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Tout simplement. Etre présent. Etre dans la présence. Ça veut dire quoi ? Nous serons en présence de l’autre si nous le percevons à partir d’une certaine profondeur. Et nous serons dans une présence relative si nous le percevons à partir de la surface de nousmêmes. La surface ne permet de percevoir que des caractéristiques visibles. Mais ce qui est fondamental en l’autre n’apparaît pas nécessairement à la surface. Pour employer une terminologie religieuse, nous pouvons voir l’autre avec le regard de Dieu «qui seul sonde les cœurs et les reins», dit le psalmiste.

Et si j’avais été dans sa situation ? Ne pas juger. Est-ce possible dans certaines situations ? Pardonner est un préalable pour se trouver dans la compassion envers les person-

fit alors partie très jeune de cette bande de pirates. Qu’il ne voulait pas devenir pirate, mais qu’il le devint. Qu’un de ses amis a violé devant lui une jeune fille et que, entraîné, il a fait la même chose. Et Thich Nhat Hanh, moine bouddhiste, a réalisé que dans les mêmes conditions, il serait devenu, lui aussi, ce pirate ayant violé une jeune fille.

La compréhension profonde Thich Nhat Hanh préconise donc de méditer profondément et longuement sur la situation de cet homme, méditation où le «je» s’identifie aux conditions d’existence qu’a vécu ce petit garçon qui est devenu violeur1. L’acte de cet homme reste épouvantable, mais il est possible d’éprouver de la compassion envers lui qui souffre et fait souffrir. Cette compas-

Tout ce qui souffre en nous a besoin de tendresse et d’amitié, ceci sans complaisance. nes qui commettent des actes indignes. Thich Nhat Hanh, moine bouddhiste, explique que la compassion vient de la compréhension profonde de la situation d’autrui et il donne un exemple tragique. Il raconte l’histoire d’un pirate thaïlandais qui avait violé une jeune fille qui quittait le Vietnam sur un bateau. Comment éprouver de la compassion pour cet homme !? Thich Nhat Hanh explique qu’il s’est mis dans un état de méditation et qu’il s’est imaginé profondément qu’il était né petit garçon de parents thaïlandais pauvres, sans instruction, dans un milieu indigent. Et qu’à 13 ans, il était déjà mis au travail dans des conditions très dures. Que le seul réconfort venait du milieu délinquant qu’il fréquentait. Qu’un homme plus âgé qu’il admirait lui proposa de l’accompagner pour prendre les bijoux et l’or des Vietnamiens qui quittaient leur pays. Qu’il accepta, poussé par ses conditions de vie. Qu’il 16 | Agenda plus - décembre-janvier 2014-2015

sion vient de la compréhension profonde qui, elle-même est issue de la méditation. Aurions-nous agi différemment dans sa situation ? Qui peut affirmer péremptoirement que non ? Ceci dit, on peut aussi ne pas arriver à vouloir même pardonner. Ou ne pas arriver à éprouver la plus petite miette de compassion. Et ça aussi, c’est une souffrance. C’est à soi-même que l’on doit alors de la compassion. Tout ce qui souffre en nous a besoin de tendresse et d’amitié, ceci sans complaisance.

Reconnaître la souffrance d’autrui On est souvent nu face à la souffrance. On est démuni. C’est comme cela. Parfois, on ne peut rien faire. Et c’est terrible ! Il faut accepter cela. Peut-on nier ce que l’autre ressent, s’il le ressent ? Non, bien sûr. C’est un fait. Et


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