide pour une vie loin du quotidien V O YA G E R , É C O U T E R , O P T I M I S E R , A C Q U É R I R E T S O R T I R À en faire courber les sapins : l’as du snowboard Eero Ettala nous emmène camper en hiver en Laponie.

JANNE LIPSANEN

C’EST PARTI ! THE RED BULLETIN

81


V O YA G E R

Eero Ettala, 39 ans, est un snowboardeur freestyle, médaillé d’or des X Games.

PLAISIR FRAPPÉ

pour s’y débrouiller, être un petit peu aventurier suffit. Il y a aussi des hôtels car beaucoup de vacancier·ère·s s’y rendent pour dévaler les pistes. Et comme la plupart sont paresseux·euses, ils et elles prennent les remontées mécaniques et redescendent les pistes ou, s’ils et elles veulent skier dans la neige profonde, la pente non

Pentes de poudreuse isolées, aurores ­boréales : découvrez le bonheur de camper en Laponie, en hiver, avec Eero Ettala.

L

orsque le vent tombe enfin et que le soleil est sur le point de disparaître, je réussis le run parfait : je glisse et glisse sur la colline, je saute par-dessus les arbres. Ils sont recouverts d’une épaisse couche de neige, certains droits comme des i, d’autres tordus, car la neige pousse leur tête presque jusqu’au sol. Au-dessus de moi, le ciel est bleu, en dessous, la neige fine est poudreuse, et tout autour, c’est le silence. Seul le doux crissement de mon

82

snowboard m’accompagne dans la descente. C’est surtout ce silence qui m’enthousiasme le plus en Laponie. Je vis à Helsinki, et plus je vieillis, plus je suis attiré par cette région, la plus septentrionale de Finlande. Parce que la Laponie évoque immédiatement la nature sauvage, les loups et les ours (car il y en a), alors que la région est en fait très bien développée. Les routes sont aménagées, il y a des supermarchés et des stations de ski. Pas b ­ esoin d’être un artiste de la survie

damée juste à côté. Il ne suffit pourtant que d’un minimum d’efforts pour rapidement trouver des endroits où presque personne n’est passé avant soi. Bien sûr, avant tout, il faut s’y rendre. Depuis Helsinki, le voyage est déjà une expédition. Il faut compter quatorze heures pour traverser l’arrièrepays finlandais vallonné en

Prêt à embarquer : Eero devant son camping-car Sunlight T 67 S Adventure Edition qui peut accueillir 4 personnes.

THE RED BULLETIN


LAPONIE Ylläs Kolari

Ruka

Finlande

EETU LEIKAS, JYRI PAAJAMAA

JOHANNES MITTERER

Détacher sa ceinture : Eero teste de nouveaux sauts sur le kicker qu’il a construit en Laponie.

direction du nord, à travers d’épaisses forêts de conifères et le long d’innombrables lacs. Ce n’est que très haut dans le nord que les collines deviennent plus hautes, les forêts plus clairsemées et les arbres un peu plus petits. Lorsque le premier renne apparaît sur le bord de la route, on sait qu’on approche du but. Celles et ceux qui ­préfèrent le confort peuvent mettre leur voiture sur le train de nuit et s’allonger dans une cabine pour arriver bien reposés dans la petite ville de ­Kolari, à la frontière avec la Suède. Évidemment, il y a aussi des aéroports. Une autre évidence : la Laponie est un pays d’extrêmes. En été, il fait jour 24 heures sur 24, et en hiver, le soleil ne brille que trois, quatre, peut-être six heures par jour. De plus, il fait froid : le thermomètre peut descendre jusqu’à 20 degrés en dessous de zéro. C’est pour-

THE RED BULLETIN

quoi je préfère voyager en camping-car. On peut ainsi se rendre directement à la montagne que l’on a choisie. L’un de mes spots préférés est Yläss, là où j’ai réussi ce run parfait. Nous avons campé sur un point de vue entre deux stations de ski. De là, nous sommes partis à pied, la planche sous le bras, et avons gravi la colline dans la neige. Yläss est située très au nord, les arbres sont donc moins denses. On peut skier plus librement, mais en même temps, la pente est plus sensible au vent et les sauts construits avec peine sont vite recouverts de neige. Il nous a fallu quatre jours pour aménager mon run ! C’est exactement le contraire pour mon deuxième endroit préféré : la réserve naturelle de Valtavaara se trouve un peu plus au sud, près du village de Ruka. En face d’une station de ski, il y a une colline plus densément boisée. Il faut donc faire davantage attention dans les descentes car la neige n’y est pas autant dégagée. Ici aussi, nous garons le camping-car directement sur la montagne et partons à pied. Pas d’inquiétude : au plus tard le deuxième jour, vous aurez vu de belles choses. La montée n’est pas difficile et la descente à travers la forêt commence doucement, mais devient rapidement raide et ne dure pas très longtemps. Vous pouvez ainsi faire plusieurs rondes lors d’une même sortie. Le camping-car à proximité nous permet de tirer le meilleur parti de ces courtes jour-

Helsinki

S’Y RENDRE Vous pouvez rejoindre ­Helsinki depuis la Suisse en avion. De là, il reste ­encore environ mille kilomètres jusqu’en Laponie. Vous pouvez vous y rendre par vol intérieur ou en ­voiture. Il est également possible de prendre un train de nuit, transport de v ­ oiture compris.

LES CONSEILS D’EERO Des gadgets pour vous réchauffer ! Il peut faire très froid en Laponie. Les vêtements chauds sont un must, et aussi des chauffe-mains. Défiez la nuit ! On l’oublie souvent en ­faisant ses bagages : dans l’obscurité, hors des pistes, ne skiez jamais sans une lampe frontale. Elle est aussi utile pour ­aller se dégourdir les jambes après le souper. Mettez tout en jeu ! En Laponie, la nuit tombe dès l’après-midi. Pour ne pas rester accroché en permanence à son ­portable dans le camping-car, il faut absolument prévoir quelques jeux de société.

Soirée conviviale : après de longs runs en snowboard, Eero aime jouer à des jeux de société dans son camping-car.

nées. Et quand on revient du snowboard avec les doigts gelés, on y trouve tout de suite un nid douillet. Pas d’aprèsski, pas de party, rien que toi et tes copains, un repas chaud… Avant que tout le monde tombe dans son lit, accablé par la fatigue d’avoir dégagé la neige. Quoi de mieux ? Et si vous passez la tête par la fenêtre par une nuit claire et froide, vous v­ errez – avec un peu de chance – les aurores boréales illuminer le ciel.

Un camping-car pour tou·te·s : il est possible de louer un camping-car aussi bien à Helsinki qu’en ­Laponie, par exemple sur : mcrent.fi

83


ÉCOUTER

DROIT AU CŒUR La chanteuse Rita Ora nous dévoile ses quatre coups de cœur musicaux pour s’enflammer, pleurer ou danser.

C’

Tina Turner

THE BEST (1989)

« J’admire Tina Turner pour tout ce qu’elle a fait, surtout pour son côté guerrière et bosseuse. Son éthique professionnelle m’a énormément inspirée. J’adore sa voix légendaire, et la dimension rock de sa musique, son sens de la mode et de la performance – et bien sûr, ce titre, The Best. En plus de cela, on est toutes les deux nées le même jour, ce que je trouve particulièrement cool. »

84

Bruce Springsteen

Eric Clapton

Abba

« La chanson est tirée de ­l’album de légende Born In The USA, et c’est un morceau tout en douceur. Bruce est une vraie rock star, mais il nous livre là une belle chanson, toute simple et tranquille, sans rien de compliqué. C’est ce qui lui confère une pureté particulière. Bruce Springsteen, entre autres, m’a inspirée à écrire mes propres textes. »

« C’est un vieux tube, qui fait toujours de l’effet. Eric Clapton est l’un de mes guitaristes préférés, et j’ai grandi en écoutant les chansons de Cream, le groupe rock qu’il avait à la fin des années 60. Mon père avait d’excellents goûts musicaux et on l’écoutait souvent à la maison. C’est un morceau très triste qui parle de la mort tragique de son fils, et qui me touche à chaque fois. »

« Un classique : cette chanson est tout simplement parfaite, le genre de tube que toute popstar aurait rêvé d’écrire, avec un refrain entraînant et quelque chose qui vous touche profondément – sans oublier cette incroyable suite d’accords. En l’écoutant, on ne peut s’empêcher de se sentir comme une reine sur la piste de danse. Je le passe à chacune de mes fêtes. »

I’M ON FIRE (1984)

TEARS IN HEAVEN (1992)

DANCING QUEEN (1976)

THE RED BULLETIN

MARCEL ANDERS

Nouvel album de Rita Ora : You & I. Toutes les infos, liens audio et vidéos : ritaora.com

BMG

Ce code QR vous mènera tout droit vers la ­playlist Spotify de (et avec) Rita Ora.

est adolescente que Rita Ora se découvre une passion pour la musique, alors qu’elle participe aux sessions open mic organisées dans le pub londonien de son paternel. Aujourd’hui, cette fille d’immigrés albanais cumule plus de dix milliards de streams et pas moins de quatre tubes classés en tête des charts. Une carrière musicale exemplaire à laquelle s’ajoutent les succès sur grand écran dans les trois volets de Cinquante Nuances de Grey, la sortie de sa propre téquila et la fondation d’une marque de vêtements éco-responsable. Avec You & I, son troisième album, la chanteuse britannique de 33 ans revient à ses premières amours : la musique. Voici quatre chansons qui n’ont jamais cessé de l’inspirer – quatre tubes pour la vie, selon Rita Ora.



OPTIMISER

Accalmie sous un crâne : ne rien faire du tout jusqu’à ce que l’ennui se transforme en satisfaction de soi.

R

écemment, je suis tombé sur une vidéo YouTube dans laquelle un business-coach proclamait son refus de s’estimer satisfait et conseillait à ses followers de suivre ce même principe d’éternelle insatis­ faction. Faux et archi-faux, selon moi. Notre vie professionnelle suit un rythme immuable : (se) fixer des objectifs, définir des projets, des étapes et autres échéances qui paveront notre chemin. Nous travaillons d’arrache-pied, titubons parfois, mais nous relevons toujours pour atteindre notre but. En principe, nous devrions donc être amplement satisfait·e·s. À en croire notre influenceur, il faudrait immédiatement se jeter sur le projet suivant, un projet de préférence encore plus ambitieux.

86

CURE DE DÉSINTOX POUR LE CERVEAU

Pas facile d’atteindre l’état d’ennui en notre époque où les médias sociaux règnent en maître. D’où ma petite astuce : allier période de récupération et jeûne médiatique. Cela augmentera vos chances de refaire le plein d’énergie en quelques jours seulement, et, privés de ces incessantes distractions, vos circuits cérébraux pourront profiter d’un repos bien mérité.

Andreas Breitfeld est le biohackeur le plus célèbre d’Allemagne. Il est chercheur dans son laboratoire spécialisé de Munich. En termes simples, le biohacking englobe tout ce que l’on peut faire soi-même pour améliorer sa santé, sa qualité de vie et sa longévité.

ANDREAS BREITFELD

Le fait est que nous venons de déclencher une avalanche de dopamine, puissante hormone de la performance et de la motivation. Certes, nous devrions en profiter, mais à trop surchauffer le circuit de la dopamine, on risque l’épuisement. Et cela peut très mal finir. Mon conseil ? Après chaque succès, faites une pause ! Il est grand temps de savourer cette montée de dopamine bien méritée et de la faire retomber naturellement en ne faisant strictement rien jusqu’à ce que l’ennui se transforme en satisfaction de soi, signe irréfutable que tous nos efforts ont bien été assimilés. C’est le principe de l’homéostasie, qui s’applique aussi bien à l’entraînement musculaire qu’au travail mental. Ignorer ce principe fondamental conduit au surentraînement et provoque le contraire de l’effet recherché : vous perdrez en efficacité. Et votre dopamine tournera dans le vide, totalement privée de sens.

PERSONNELLE

Les cellules grises au repos forcé après d’intenses périodes de succès ? C’est le conseil d’Andreas Breitfeld, biohackeur pro : « Faute de quoi la dopamine s’emballe. »

BRATISLAV MILENKOVIĆ

AU DODO, MON CERVEAU !

THE RED BULLETIN



ACQUÉRIR

RIEN NE PRESSE

Montres de sport ou de plongée, smart­watches, chronographes… L’hiver a sonné !

TITANE AVEC ­PROFONDEUR Tudor Pelagos FXD Une réinterprétation moderne et résistante de la célèbre Milsub (Military Submariner), testée par les plongeurs de l’US Navy. Le boîtier de 42 mm est fraisé dans une seule pièce de titane, le rendant ainsi encore plus robuste. 3 900 CHF, tudorwatch.com

Elle aime l’eau… Un vrai amphibie ! 88

THE RED BULLETIN


Les aiguilles tournent – et le monde avec elles.

À LA LIMITE Montblanc 1858 Geo­ sphere Chronograph 0 Oxygen The 8000 Le boîtier est dépourvu de tout oxygène, ce qui élimine buée et oxydation. Le modèle en édition limitée présente deux globes tridimensionnels en rotation. 9 100 CHF, montblanc.com

MATIÈRE GRISE Alpina Alpiner ­Extreme Chronograph ­Automatic Sportif et robuste, ce modèle au boîtier en acier de 41 mm incarne l’esprit d’aventure ­d’Alpina. Pratique : on peut manipuler la couronne caoutchoutée avec des gants par temps froid. 2 995 CHF, ­alpinawatches.com

PLUTÔT OUVERTE Rado Captain Cook HT Ceramic Skeleton Cette montre n’a rien à cacher et dévoile son mécanisme, un mouvement R808. Celui-ci ­garantit une réserve de marche de 80 heures. Les éléments en or rose et le S ­ uper-LumiNova permettent une excellente l­isibilité même au plus sombre de l’hiver. 4 250 CHF, rado.com

THE RED BULLETIN

89


ACQUÉRIR

Rétro ! ­Remonter le temps, tout en restant à l’heure.

POIDS PLUME Norqain Wild One Skeleton Cette montre de sport au cadran squelette révèle toutes les subtilités de son mouvement interne et ne pèse que 78 grammes. Ses amortisseurs en caoutchouc atténuent les coups durs. 5 250 CHF, norqain.com

RÊVE BLEU

CLOCKWORK ORANGE

Bucherer Exclusive Girard-Perregaux ­Laureato Chronograph Lorsque deux maisons de tradition renommées s’associent, on obtient ceci. Le cadran avec ­motif clous de Paris et les cadrans auxiliaires bleus attireront l’attention. 18 200 CHF, bucherer.com

Certina DS Super PH1000M Inspiré de son célèbre prédécesseur des années 70, ce modèle contemporain garantit 80 heures de réserve de marche. Une édition limitée à mille exemplaires avec un cadran orange vif provoque un effet wow additionnel. 970 CHF, certina.com

90

THE RED BULLETIN


ESPRIT PIONNIER Longines Spirit Flyback Un nouveau chapitre dans l’histoire des montres de Longines : le design rappelle celles qui ont accompagné les pionniers dans leur conquête des airs, des mers ou des terres. Le fond transparent du boîtier de la version en titane permet d’admirer le calibre et sa masse oscillante sur laquelle est gravé un globe terrestre. 4 900 CHF, longines.com

D’abord, découvrir cette montre puis, avec elle, le monde ! THE RED BULLETIN

91


ACQUÉRIR

GÉNÉRATEUR Tag Heuer Aquaracer Professional 200 ­Solargraph Cette montre au boîtier de 40 mm se recharge rapidement à partir de n’importe quelle source de lumière, naturelle ou artificielle. En titane robuste, elle est une compagne légère pour les aventuriers et les explorateurs. 3 000 CHF, tagheuer.com

POTE DE SPORT Garmin epix™ Pro Un bon partenaire lorsque les journées raccourcissent : cette smartwatch multisports chic existe en trois tailles avec écran tactile, fonctions d’entraînement et de santé, et une lampe de poche LED au cas où il ferait déjà nuit sur le chemin du retour. 1 150 CHF, garmin.com

SOUS PRESSION Longines HydroConquest GMT La HydroConquest de Longines est conçue pour résister à une pression de 30 bars et répond ainsi aux attentes des meilleurs plongeurs au monde. 2 500 CHF, longines.com

92

Une montre qui se recharge au lever du soleil...

THE RED BULLETIN


Si élégante et robuste : la promesse de sensations fortes.

COUREUR DE FOND Grand Seiko ­Tentagraph Voici le premier chronographe mécanique de la marque. Il mesure le temps au dixième de seconde, et garantit une autonomie de marche de trois jours grâce à une nouvelle technique. 14 300 CHF, ­ grand-seiko.com

SABLE & ACIER Swatch BIG BOLD IRONY La collection combine la BIOCÉRAMIQUE et l’acier inoxydable avec des couleurs tendance. Le modèle DARK IRONY dispose d’un boîtier en acier inoxydable sablé surdimensionné, d’un cadran ouvert, d’aiguilles fluorescentes et d’un bracelet robuste. 180 CHF, swatch.com

ÉCO-RESPONSABLE Oris x Bracenet Chaque cadran de cette édition spéciale est une pièce unique emballante, fabriquée à partir de filets de pêche fantômes, à la dérive dans la mer. Une belle appréciation du monde sous-marin, que cette montre permet d’explorer jusqu’à 300 mètres de profondeur. 2 350 CHF, oris.ch

THE RED BULLETIN

93


SORTIR

PLEIN GAZ ! Les prochains événements à ne pas ­manquer cet hiver.

26

AU 31 DÉCEMBRE

SPENGLER CUP, DAVOS La première rencontre de la désormais légendaire Coupe Spengler a eu lieu il y a cent ans. Cette année, six équipes s’affrontent lors de ce tournoi international de hockey sur glace : le tenant du titre HC Ambri-Piotta (Tessin), l’hôte HC Davos, le champion record Team Canada, Frölunda HC (Suède), HC Dynamo ­Pardubice (République tchèque) et KalPa Kuopio ­(Finlande). spenglercup.ch

1

er

MARS

RED BULL TURN IT UP Le Garage de Saint-Gall sera le théâtre d’un concours DJ interactif : Turn it Up! La diversité créative, tout comme l’opinion du public, comptent, et font la différence ! Quatre équipes s’affrontent dans tous les styles de musique. L’équipe qui aura reçu le plus de soutien de la part du public remportera la victoire et composera ensuite un set individuel pour le reste de la fête. redbull.com

5

AU 21 JANVIER

JANVIER

THE BEAT FESTIVAL Ce temps fort de la scène des musiques urbaines, et tout premier festival de Suisse romande dédié au hiphop francophone, prend de l’ampleur et passe à la vitesse supérieure. Les milliers de fans de hip-hop se retrouveront à l’Arena de Genève. Acclamé depuis sa création en 2017, il propose une programmation musicale riche et variée avec des artistes des scènes nationale et ­internationale. Cette année, le lime-up prévoit notamment Booba, Hamza, Werenoi, Favé, Leto et Slimka. thebeatfestival.ch

AU 21 JANVIER

LAAX OPEN

À quoi reconnaît-on le LAAX OPEN ? À Valentino Guseli, le détenteur du record du monde, en vol au-dessus du halfpipe ? Ou à Mia Brookes, l’as du snowboard, qui maîtrise avec grâce les éléments du park ? À Mathilde Gremaud, championne olympique, ou Andri Ragettli, vainqueur en série du freeski, vissés au-dessus des lignes ? Ou encore aux milliers de fans qui applaudissent et font la fête avec les pros sur de la musique live ? C’est certainement au cumul de tous ces éléments. En 2024, la Coupe du monde FIS de snowboard et de freeski aura lieu à Laax. laax.com/open

94

La quarante-sixième édition de la plus célèbre course motorisée du désert débutera le 5 janvier prochain à al-Ula, en Arabie Saoudite, et se terminera le 19 janvier à Yanbu, au bord de la mer Rouge (voir notre article dédié aux jeunes pilotes du Rallye Dakar, page 44). L’événement est à vivre et à suivre en direct sur Red Bull TV. Toutes les infos sur les pilotes et l’itinéraire sur : dakar.com

THE RED BULLETIN

LORENZ RICHARD/RED BULL CONTENT POOL, MARCIN KIN

16

27

Valentino Guseli dans le halfpipe du Laax Open 2023.

RALLYE DAKAR 2024


15 DÉCEMBRE*

JAKOBSHORN NEU!

1

er

NOVEMBRE AU 31 MARS

HUGO SILVA/RED BULL CONTENT POOL, HANS-MARTIN KUDLINSKI, JAN CADOSCH/RED BULL CONTENT POOL, MICHAEL WÜTHRICH/ENGELBERG.CH

BIG WAVE CHALLENGE

Seule une poignée d’hommes et de femmes peuvent affronter les big waves au large des côtes portugaises. En fonction des conditions météo et de la houle, les meilleur·e·s sur la planche tentent leur chance. Le TUDOR Nazaré Tow Surfing Challenge est à suivre en direct. Toutes les infos ici.

Féru·e·s de ski et de snowboard, attention ! Une nouvelle descente dans la ­vallée du domaine skiable du Jakobshorn mène directement de Usser Isch au centre de Davos. Le tracé de la piste, à travers les forêts, rappelle les Rocky Mountains américaines et promet un plaisir de glisse incomparable (mille mètres de dénivelé). La piste noire ne porte pas seulement le nom de « N° 42 », mais aussi celui de « 1k Vertical Jakobshorn ». *Selon les conditions d’enneigement, la piste devrait être ouverte à la mi-décembre. davosklostersmountains.ch

3

FÉVRIER

RED BULL SLEDGENDS Là où d’habitude les voitures prennent la route du Col de la Flüela, les fans de luge pourront profiter de la piste, pour la deuxième fois. Depuis le point culminant, à 2 383 mètres, ce sont 5,65 km de descente. Pour gagner, il ne faut pas être le plus rapide, mais se rapprocher le plus possible du temps moyen de descente. redbull.com

12

AU 14 JANVIER

COURSES DU LAUBERHORN

3

DÉCEMBRE AU 27 JANVIER

EUROPEAN FILM TOUR

Une soirée pleine d’aventure, de sport et d’émotions, voilà ce que promet l’EOFT : neuf films, 120 minutes. En vélo à travers l’Amérique ou en moto dans la toundra. Dans Triple Edge, les Suisses (d’adoption) Michi Wohlleben et Lukas Hinterberger fêtent une première mondiale en alpinisme. Toutes les dates : eoft.eu

THE RED BULLETIN

Russisprung, Hundschopf, Minschkante, Ziel-S : la descente du Lauberhorn est devenue culte. Ainsi, cette année encore, la petite ville de Wengen sera le nombril du monde du ski lorsque la Coupe du monde de ski s’y arrêtera. Outre la plus longue course de descente au monde (4,5 km) sur 1 028 mètres de dénivelé, le Super-G et l’un des slaloms les plus difficiles seront également disputés dans le décor de l’Eiger, du Mönch et de la Jungfrau. Les femmes s’affronteront dans ces mêmes disciplines à Crans-Montana (16-18 février). lauberhorn.ch

15

AU 17 DÉCEMBRE

CM ENGELBERG

Les meilleurs sauteurs à ski au monde s’élanceront du tremplin du Titlis. Avec un changement : les hommes ne seront plus les seuls à profiter de la plus grande installation naturelle de saut à ski helvète. La Suisse accueillera pour la première fois une Coupe du monde féminine de saut à ski. weltcup-engelberg.ch

95


M E N T I O N S L ÉGA L ES

The Red Bulletin Autour du monde

Directeur de la publication Andreas Kornhofer Rédacteur en chef Andreas Rottenschlager

THE RED BULLETIN Suisse, ISSN 2308-5886

THE RED BULLETIN Royaume-Uni, ISSN 2308-5894

Rédacteur en chef DACH David Mayer

Rédaction Anna Mayumi Kerber (dir.), Christine Vitel

Rédaction Ruth McLeod

Éditing David Pesendorfer Directeur exécutif de la création Markus Kietreiber Direction créative Erik Turek (dir.), Kasimir Reimann Direction artistique Marion Bernert-Thomann, Miles English, Tara Thompson Maquette Martina de Carvalho-Hutter, Kevin Faustmann-Goll, Carita Najewitz Rédaction photo Eva Kerschbaum (dir.), Marion Batty (adj.), Susie Forman, Tahira Mirza, Rudi Übelhör Gestion de la rédaction Marion Lukas-Wildmann Managing Editor Ulrich Corazza

The Red B ­ ulletin est distribué chaque mois dans six pays. Vous d ­ écouvrez ici la couverture de l’édition autrichienne dédiée à la compétition musicale Red Bull SoundClash. Le plein d’histoires hors du commun sur redbulletin.com

Global Content Tom Guise (dir.), Lou Boyd Responsable des contenus audios Florian Obkircher Gestion de l’édition Sara Car-Varming (dir.), Ivona Glibusic, Melissa Stutz (Innovator)

Country Project Management Meike Koch Ventes médias & partenariats Christian Bürgi (dir.), christian.buergi@redbull.com Marcel Bannwart, marcel.bannwart@redbull.com Michael Wipraechtiger, michael.wipraechtiger@redbull.com Lauritz Putze lauritz.putze@redbull.com Traductions et adaptations Willy Bottemer, Valérie Guillouet, Claire S ­ chieffer, Jean-Pascal Vachon, Gwendolyn de Vries Secrétariat de rédaction Lucie Donzé Impression Quad/Graphics Europe Sp. z o.o., Pułtuska 120, 07-200 Wyszków, Pologne Abonnements Service des lecteurs, 6002 Lucerne getredbulletin.com, abo@ch.redbulletin.com

Directeur Ventes médias & partenariats Lukas Scharmbacher Gestion de projet création senior Elisabeth Kopanz

THE RED BULLETIN Allemagne, ISSN 2079-4258

Direction artistique Peter Knehtl (dir.), Lisa Jeschko, Martina Maier, Araksya Manukjan, Julia Schinzel, Florian Solly

Rédaction David Mayer

Head of Publishing Operations Sigurd Abele Direct to Consumer Business Peter Schiffer (dir.), Marija Althajm, Melanie Schmid, Yoldaş Yarar Manager Vente et projets spécifiques Klaus Pleninger Service de publicité Manuela Brandstätter, Monika Spitaler Fabrication & Production Veronika Felder (dir.), Martin Brandhofer, Walter O. Sádaba, Sabine Wessig

Secrétariat de rédaction Hans Fleißner (dir.), Petra Hannert, Monika Hasleder, Billy Kirnbauer-Walek Country Project Management Natascha Djodat Ventes médias & partenariats Thomas Hutterer (dir.), Michael Baidinger, Franz Fellner, Ines Gruber, Moritz Philipp Haaf, Wolfgang Kröll, Gabriele MatijevicBeisteiner, Yvonne Mensik, Alfred Minassian, Nicole Okasek-Lang, Britta Pucher, Carina Rzavsky, Nicole Umsait, Johannes Wahrmann-Schär, Ellen Wittmann-Sochor, Ute Wolker, Christian Wörndle, Sabine Zölß

Lithographie Clemens Ragotzky (dir.), Claudia Heis, Nenad Isailovic, Sandra Maiko Krutz, Josef Mühlbacher Finances Nora Kovacs-Horvacs

THE RED BULLETIN France, ISSN 2225-4722

Assistante du Management général Sandra Stolzer

Rédaction Pierre-Henri Camy (dir), Marie-Maxime Dricot, Christine Vitel

Directeur généraux Red Bull Media House Publishing Stefan Ebner

Country Project ­Management Marin Heitzler

Adresse Am Grünen Prater 3, A-1020 Wien, Téléphone: +43 1 90221-0, redbulletin.com

Traductions et adaptations Willy Bottemer, Valérie Guillouet, Claire S ­ chieffer, Jean-Pascal Vachon, Gwendolyn de Vries

Propriétaire, éditeur et rédaction Red Bull Media House GmbH, Oberst-Lepperdinger-Straße 11–15, A-5071 Wals bei Salzburg, Autriche FN 297115i, Landesgericht Salzburg, ATU63611700

Secrétariat de rédaction Audrey Plaza

Secrétariat de rédaction Davydd Chong Country Project ­Management Ollie Stretton Ventes médias & partenariats Mark Bishop, mark.bishop@redbull.com

THE RED BULLETIN Autriche, ISSN 1995-8838 Rédaction Nina Kaltenböck (dir.), Lisa Hechenberger Secrétariat de rédaction Hans Fleißner (dir.), Petra Hannert, Monika Hasleder, Billy Kirnbauer-Walek Country Project ­Management Julian Vater Ventes médias & partenariats Thomas Hutterer (dir.), Michael Baidinger, Franz Fellner, Ines Gruber, Moritz Philipp Haaf, Wolfgang Kröll, Gabriele MatijevicBeisteiner, Yvonne Mensik, Alfred Minassian, Nicole Okasek-Lang, Britta Pucher, Carina Rzavsky, Nicole Umsait, Johannes Wahrmann-Schär, Ellen Wittmann-Sochor, Ute Wolker, Christian Wörndle, Sabine Zölß

THE RED BULLETIN USA, ISSN 2308-586X Rédaction Peter Flax (dir.), Mélissa Gordon, Nora O’Donnell Secrétariat de rédaction David Caplan Country Project ­Management Branden Peters Ventes médias & partenariats Marissa Bobkowski, marissa.bobkowski@redbull.com Tanya Foster, tanya.foster@redbull.com Todd Peters, todd.peters@redbull.com Dave Szych, dave.szych@redbull.com

Ventes médias & partenariats Yoann Aubry, yoann.aubry@redbull.com

Directeurs généraux Dietmar Otti, Christopher Reindl, Marcus Weber

96

THE RED BULLETIN


ABONNEZ-VOUS

Un an, 6 numéros The Red Bulletin + 2 numéros Innovator

POUR 28 CHF SEULEMENT getredbulletin.com


NICOLAS MAHLER

L E T R A I T D E L A FI N

Le prochain The Red Bulletin disponible dès le 10 mars 2024. 98

THE RED BULLETIN



MARCO ODERMATT

SPIRIT


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.